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DUHAMEL-OUEST – Elle a été au cœur de l’action pour défendre les régions à l’Assemblée nationale, mais son engagement politique lui a fait mal. Émilise Lessard-Therrien reprend aujourd’hui son projet agricole et, même si elle n’exclut pas de renouer avec la vie publique, c’est présentement l’envie de participer au développement de l’agriculture de son Témiscamingue qui anime l’ancienne co-porte-parole de Québec solidaire.
Elle ne s’en cache pas : la défaite aux élections de 2022 a été « une grosse débarque ». Son bref passage comme porte-parole non élue de Québec solidaire, et surtout le manque de ressources pour accomplir cette tâche, l’ont aussi épuisée. Alors qu’Émilise Lessard-Therrien a eu besoin de « concret », le retour au jardin s’est naturellement imposé.
Le Goût du pays
Et elle avait déjà des bases solides sur lesquelles construire. Avant de faire de la politique sa vie et de la « souveraineté alimentaire », son « cheval de bataille », Émilise Lessard-Therrien était déjà établie en zone agricole, à Duhamel-Ouest, à un jet de pierre de Ville-Marie, chef-lieu du Témiscamingue. Elle avait déjà démarré un petit projet de farine locale, alors baptisé La Fourmilière. « On trouvait que ça fourmillait tout le temps ici. Mais fourmi et farine, ce n’était vraiment pas un duo gagnant! » rigole-t-elle.
Le choix s’est finalement arrêté sur un nom très « identitaire » : Le Goût du pays, véritable trait d’union entre son engagement idéologique et ses aspirations pour le développement d’un « territoire nourricier ». « En politique, j’étais porte-parole en agriculture et la question de la souveraineté alimentaire, cette résilience, la vitalité des régions, pour moi, c’est un gros tout. En Abitibi-Témiscamingue, on est une belle région céréalière, mais on n’a pas vraiment l’occasion de consommer nos céréales. Tout est transformé dans le sud », note-t-elle.
Le hiatus entre sa défaite électorale de 2022 et la course au co-porte-parolat a été l’occasion idéale de perfectionner son savoir-faire grâce à une formation professionnelle en meunerie artisanale offerte en partie à distance par le Conseil québécois du patrimoine vivant. « Il y a un petit réseau de moulins, par exemple le Moulin Légaré, à Saint-Eustache. Il en reste quelques-uns au Québec qui fonctionnent juste avec la force de l’eau et ils veulent former une relève », explique-t-elle, fière de perpétuer ce geste qui, rappelle-t-elle, a longtemps contribué à nourrir le Québec.
Et la politique?
C’est peut-être ça, au fond, sa nouvelle façon de faire de la politique pour défendre les intérêts des régions et de la ruralité. Et si un parti politique s’articulait autour de ces axes, serait-elle sur les rangs? « On dirait que je n’ai pas l’énergie pour l’initier, qu’il faudrait qu’on le fasse en gang. Je pense que ce sont des voix qui nous manquent », répond-elle, avant de préciser qu’elle reste ouverte. « C’est sûr que j’aurais de la misère à dire non… »
La tête remplie de projets
Émilise Lessard-Therrien affirme que la farine demeurera au cœur de ses activités, mais sa tête bouillonne quand même d’idées pour développer son entreprise au cours des prochaines années. Elle aimerait notamment convertir l’ancienne laiterie dans sa cour arrière en cuisine de transformation et « dépanneur fermier ».
Elle entreprendra aussi, en septembre, un cours en production horticole.
Passionnée de cueillette, Émilise Lessard-Therrien veut aussi contribuer à la mise en valeur des comestibles forestiers. Elle reçoit d’ailleurs La Terre avec une eau aromatisée à la matricaire odorante, plante de la même famille que la camomille et dont le parfum rappelle celui de l’ananas. « J’essaie de les mettre en valeur. Si je fais une pâtisserie avec ma farine, je mets des épices boréales dedans pour que les gens voient. Il faut avoir cette réflexion. On fait venir de la muscade, de la cannelle qui vient de je ne sais où, de loin, alors qu’on a des épices extraordinaires », croit celle qui propose des recettes au marché public, comme des scones aux cassis avec crémage acidulé au sumac.
L’enseignante de formation veut d’ailleurs continuer à transmettre des connaissances. « J’ai plein d’idées avec les camps de jour. On fait des jardins l’été, on implique le camp de jour et après, ça continue avec les écoles. À l’automne, on fait la transformation. Il faut que les enfants apprennent ça. Moi, mes filles tripent et elles sont rendues tellement des ambassadrices. Ce sont elles qui emmènent [les gens] au jardin. Elles leur expliquent tout. C’est drôle! »