Politique 28 juin 2023

Une réciprocité des normes souhaitée

En réaction à l’annonce du 19 juin [sur le renouvellement de programmes de subvention visant à renforcer l’autonomie alimentaire],plusieurs acteurs du milieu agricole ont salué l’avancement du Québec pour la production et la diversification des fruits et légumes en serre, mais ont réitéré que la concurrence souvent déloyale des aliments importés, moins chers que les locaux et soumis à des normes environnementales et de salubrité moins strictes, nuit encore à l’autonomie alimentaire du Québec.

Interrogé à savoir si le gouvernement compte agir pour assurer une meilleure réciprocité des normes, le ministre André Lamontagne a d’abord répondu qu’une telle régie est de juridiction fédérale et qu’il n’a pas de contrôle sur le « dumping ». 

Le palier provincial, a-t-il dit en revanche, peut soutenir les producteurs en les aidant à être plus compétitifs, par l’entremise de programmes de subvention. Il peut aussi accompagner ceux qui souhaitent rapporter des situations précises à l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA). « On demande aux gens sur le terrain de venir nous documenter des cas flagrants où on est capable de comparer [un produit importé et un produit du Québec] et que l’on peut transférer à l’ACIA pour qu’elle puisse enquêter. »


Peggie Clermont

Dépendants des travailleurs étrangers

Le professeur Patrick Mundler, de l’Université Laval, fait valoir que des avancements intéressants ont été réalisés ces dernières années, notamment en ce qui a trait à l’aide accordée dans le développement des petites serres, mais il juge ironique, selon sa vision de l’autonomie, d’investir dans de gros projets de serre qui auront pour incidence, finalement, d’accroître les besoins en main-d’œuvre étrangère. 

À cet effet, la présidente et chef de la direction des affaires pour le Groupe Savoura, Peggie Clermont, estime que le Québec doit miser sur l’innovation et l’automatisation pour justement limiter la dépendance à cette main-d’œuvre. Le travail d’un robot intégré à la nouvelle serre de Sainte-Sophie a d’ailleurs fait l’objet d’une démonstration lors de l’inauguration des installations, le 19 juin. Suivant une ligne d’induction au sol et des capteurs, il transportait des chariots de boîtes de tomates, sans intervention humaine. Une fois le robot arrivé au convoyeur, c’est un système automatisé qui veillait au déchargement des chariots et au dépôt des boîtes. Le véhicule autonome, ensuite, poursuivait son chemin en rapportant les boîtes vides. 

« L’autonomie alimentaire, ça veut dire produire plus dans les installations du Québec, sans dépendre des gens de l’étranger. Ça fait partie des dépendances qu’il faut réduire, et la robotisation, dans ce sens-là, c’est un pôle pour progresser dans l’autonomie alimentaire », croit-elle.


La production de bouvillons en décroissance

Si l’abattage de bouvillons et de vaches de réforme dans la Belle Province a triplé depuis 2019, passant de 20 000 têtes à 60 000 annuellement, le président des Producteurs de bovins du Québec (PBQ), Jean-Thomas Maltais, met en lumière le cheptel de bouvillons produits au Québec, qui lui, est sur une pente descendante. Selon les plus récentes données compilées par son organisation, le nombre d’animaux mis en marché par des producteurs du Québec est passé de 90 876 en 2018 à 77 509 en 2021. Les données pour 2022 ne sont pas encore disponibles, mais tendent encore vers la décroissance. « Il faut vraiment actualiser le modèle d’assurance du revenu pour offrir une stabilité aux producteurs. Il faut vraiment que les producteurs se disent que ça ne les stresse pas de faire des animaux, parce qu’ils obtiendront un bon prix, signale-t-il. Si on veut l’autonomie alimentaire, c’est bien beau de le transformer, mais il faut aussi le produire. »  

Selon d’autres données des PBQ, le Québec ne produit, encore aujourd’hui, que 29 % des volumes de viande de bœuf qu’il consomme.

Le nombre de bouvillons mis en marché par des producteurs du Québec est passé de 90 876 en 2018 à 77 509 en 2021. Photo : Gracieuseté des PBQ