Politique 28 juin 2023

Québec garde le cap sur l’autonomie alimentaire

SAINTE-SOPHIE – La nouvelle serre de l’entreprise Savoura, à Sainte-Sophie, dans les Laurentides, était bondée d’invités et de journalistes, le 19 juin. Le premier ministre du Québec, François Legault, y était de passage pour confirmer que 175 M$ sur cinq ans seront injectés pour le renouvellement de programmes de subvention visant à renforcer l’autonomie alimentaire.

« Je me rappelle très bien avoir été inquiet [en 2020] quand les frontières ont été fermées, a-t-il raconté. Au Québec, la moitié de ce qu’on mange vient d’ailleurs. Donc j’avais un stress énorme de me demander : est-ce qu’on sera capables de nourrir les Québécois? »

C’est d’ailleurs pour « se sortir de ce stress » que le premier ministre s’est fixé l’objectif d’améliorer l’autonomie alimentaire du Québec, en encourageant, par du soutien financier, la croissance de la production de fruits et légumes en serre et l’amélioration de la compétitivité des entreprises.

Depuis 2020, la production en serre a augmenté de 85 %, a affirmé M. Legault, en rappelant que l’objectif initial de son gouvernement de doubler la production d’ici 2025 est presque atteint. 

Le Québec, a précisé le ministre de l’Agriculture, André Lamontagne, serait autonome à 100 % pour la production de laitues et à 90 % pour celle de tomates et de concombres. Les cultures d’aubergines et de poivrons en serre, par ailleurs, se développent.

Où en sommes-nous de façon générale?

Selon les plus récentes données du ministère de l’Agriculture, datant de 2019, la production locale était égale ou supérieure à la consommation dans plusieurs catégories d’aliments, tels que ceux sous gestion de l’offre, la viande de porc et de veau, les pommes de terre et le sirop d’érable, mais inférieure pour les fruits et légumes, ainsi que la viande ovine et bovine. 

Questionné à savoir où se situe la province aujourd’hui sur le plan de l’autosuffisance de façon générale, au-delà de l’offre de légumes de serre, le ministre Lamontagne a reconnu que de nombreux aliments que l’on consomme viennent encore « de partout dans le monde », mais a assuré que le Québec se démarque pour la production et la transformation de denrées de base et par une chaîne d’approvisionnement « robuste ». 

Pour la filière du bœuf, a-t-il aussi évoqué à titre d’exemple, la capacité d’abattage annuelle de bouvillons et de vaches de réforme a triplé depuis 2019, passant de 20 000 têtes à 60 000.

Détails de l’enveloppe de 175 M$

Un montant de 100 M$ servira à reconduire le programme qui encourage la robotisation et l’implantation de systèmes de gestion de la qualité dans les usines de transformation alimentaire. Quelque 800 entreprises, ces dernières années, auraient été accompagnées par l’entremise de celui-ci. 

Une enveloppe de 45 M$ est réservée au renouvellement de l’Initiative en productivité végétale, qui s’adresse aux entreprises agricoles spécialisées dans les cultures de végétaux. 

Une somme de 30 M$ est injectée dans le Programme de soutien au développement des entreprises serricoles. Au 1er mai 2023, 114 projets avaient déjà bénéficié, depuis 2020, de cette subvention pouvant atteindre jusqu’à 600 000 $ par entreprise.

Ce qu’ils ont dit…

Pour nous, l’autonomie alimentaire […], ça veut aussi dire la réciprocité des normes, pour que, malgré les règlements et les lois qu’on nous impose, on soit capables de continuer d’en vivre. […] Oui, on est capables de s’autosuffire à l’année dans plusieurs catégories, comme les pommes de terre, les oignons et les légumes racines avec les légumes de serre, mais on a des réglementations qui n’existent pas ailleurs dans le monde. Donc c’est difficile de concurrencer le Mexique, les États-Unis, ou même l’Ontario.

Catherine Lefebvre, présidente de l’Association des producteurs maraîchers du Québec

Cette annonce nous rassure : on n’est pas dans l’urgence. Ça permet la continuité des projets. Pour nous, c’est important que le soutien soit présent à long terme. [Les programmes] sont là pour cinq ans, les producteurs peuvent donc prendre le temps de bien développer leur projet. Ils peuvent le proposer quand il est mûr et prêt à être mis en application.

André Mousseau, président des Producteurs en serre du Québec

C’est important d’exprimer [au gouvernement] nos défis, parce que c’est rough. Il y a des embûches incroyables et la concurrence est féroce. Peut-être qu’ils ne peuvent s’occuper du problème de front, que ce n’est peut-être pas de leur juridiction, mais qu’ils peuvent mettre en place d’autres mesures d’atténuation pour nous aider.

Peggie Clermont, présidente et chef de la direction des affaires pour le Groupe Savoura

Je me dois de parler du secteur porcin présentement, qui vit des difficultés. Quand on a un produit qui est un fleuron du Québec, on se doit de soutenir ces fleurons-là. C’est aussi ça, l’autonomie alimentaire; on ne parle pas juste du marché du Québec et du Canada, mais des autres marchés aussi. […] C’est notre garde-manger, mais aussi notre savoir-faire qu’on peut montrer aux autres et les retombées qu’on peut avoir.

Martin Caron, président de l’Union des producteurs agricoles