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Toutes les 5 secondes, un enfant de moins de dix ans meurt de faim alors que dans son état actuel, l’agriculture mondiale pourrait nourrir sans problèmes 12 milliards d’êtres humains.
Premier rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à l’alimentation, le Suisse Jean Ziegler ne mâche pas ses mots. « La destruction, chaque année, de dizaines de millions d’hommes, de femmes et d’enfants par la faim constitue le scandale de notre siècle, avance-t-il. La Terre l’a rencontré le 5 avril dernier, alors qu’il était au Québec pour présenter les conclusions de son dernier livre qui fait état de ce désastre, « Destruction massive – Géopolitique de la faim ».
Crime organisé
« La faim tient du crime organisé », soutient le vice-président du comité consultatif du Conseil des Droits de l’homme à l’ONU. Il s’en prend aux « seigneurs des trusts agroalimentaires, aux organisations mercenaires des États-Unis (Organisation mondiale du commerce, Banque mondiale, Fonds monétaire international), aux requins tigres de la spéculation et aux vautours de l’or vert (biocarburants) qui prétendent que la faim ne peut être vaincue que par les lois dites naturelles du marché ». Il rappelle que « dix sociétés transcontinentales contrôlent 85 % du commerce mondial de l’alimentation et fixent le prix des produits agricoles. Elles échappent totalement à tout contrôle public et étatique et décident à chaque jour de qui va vivre et qui va mourir. »
Et pourtant…on a calculé en 2000 qu’il faudrait mobiliser 80 G$ durant 15 ans pour conjurer les huit fléaux qui affectent l’humanité, la faim au premier chef. Trop d’argent, direz-vous? « Il suffirait de prélever un impôt annuel de 2 % sur le patrimoine des 1 210 milliardaires alors connus », note M. Ziegler.
Solutions
Malgré ce désastre, M. Ziegler garde espoir, « car la faim est faite de mains d’hommes et peut être vaincue par les hommes ». Baisser les bras ne ferait que conforter les « croisés du néolibéralisme », dit-il.
Ziegler fonde son espoir à la fois sur les luttes en cours dans l’hémisphère Sud et sur la capacité d’indignation, d’engagement et de solidarité des citoyens dans les démocraties occidentales. « L’éveil des forces révolutionnaires paysannes qui se produit dans les campagnes de l’hémisphère Sud est la force principale du combat contre la faim », explique-t-il. Il évoque le Mouvement des paysans sans terre du Brésil et Via Campesina qui regroupe 200 millions de métayers, de petits paysans et de travailleurs ruraux. En Occident, c’est de la société civile, des associations syndicales et paysannes que viendront les pressions nécessaires pour mettre fin au fléau de la faim vu le manque de volonté des États.