Prévention 1 août 2024

Le fils de François Bourassa souhaite que sa mort améliore la sécurité à la ferme 

Une onde de choc secoue la communauté agricole depuis l’annonce de la mort de l’ancien président de la Fédération de l’Union des producteurs agricoles (UPA) de l’Estrie, François Bourassa, victime d’un accident à sa ferme, quelques jours plus tôt.

« Quand il était à l’hôpital, on était au courant qu’il ne reviendrait pas sans séquelles importantes. Il avait trop manqué d’oxygène, raconte son fils, Dominic Bourassa. On continuait de le maintenir en vie pour les dons d’organe, une chose qui était importante pour lui. Pendant ce temps, il fallait continuer les opérations de la ferme, alors on contenait nos émotions. » Au lendemain de sa mort, le 26 juillet, ses sœurs et lui ont toutefois été happés par une vague de témoignages provenant d’un peu partout. « Là, les émotions ont vraiment frappé », confie celui qui est partenaire dans la ferme depuis l’âge de 17 ans.

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Le jour de l’accident, François Bourassa s’affairait à débloquer un silo qui contenait le seigle d’une vieille récolte. Le silo était rempli au quart et la portion restante « était prise en pain », explique Dominic. À la veille des nouvelles récoltes, son père s’était donné la mission de pelleter le tout à l’extérieur du silo, une tâche qu’il effectuait depuis deux jours.

L’homme de 71 ans avait réussi à déloger une bonne partie de la base. Alors qu’il désirait terminer le travail, la portion de grain plus haut – environ trois tonnes, selon son fils – s’est effondrée sur lui. « Notre employée travaillait pas loin. Elle a entendu un bruit, et après, mon père ne répondait plus. J’ai essayé de le chercher pendant 15 minutes, sans y arriver. Ce sont les pompiers qui ont pris le relais et l’ont trouvé », décrit-il avec tristesse.

Dominic Bourassa aimerait que l’accident qui a coûté la vie à son père puisse au moins convaincre la communauté agricole d’améliorer la sécurité à la ferme.

On prend souvent des risques dans nos fermes. Moi, j’en ai déjà pris. Mon père savait que c’était risqué [de débloquer le silo]. Il avait même défendu à notre employée de rentrer dedans, autant pour le risque de se faire enterrer que celui des spores de champignons dans le grain. Habituellement, on prend des risques et il n’arrive rien. Là, il est arrivé quelque chose, et c’est irréversible.

Dominic Bourassa, fils de François Bourassa

L’implication dans les gènes

En plus d’avoir été président de la Fédération de l’UPA de l’Estrie pendant 12 ans, François Bourassa s’est impliqué en agriculture pendant une trentaine d’années. « L’implication, on dirait que c’est un gène dans notre famille. Mon grand-père était impliqué et mon arrière-grand-père aussi », dit Dominic.

Parmi les dossiers importants pour son père, il nomme la reconnaissance de la population envers le milieu agricole. « Il avait aussi à cœur tout le mouvement coopératif. C’est quasiment une religion dans la famille. On a d’ailleurs déjà eu quelques accrochages quand j’ai commencé à demander des prix pour nos intrants à d’autres entreprises que la coop », raconte-t-il avec un brin d’humour.

La mort de son père a fait son chemin jusqu’en Afrique, où des gens ont exprimé leurs condoléances à sa famille, en lien avec l’aide humanitaire à laquelle a participé François Bourassa dans le passé.

Dominic et sa famille ont d’ailleurs été touchés par le nombre impressionnant de commentaires sur les médias sociaux, de même que la nature des témoignages. « Il y a plusieurs témoignages qu’on n’était pas capables de lire sans mouchoirs », souligne-t-il. L’hommage rendu par l’ancien président des Producteurs de lait du Québec Bruno Letendre est l’un de ceux-là. Dominique raconte que les deux hommes avaient l’habitude de se poser des questions embarrassantes devant tout l’auditoire lors des assemblées générales qu’ils présidaient. « Il y avait une bonne dynamique entre les deux », se souvient-il. 

La famille de François Bourrassa a eu besoin de mouchoirs pour lire certains témoignages rendant hommage à l’ancien président de la Fédération de l’UPA de l’Estrie, qui pose ici en compagnie de son ami Bruno Letendre. Photo : Gracieuseté de la Fédération de l’UPA de l’Estrie 

Ce qu’ils ont dit…

 Mon ami est parti. Je ne le reverrai plus, plus de taquinerie, plus de petits sarcasmes ou même des partages et commentaires. J’aimais cet homme, il m’inspirait, me faisait rire. […] Oui, tu étais un grand travailleur et oui, travailler avec toi, c’était amusant. 

Bruno Letendre, ancien président des Producteurs de lait du Québec

Il s’est engagé avec fierté et dévouement envers les productrices et producteurs agricoles et forestiers. Il se faisait un devoir de dénoncer les incohérences ou les préjudices que subissaient les agriculteurs. Il a eu un grand souci de l’environnement. […] Sa vision était un atout pour le monde.

Martin Caron, président de l’Union des producteurs agricoles

 C’était un homme de cœur et de passion. Son engagement pour les productrices et les producteurs agricoles de notre région était sans limite. Il a toujours su faire valoir leurs intérêts et ses conseils ont toujours été précieux pour moi.

Marie-Claude Bibeau, députée fédérale en Estrie et ancienne ministre de l’Agriculture aujourd’hui ministre du Revenu national