Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
« Je dirais que 95 % du soya est “scrap” dans le comté, avec des taux parfois très élevés de grains moisis », dépeint Marc Champagne, producteur et acheteur de grains au Témiscamingue.
« Ce n’est pas compliqué, depuis le mois d’août, nous avons eu seulement trois jours sans pluie par semaine, et je suis généreux », continue-t-il.
L’agriculteur s’inquiète. À vrai dire, plusieurs producteurs n’ont tout simplement pas encore été en mesure d’effectuer leurs récoltes, ce qui a pour conséquence que des cultures de soya, de canola, de maïs et de céréales à pailles seront détruites au champ ou y resteront tout l’hiver. L’autre problème, c’est la qualité du grain récolté. « Parmi les lots battus, le poids spécifique n’est pas élevé. Ça diminue la valeur. Pire encore, il y a peut-être 2 000 à 3 000 tonnes de grains qui ont été carrément refusés pour leur manque de qualité. Les producteurs vont faire quoi avec ce grain-là? » s’interroge le copropriétaire de la ferme Les Grains du Témis, située à Lorrainville.
Dans la municipalité voisine, Jérôme Desjardins cultive 1 500 acres et n’a jamais vu une telle situation. « J’ai de l’avoine que je n’ai pas réussi à battre à temps. Elle est rendue noire; évidemment, personne n’en veut. » Et le soya? « Environ 40 % de mon soya est encore au champ. Je ne sais pas chez vous, mais présentement ici, il y a un pouce de neige et ils en annoncent encore. C’est impossible de récolter », constate M. Desjardins, qui fait également remarquer que l’hiver peut être pris pour de bon, ce qui condamnerait les récoltes et reporterait les labours… au printemps. Le cas échéant, la gestion des résidus risque d’être difficile et le surplus d’ouvrage compliquera les semis. Mais à court terme, la plus grande crainte est d’ordre financier. « Les assurances ne couvriront pas tout. Loin de là. Ce sera une année difficile, avec de grosses pertes financières », entrevoit-il.
Zone sinistrée S.V.P.
Les producteurs du Témiscamingue essaient de s’organiser. Ils ont créé une chaîne d’entraide, où ceux qui ont terminé de récolter laissent leur moissonneuse-batteuse à la disposition des autres. Certains ont ainsi parcouru plus de 200 km. Mais l’heure n’est pas à la joie. Plusieurs agriculteurs n’ont pas d’assurance récolte. « Lors de l’épisode de sécheresse, il y a deux ans, la Financière n’a pas versé beaucoup de dédommagements. Certains se sont dit que tant qu’à avoir une assurance “Loto-Québec”, aussi bien ne pas s’assurer. Malheureusement, ça risque de rendre leur situation très précaire cette année », mentionne M. Lafond. Une productrice des environs assure que le destin de certaines fermes sera littéralement en jeu. « Il y a deux ans, on a eu la sécheresse; l’an passé, les insectes ont ravagé le canola; et cette année, on a souffert des excès de pluie. C’est le bout du bout. Certains producteurs ne passeront pas à travers, j’en suis certaine. C’est trop dur, ce coup-ci. Il y a beaucoup de détresse. Je suis inquiète pour plusieurs », confie-t-elle à la Terre.
Des agriculteurs comme Patrick Lafond envisagent le recours ultime : celui que le Témiscamingue soit désigné comme zone sinistrée. « On va embarquer nos médias et les députés. On veut aller chercher de l’aide, que notre région soit nommée zone sinistrée. Ça ne nous donnera pas la lune, mais au moins, un petit “plaster”. »