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En Ukraine aussi la course aux semis est lancée. Cette année, toutefois, les agriculteurs ukrainiens sèment en portant des casques et des gilets pare-balles parce que les champs peuvent avoir été minés par l’ennemi russe. Ils le font quand même, au péril de leur vie, non seulement parce qu’ils ont la lourde responsabilité de nourrir l’armée ukrainienne et la population locale, mais aussi parce qu’ils ont le furieux désir de défendre la souveraineté alimentaire et l’indépendance de leur pays.
L’agriculture est l’une des principales cibles des Russes depuis l’invasion de l’Ukraine le 24 février, selon Sofia Burtak, la responsable en Ukraine du programme de coopératives dans les secteurs laitiers et des grains pour l’organisation non gouvernementale québécoise SOCODEVI. « Une proportion importante des superficies agricoles du nord et du sud-ouest du pays sont parsemés de mines, et il est dangereux pour les agriculteurs de cultiver ces terres », dit-elle en précisant que les combats font actuellement rage dans ces régions.
Les producteurs ont de la difficulté à s’approvisionner en essence, en pesticides, en engrais et en machinerie, alors que les petites fermes empruntent habituellement le matériel aux plus grosses. Les troupes russes volent ou bombardent les équipements ou la machinerie agricole, selon ce que lui racontent les producteurs locaux.
« Nos grands-parents cultivaient leur terre et produisaient tous les biens nécessaires à la subsistance de leur foyer. Posséder une propriété est une fierté et représente l’ingrédient secret de la survie des Ukrainiens pendant toutes ces années », indique Mme Burtak. D’ailleurs, les producteurs réservent des parties de leurs champs pour cultiver des produits de première nécessité afin d’approvisionner localement les habitants de la région.
70 % des superficies
Selon le ministère de la Politique agraire et de l’Alimentation de l’Ukraine, les producteurs ukrainiens devraient malgré tout semer 70 % de la superficie du pays ce printemps, soit l’équivalent de 14 millions d’hectares. Il estime que 100 millions de tonnes et d’oléagineux seront récoltés en 2022, ce qui représente la moitié du volume produit l’année précédente. Selon l’une des plus grandes entreprises agroalimentaires d’Ukraine, l’Ukrainian Agribusiness Club (UAC), les producteurs planteront moins de maïs et plus de soya et de tournesol cette année. Sofia Burtak estime quant à elle que les producteurs avaient déjà acheté leurs semences à l’automne et n’anticipe pas de grands changements pour la saison 2022. Rappelons que l’Ukraine est un important producteur mondial de tournesol, de blé et de maïs.
En date du 29 avril, les trois principaux ports d’exportations agricoles du pays sur la mer Noire, soit Odessa, Mykolaïv et Marioupol, étaient bloqués. Or, la capacité d’entreposage de la nouvelle récolte pourrait être menacée, puisqu’il reste entre 15 et 20 millions de tonnes de grains de la dernière saison à exporter dans les installations portuaires. L’Ukraine exporte habituellement entre six et sept tonnes de grains et d’oléagineux par mois. L’incapacité d’exporter déprécie le prix des denrées payé aux producteurs dans le pays.
Une aide farmer to farmer requise
En Ukraine, l’aide internationale tend à diminuer après trois mois de conflits, constate Sofia Burtak, de SOCODEVI. Cette aide ne répond pas non plus aux besoins spécifiques des producteurs agricoles, estime-t-elle, soutenant que l’aide la plus efficace est celle qui est envoyée directement par des producteurs étrangers vers des producteurs ukrainiens, sans passer par les instances internationales. Sur le terrain, les producteurs auraient besoin de pesticides, d’engrais et de petits tracteurs pour les fermes laitières et horticoles de taille modeste. Des campagnes de financement sont toujours en cours, dont celle organisée par la SOCODEVI. Pour donner : socodevi.org/faire-un-don.