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De tout temps, les unités ont été importantes à considérer. J’entends encore ma mère me rappeler à diverses occasions : « On ne compare pas des pommes avec des oranges! » L’idée étant qu’une pomme n’est pas équivalente à une orange et qu’on ne peut comparer que ce qui est comparable afin de ne pas tirer de mauvaises conclusions. Pour les antibiotiques, les unités de mesure sont également très importantes pour réussir à en quantifier l’utilisation et ainsi définir une utilisation judicieuse de ces substances.
« Quantifier » l’utilisation des antibiotiques est un défi d’envergure. Quelques exemples valent mille mots pour en illustrer la difficulté. À posologie identique, vous devez administrer 13 fois moins de grammes d’un même antibiotique pour traiter un jeune veau de 50 kg par rapport à une vache laitière de 650 kg, juste à cause de la différence de poids corporel. Pour autant, peut-on parler d’une utilisation 13 fois plus élevée dans le cas du traitement de la vache? Dans le même ordre d’idée, vous utilisez environ 10 fois plus d’un même antibiotique, en nombre de grammes, lorsqu’il est donné par voie injectable par rapport à une administration intramammaire, juste à cause de la différence de voie d’administration. Pour autant, est-ce que le traitement injectable « vaut » 10 traitements intramammaires?
La dose type complète
Pour donner une importance égale à chaque traitement, une unité a vu le jour en Europe dans les dernières années : la dose type complète (en anglais Defined Course Dose). Celle-ci représente la quantité moyenne d’antibiotiques nécessaire pour réaliser un traitement complet à un animal de poids moyen. Dans les exemples donnés, le traitement du veau équivaut à celui de la vache en nombre de doses types administrées, une dose type ayant été administrée à chacun. Le traitement injectable de la vache équivaut au traitement intramammaire car une dose type est administrée dans les deux cas.
Comment sont définies ces doses types? Un groupe de chercheurs de la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal, en collaboration avec les professionnels du Programme intégré canadien de surveillance de la résistance aux antimicrobiens (PICRA), a défini récemment les doses types canadiennes pour les bovins. Tous les produits contenant au moins un antibiotique et vendus au Canada avec une indication pour le traitement des bovins ont été répertoriés. Une dose type a été définie par antibiotique et par voie d’administration, en se basant uniquement sur l’étiquette des produits. Le même travail avait d’ailleurs été réalisé en 2019 par le groupe du PICRA pour les productions porcine et avicole.
Ces doses n’ont pas la prétention de représenter les doses réelles utilisées dans les fermes : les utilisations hors étiquette n’ont pas été prises en compte et le poids corporel varie selon le type de production, l’âge de l’animal, la race… Par contre, ces doses types permettent, à l’échelle pancanadienne, de dresser un portrait global de l’utilisation d’antibiotiques par production, de comparer les productions entre elles avec une unité semblablement définie et équitable et aussi de situer le Canada sur le plan international. De tels rapports sont d’ailleurs maintenant exigés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE).
Hélène Lardé, D.M.V., M. Sc., DACVS-LA, Candidate au Ph. D., Faculté de médecine vétérinaire, Université de Montréal