Politique 22 septembre 2014

« Les agriculteurs perdent leur indépendance » – Chris Petersen

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Le système agroalimentaire actuel serait « intenable » à cause du coût des intrants et du transport.

AMES, Iowa — « Les agriculteurs perdent leur indépendance », lance Chris Petersen, président de l’organisation agricole Iowa Farmers Union (IFU), pour l’État très agricole de l’Iowa. Ce producteur de porcs possédait une ferme conventionnelle jusqu’en 1998, quand le prix s’est effondré. Comme 60 000 producteurs d’Iowa d’alors, il perd son gagne-pain. Le producteur de la municipalité de Clear Lake avait alors le choix entre cesser ses activités ou travailler pour une grande entreprise. « Le prix du porc est trop bas et c’est trop risqué », estime M. Petersen, en entrevue à la Terre dans un restaurant de la petite ville d’Ames le 26 février dernier, qui fait valoir que les banquiers hésitaient et hésitent encore grandement à prêter à un producteur qui n’est pas associé à un transformateur (packer).

L’éleveur choisit plutôt de se spécialiser dans la production de porcs de race Berkshire pour un marché de niche. Il possède maintenant seulement 30 truies, mais il cultive aussi des légumes. Il vend ses animaux de 50 % à 100 % plus cher et la viande se retrouve sur la côte Ouest, au Japon et un peu en Iowa. Il compte aussi beaucoup sur l’achat local et la préférence des consommateurs pour la ferme familiale du coin. « Ça commence à marcher, les gens se réveillent », estime M. Petersen, qui cite en exemple de petites laiteries locales qui revivent et recommencent à être distribuées dans certains supermarchés d’Iowa.

Le producteur pense de toute façon que le système agroalimentaire actuel est « intenable » à cause du coût des intrants et du transport. On pourrait donc revenir à la situation d’il y a 40 ans alors qu’une conserverie d’Iowa fournissait du maïs sucré à cinq ou six États limitrophes et qu’on pouvait compter sur des stations d’achat de poulet à tous les 30 km dans l’État. « La ferme familiale locale est le meilleur système de sécurité alimentaire parce que les agriculteurs mangent leurs produits », fait aussi valoir le président de l’IFU.

La revitalisation d’une filière de transformation et de distribution locale serait par ailleurs bénéfique pour l’emploi et le développement rural. Le représentant de la National Farmers Union souhaite donc la création de plus de marchés publics et un meilleur accès au marché institutionnel et aux épiceries.

Revoir les règles du marché

« Le marché ne fonctionne pas », martèle Chris Petersen, qui compte convaincre les politiciens de bannir les contrats d’intégration dans l’élevage ainsi que d’adopter d’autres mesures antitrust. Il dit en avoir discuté à deux reprises avec le président Barack Obama, qui parlerait de M. Petersen comme de son « agriculteur préféré ».

Il faut dire que le président de l’IFU est très actif politiquement pour le Parti démocrate. Il a d’ailleurs contribué, à sa façon, à la victoire inattendue d’Obama dans le caucus de l’Iowa en janvier 2008. M. Petersen et d’autres agriculteurs s’étaient alors fermement opposés à la candidature d’Hillary Clinton, qui avait nommé dans son équipe une personne proche de l’agrobusiness. Bref, même si l’IFU ne compte que 1500 membres, son influence politique n’est pas négligeable. « Je veux voir la ferme familiale survivre et les agriculteurs obtenir un prix légitime tout en conservant leur indépendance