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Après la pause estivale, les porteurs de dossiers agricoles des différents partis politiques retourneront à Québec, le 10 septembre, et à Ottawa, le 16 septembre, dans un état d’esprit combatif. Le cheval de bataille de la majorité d’entre eux à la rentrée parlementaire? Réformer plus que jamais les programmes de gestion des risques pour les adapter aux changements climatiques.
Sur la scène provinciale
La Financière dans la mire d’André Fortin
Aux yeux du libéral André Fortin, les aléas météorologiques des dernières semaines ont démontré l’importance de réformer globalement les programmes de La Financière agricole du Québec (FADQ). Le porte-parole du Parti libéral du Québec en matière d’agriculture a demandé au ministre Lamontagne que la FADQ vienne rendre des comptes aux parlementaires, ce qui a été refusé à deux reprises. « Pourtant, chaque fois qu’on rencontre des agriculteurs, ils ont toujours un ou plusieurs enjeux en lien avec les programmes, la disponibilité, la rapidité, l’efficacité de la Financière agricole. Alors pour nous, ça va demeurer un cheval de bataille pour la prochaine session », dit-il. Selon lui, la réforme des programmes de la Financière doit également viser la relève. Plusieurs jeunes producteurs cumulent un deuxième emploi pour rembourser les dettes de la ferme. « Alors, de savoir que ces jeunes-là, aujourd’hui, continuent de perdre une partie substantielle de leur subvention parce qu’ils ont un emploi à l’extérieur de la ferme, en 2024, ça nous apparaît complètement contre-productif », fait valoir le député de Pontiac, qui estime que le dossier pourrait être réglé rapidement avec de la volonté politique.
Alejandra Zaga Mendez insistera sur le registre d’achat des terres
Après avoir rechargé ses batteries cet été, la porte-parole agricole de Québec solidaire, Alejandra Zaga Mendez, reviendra à l’Assemblée nationale avec trois dossiers sous le bras. D’une part, elle souhaite s’assurer que la Coalition avenir Québec (CAQ) se positionne en faveur du principe du projet de loi qu’elle a déposé en 2023 sur l’établissement d’un registre d’achat des terres agricoles. « C’est pour comprendre qui est en train d’acheter des terres agricoles, comment et à quelle fin et ça permettra de mieux protéger le territoire agricole dans des lieux où on sait que le prix des terres continue d’augmenter et ça a un grand effet sur les producteurs », mentionne la députée de Verdun. Si la CAQ accepte le projet de loi, il sera envoyé pour étude à la Commission de l’agriculture. Ensuite, comme son homologue libéral, elle souhaite réformer les programmes de La Financière agricole du Québec pour les adapter aux changements climatiques. Enfin, un sondage publié cet été sur l’offre alimentaire québécoise dans les institutions publiques l’a confortée dans l’idée d’imposer des quotas d’aliments québécois dans les achats des écoles, des hôpitaux et des autres institutions publiques, comparativement au programme actuel qui est volontaire.
Les allègements réglementaires comme cheval de bataille du ministre Lamontagne
Le ministre de l’Agriculture du Québec, André Lamontagne, a hâte de retrouver ses 89 collègues du gouvernement. Le dossier de l’allègement réglementaire sera son cheval de bataille pour la prochaine session parlementaire. « Ce qu’on a déclenché, c’est majeur! s’exclame-t-il. Ce sont 14 ministères et organismes, et c’est la secrétaire générale du gouvernement qui pilote ça. On veut arriver avec un nombre appréciable d’allègements pour le secteur agricole. » Il assure, par ailleurs, que les travaux lancés sur l’assurance récolte sont bien amorcés et il veillera, durant la prochaine session, à ce que la relation et les communications entre La Financière agricole du Québec et les différentes filières continuent d’avancer dans la bonne direction.
Le ministre Lamontagne est fier d’avoir vu le dossier du code de conduite des épiciers arriver à un dénouement cet été, lors de la conférence des ministres fédéral, provinciaux et territoriaux, qui a eu lieu au Yukon. L’autre dossier dont il est le porte-étendard depuis 2019 et qui a progressé est celui de la réciprocité des normes. « Dans la dernière année, j’ai voulu amener ce sujet-là à l’ordre du jour et ça n’a pas été évident parce que les gens n’ont pas tous la même compréhension de ce que ça veut dire, et finalement, on s’est entendus sur le terme “équivalence des normes” et j’ai pu présenter le sujet, dit-il. Et j’ai eu l’engagement des provinces et des territoires d’approfondir leur compréhension et leurs connaissances de cette réalité-là. La grosse machine est embarquée. Ça fait partie de l’agenda, maintenant, et ça, pour moi, c’est un gros, gros point. »
Pascal Bérubé veut être à l’écoute des agriculteurs
C’est gonflé à bloc que le député de Matane-Matapédia pour le Parti québécois, Pascal Bérubé, rentrera à l’Assemblée nationale. Selon les projections du site Qc125, son parti formerait le gouvernement s’il y avait une élection aujourd’hui. « On est encore à deux ans de l’élection, mais on est sur une erre d’aller qui fait qu’on porte davantage attention à nos propositions dans tous les domaines, y compris l’agriculture », dit-il. Ce dernier mentionne qu’il défendra les enjeux au fur et à mesure qu’ils se présenteront à la prochaine session, en précisant qu’il entretient une bonne relation avec l’Union des producteurs agricoles et le ministre Lamontagne. En fin de session, il avait été question notamment de lutte contre la spéculation des terres. « J’avais abordé ça à l’étude des crédits 2023 et on a fait un exercice très précis dans la MRC de La Mitis, dans l’ouest de mon territoire. On a été capables d’identifier qu’une partie significative du territoire a été vendue à un gros spéculateur. C’est un phénomène inquiétant chez nous et j’ai même proposé au ministre Lamontagne d’avoir une carte interactive en temps réel de la propriété agricole, qu’on puisse, sur tout le territoire du Québec, identifier à qui appartiennent les terres au même titre qu’on puisse savoir qui a claimé dans le domaine minier », décrit-il. Le ministre n’y a pas donné suite, mais le député poursuivra les représentations en ce sens.
Audrey Bogemans hérite de l’agriculture de proximité
Depuis deux ans, la députée caquiste d’Iberville, Audrey Bogemans, est le bras droit du ministre André Lamontagne. En juin, l’ancienne productrice de grains a appris qu’elle obtiendrait un mandat du ministre sur l’agriculture de proximité. Enthousiaste, elle a profité de l’été pour rencontrer des producteurs, des centres de recherche et des associations à cet effet. « Quand on pense proximité, on pense souvent agrotourisme, circuits courts, par exemple, cultures émergentes. Tout ça est inclus dans l’agriculture de proximité, mais c’est aussi toutes les fermes de moins de 100 000 $ de revenu, donc c’est vraiment l’occupation de notre territoire et je veux que l’occupation du territoire sonne aussi dynamisme économique, solidité et prospérité pour nos milieux », explique-t-elle. La députée rappelle toutefois que pour éviter un conflit d’intérêts ou une apparence de conflit d’intérêts, elle ne pourra pas traiter de sujets sur lesquels l’entreprise familiale – de laquelle elle a vendu ses parts participatives – est encore active, soit tout ce qui est relatif aux terres agricoles et à la culture des grains. « À la CAPERN [Commission de l’agriculture, des pêcheries, de l’énergie et des ressources naturelles], sur l’assurance récolte, je pourrai parler, mais je ne pourrai pas voter », donne-t-elle en exemple.
Sur la scène fédérale
La dernière session du ministre MacAulay avant les élections
Bien que l’été du ministre fédéral de l’Agriculture, Lawrence MacAulay, ait été chargé, il reviendra à la Chambre des communes optimiste et plein d’énergie pour entreprendre la dernière session parlementaire avant les élections. Durant celle-ci, il poursuivra entre autres l’élaboration de la Stratégie pour une agriculture durable lancée par sa prédécesseure, Marie-Claude Bibeau, en 2022. « Je suis heureux de poursuivre notre travail visant à renforcer et développer nos marchés agricoles dans le monde entier et de faire avancer les travaux en vue d’une stratégie pour une agriculture durable, a-t-il répondu à La Terre par écrit. Je suis également impatient de continuer à travailler en étroite collaboration avec mes homologues provinciaux et territoriaux afin de veiller à ce que nos agriculteurs bénéficient du soutien dont ils ont besoin, au moment où ils en ont besoin. Il y a beaucoup de travail à faire dans les mois à venir, et je m’en réjouis. » Il souligne que cet été, la conférence des ministres fédéral, provinciaux et territoriaux a permis, notamment, d’obtenir l’adhésion de tous les épiciers au code de conduite qui entrera en vigueur en 2025.
Richard Lehoux dénonce la lenteur de la progression des dossiers
De l’avis du député conservateur de la circonscription de Beauce, Richard Lehoux, il y a beaucoup de chaudrons sur le feu à Ottawa, mais peu de dossiers agricoles qui progressent. Ce dernier réclame, depuis quatre ans et demi, de modifier les programmes de gestion des risques. « On espère qu’on va se mettre à table rapidement cet automne et avoir des propositions concrètes de la part du gouvernement là-dessus », dit-il. Il juge que l’ancienne ministre de l’Agriculture, Marie-Claude Bibeau, a fait un travail correct à ce propos, mais qu’elle n’avait pas l’écoute de Justin Trudeau au conseil des ministres. « Ça fait un an que M. MacAulay est en poste et on n’a pas vu un grand vent de changement au niveau des programmes », indique celui qui estime que le dossier est pourtant urgent.
Il mentionne également les nombreuses propositions du Comité permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire, dont il fait partie, sur la hausse du coût des intrants ou la taxe carbone. « Il n’y a aucun plan de match sur la table qui démontre qu’il y a de l’intérêt à prendre des recommandations qu’on a faites », déplore-t-il. Durant la session, le député surveillera également les conséquences de l’imposition du gain en capital sur les transferts de ferme – une mesure annoncée dans le dernier budget – et la taxe sur les logements sous-utilisés.
La gestion de l’offre, prioritaire pour Yves Perron
Le projet de loi sur la gestion de l’offre sera la priorité du député Yves Perron, du Bloc Québécois, à la rentrée. Celui-ci a été déposé à la Chambre des communes, en juin 2022, et adopté en troisième lecture un an plus tard, mais sa mise en examen au comité des affaires étrangères et du commerce international du Sénat tarde. « Le président et le vice-président du comité sont d’anciens négociateurs internationaux […] qui sont contre. Ils ont dit publiquement qu’ils voulaient tuer le projet de loi alors ils l’ont bloqué tant qu’ils le pouvaient », indique Yves Perron. Malgré les pressions du Bloc, le comité sénatorial n’a pas commencé l’étude du projet de loi l’hiver dernier, mais devrait commencer à la rentrée. « Ça va être difficile. C’est possible qu’on ait un avis négatif en comité parce qu’il y a beaucoup d’opposition dans le comité et les négociateurs internationaux sont des gens brillants, super bien articulés qui ont beaucoup d’influence, et au Sénat, les gens ne vont pas nécessairement approfondir la connaissance des projets de loi; ils vont se fier aux spécialistes », affirme-t-il. Yves Perron rencontre tous les sénateurs individuellement pour expliquer, à l’aide d’une présentation PowerPoint, ce qu’est la gestion de l’offre et les raisons qui ont mené au dépôt de ce projet de loi. « Généralement, on les rallie, constate le député. Même si le comité finissait par donner un avis négatif, je suis quand même assez confiant que le Sénat l’adopterait pareil. » Dès la rentrée, celui qui faisait de la « diplomatie de corridor polie » jusqu’à maintenant insistera davantage. « À un moment donné, il faut choquer parce que cette loi-là ne reviendra plus jamais, déclare-t-il. C’est l’occasion qu’on a. Les conservateurs arriveront au pouvoir et ce sera fini. »