Régions 19 juillet 2023

Sécheresse en Abitibi : les éleveurs crient à l’aide

Alors que La Financière agricole du Québec a annoncé un devancement du premier paiement d’assurance stabilisation des revenus agricoles (ASRA) pour les producteurs d’agneaux et de moutons — l’équivalent de 14 M$ à l’échelle de la province —, les producteurs de l’Abitibi-Témiscamingue, toutes productions confondues, attendent avec impatience les compensations d’assurance récolte (ASREC) en cette période de grande sécheresse. 

« Si notre gouvernement a une carte cachée, ça serait peut-être le bon moment qu’il la sorte », fait valoir Bruno Lemieux, de la Ferme Abitibienne, à Palmarolle, en Abitibi-Ouest. Pour l’éleveur d’un troupeau de 600 brebis, si le devancement d’une vingtaine de jours du premier versement d’ASRA est le bienvenu en cette saison désastreuse, « ce n’est pas le jour et la nuit ». 

« Pour une première coupe, trois à quatre balles à l’acre, ça serait un rendement conventionnel. Là, on peut le couper en deux. Et j’ai fait mon dernier champ hier [11 juillet] et on était plus à une balle à l’acre, donc on peut même le couper en quatre », illustre M. Lemieux, qui espérait de bonnes récoltes de foin pour compenser la mauvaise qualité de la saison dernière, abondante, mais qu’il fallait bonifier de maïs et de tourteau, faisant grimper les coûts d’alimentation du troupeau.

Entre feux de forêt et sécheresse, un été accablant en Abitibi-Ouest

En Abitibi-Ouest, où plusieurs producteurs ont dû déménager temporairement leurs troupeaux bovins en pleine période de vêlage en raison des feux de forêt, le moral des troupes est bas, constate M. Lemieux, qui croit qu’un « appui supplémentaire », hors programmes, serait souhaité. « Hier, un producteur de bœuf m’appelait pour savoir si j’avais du foin à vendre. Je sentais le découragement dans sa voix », témoigne-t-il. 

Alors que les quelque 1 000 têtes qui ont dû être déménagées en juin ont pu rentrer au bercail, le président régional de l’Union des producteurs agricoles, Pascal Rheault, estime qu’il est temps que la Financière et le ministère de l’Agriculture (MAPAQ) envoient un signal clair en faveur d’un soutien aux producteurs. « On est encore en attente d’une entente avec le MAPAQ pour essayer de compenser ces producteurs-là et ceux qui ont transporté les animaux. Ça reste problématique quand tu n’as pas de foin », dit-il.

M. Rheault ajoute que la situation en Abitibi-Ouest est particulièrement préoccupante. Il estime que le rendement des foins et fourrages y sera de l’ordre de 15 à 20 % comparativement à la normale. Selon lui, la MRC voisine d’Abitibi serait aussi en disette, avec un rendement estimé à 50 %. Le Témiscamingue ne serait pas en reste non plus. 

« C’est clairement catastrophique, lâche le producteur de grains. Il faut vraiment qu’il y ait des aides au niveau de l’ASREC. Et après, [il faudrait la] bonifier pour la valeur de remplacement, parce qu’il va falloir souvent aller chercher le foin à l’extérieur de la région. Il va falloir que ça s’organise quand même assez rapidement. C’est comme ça quand ta maison passe au feu : si tu ne sais pas que tu vas avoir de l’argent de ton assureur pour repayer ta maison, tu ne pars pas en bâtir une autre. »

Au moment de mettre le journal sous presse, la Financière agricole n’avait toujours pas répondu aux questions de La Terre.