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L’embauche d’un premier analyste en investissements en terres agricoles et forestières par la CDPQ soulève des questions.
C’est ce que constate le PDG de l’Institut de recherche en économie contemporaine (IRÉC), Robert Laplante. Ce dernier voit dans la création de ce poste d’analyste une « intention bien arrêtée » de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) de se positionner « pour faire de la spéculation en achetant des terres agricoles ».
Il croit que le bas de laine des Québécois veut « s’équiper d’analystes pour participer à l’achat de terres, au même titre que les fonds d’investissement spéculatifs ».
« Ce n’est pas banal. Et c’est justement ce contre quoi nous nous battons. La Caisse est en train de jouer le jeu des fonds spéculatifs, qui achètent des terres uniquement pour le rendement, et non pas pour l’avancement de l’agriculture », martèle-t-il en entrevue à la Terre.
Rappelons qu’au printemps 2012, la Caisse a injecté 250 M$ dans le fonds TIAA-CREF Global Agriculture, dont la valeur est estimée à 2 milliards $. Il s’agit là d’une première incursion dans l’investissement dans les terres agricoles aux États-Unis, en Australie et au Brésil.
Une agriculture en santé
Robert Laplante ne veut pas empêcher la Caisse de faire des rendements en investissant ailleurs sur le globe, mais il croit que « l’argent des Québécois serait mieux investi s’il servait la cause d’une agriculture en santé », dans la foulée du projet de souveraineté alimentaire du gouvernement de Pauline Marois.
« Je dis que la Caisse se doit d’être présente au Québec dans ce secteur. Parce que si elle n’occupe pas une partie de l’espace, d’autres vont le faire à sa place. Et ce seront des fonds d’investissement étrangers », dit-il.
Voilà pourquoi l’économiste souhaite voir la Caisse « agir comme soutien financier » en vue de la mise sur pied d’une Société d’aménagement et de développement agricole du Québec (SADAQ), dont le rôle consisterait justement à permettre aux agriculteurs de rester « maîtres de leurs terres ».
« Ce serait logique qu’elle soit un intervenant de premier plan, tout en recherchant des rendements raisonnables et tout en contribuant, également, au développement de notre économie », insiste-t-il.
Robert Laplante craint toutefois que le gouvernement péquiste « rate la cible », dans l’élaboration de sa politique agricole attendue au printemps, s’il ne prend pas les moyens d’impliquer la Caisse au sein de la future SADAQ.
« Or, le temps presse! Les fonds d’investissement se mettent en place et les acteurs de l’industrie s’outillent. La Caisse doit jouer son rôle et le gouvernement doit prendre ses responsabilités. C’est d’ailleurs le ministre de l’Agriculture, François Gendron, qui disait partager les préoccupations du monde agricole, lors du dernier congrès de l’UPA, sur la question de l’accaparement des terres agricoles », rappelle Robert Laplante.
Un point de vue souligné à grands traits par le président de l’Union, Marcel Groleau. Il presse lui aussi le gouvernement de « bouger dans le dossier » de l’accaparement des terres par les spéculateurs. En entrevue au quotidien Le Devoir, il disait appréhender que « les terres deviennent la propriété de ces fonds-là ».
Du côté de la Caisse de dépôt, le porte-parole Maxime Chagnon a paru surpris par les réactions entourant l’embauche de ce premier analyste agricole. « Il ne faut pas y voir une intention arrêtée de la Caisse d’élaborer des stratégies d’investissement. Nous voulons plutôt voir et comprendre le spectre mondial dans ce secteur », a-t-il voulu expliquer.