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Très souvent, lorsque les propriétaires d’entreprises agricoles jugent qu’il est temps de transférer leur entreprise, il est déjà trop tard pour planifier leur retraite. La question du financement du coût de vie après la retraite devient alors très épineuse.
Plus souvent qu’autrement, les seuls actifs que possède un producteur agricole sont les biens utilisés pour la ferme et situés sur celle-ci, soit les animaux, les équipements, les terres, les quotas et la maison. Tous ces biens ont une grande valeur mais ne génèrent pas beaucoup de revenus et surtout pas lorsqu’ils ne sont plus utilisés en agriculture. Lorsque le transfert à une relève est envisagé, force est de constater que le bénéficiaire du transfert, pratiquement toujours un enfant, n’a généralement aucune ressource financière sauf l’argent que lui procurera l’entreprise agricole. Le vendeur acceptera que l’acheteur le paie sur une période de temps assez longue (de 15 à 20 ans parfois) et bien souvent la créance ne porte pas intérêt. Si l’entreprise n’a pas les moyens de rembourser les parents comme ils le souhaitent, pourront-ils compter sur les régimes publics comme la pension de la Sécurité de la vieillesse ou le RRQ? Ces programmes seront-ils encore fiables dans quelques années? Comme plusieurs propriétaires d’entreprises agricoles n’ont pas contribué au maximum au RRQ au fil des années, on comprend que les seuls revenus de l’État pourraient ne pas être suffisants pour assurer la sécurité financière recherchée. Le tableau ci-contre présente la situation où les cotisants n’ont pas contribué au maximum du RRQ.
Est-on mieux servi par soi-même?
Pour aider les individus à accumuler du capital et permettre aux parents de « patienter » pour les paiements demandés à leurs enfants pour le transfert de la ferme (et même réduire le prix attendu lors du transfert), deux mécanismes fiscaux sont disponibles. Il s’agit du régime enregistré d’épargne retraite (REÉR) dans lequel un individu peut contribuer et qui a comme caractéristiques de rendre la contribution déductible dans le calcul du revenu et de rendre imposables les sommes accumulées dans le régime seulement lorsqu’elles seront versées à l’individu. Il existe également depuis le 1er janvier 2009, le compte d’épargne libre d’impôt (CÉLI). Ce compte d’accumulation de capital permet de gagner des revenus de placements qui seront non imposables.
Régime enregistré d’épargne-retraite (REÉR)
La déduction maximale que peut réclamer un individu dans sa déclaration de revenus correspond au moins élevé de deux montants, soit d’une part le montant effectivement contribué par l’individu et qui n’a pas encore été déduit et d’autre part le total des droits de contribution accumulés par l’individu qui n’ont pas encore été utilisés.
Le droit de cotisation pour 2010 correspond à 18 % du revenu « gagné » de 2009 jusqu’à un maximum de 22 000 $ (22 450 $ en 2011) plus les droits de cotisation inutilisés des années antérieures. Si l’individu est membre d’un régime de retraite, on devra soustraire le facteur d’équivalence qui correspond aux droits de pension gagnés par l’individu. Le revenu gagné est principalement constitué du total du revenu d’emploi, du revenu d’entreprise, du revenu de location et des pensions alimentaires imposables. De ce total, on enlève les pertes d’entreprises, les pertes de location et les pensions alimentaires déduites dans le calcul du revenu.
Prenons le cas d’un producteur qui exploite une entreprise agricole qui lui a généré un revenu de 50 000 $ en 2009. Il s’agissait de sa seule source de revenu. Il désire contribuer à son REÉR pour avoir une déduction en 2010. Son droit de cotisation s’élève donc à 9000 $ (18 % de 50 000 $) pour 2010 et sa contribution devra être effectuée avant le 1er mars 2011. S’il ne contribue que 5000 $ le 20 février 2011, il ne pourra déduire que ce montant de son revenu de 2010. La portion de son droit de cotisation de 2010 inutilisée, soit 4000 $, pourra être reportée aux années futures et s’ajoutera à son droit de cotisation dès 2011.
Une contribution pourra aussi être faite au nom du conjoint. De cette façon, les revenus futurs pourront être fractionnés entre les conjoints et il y aura une réduction de l’impôt lors des retraits.
Le REÉR constitue un abri fiscal très intéressant. Les contributions à un REÉR sont généralement déductibles dans le calcul du revenu imposable, ce qui permet de réduire les impôts en plus de faire gagner certains autres crédits ou aides pour la famille. En effet, plusieurs crédits sont payés en fonction du revenu familial. Ces avantages sont principalement : la prime au travail du Québec, les prestations pour enfants fédérales, les crédits de TPS et TVQ, l’assurance médicaments, la contribution au fonds des services de santé et les paiements de soutien aux familles du Québec.
Le taux de réduction des avantages est assez surprenant à certains niveaux. Ainsi, si une personne reçoit un revenu supplémentaire de 1000 $, que cette personne a trois enfants et son revenu familial se situe entre 30 000 $ et 40 000 $, le paiement de l’impôt sur ce montant et la perte d’une partie des crédits sociaux correspondront à un impôt de 102 %. C’est donc dire que pour recevoir ce 1000 $ supplémentaire, la personne paiera indirectement 1020 $! Elle aura donc intérêt à contribuer à un REÉR. Pour cette personne, chaque 100 $ de contribution lui fera économiser 102 $. De plus, si elle acquiert un placement dans le Fonds de solidarité de la FTQ, elle aura droit à un crédit supplémentaire de 30 %, soit un retour net de 132 % ou à un crédit supplémentaire de 40 %, soit un retour net de 142 %, pour un placement dans le Fondaction de la CSN.
Lors de la retraite, le bénéficiaire d’un REÉR pourra retirer les sommes d’un seul coup, sous forme de rentes viagères ou de fonds enregistré de revenu de retraite (FERR). Dans ces derniers cas, il s’agit de répartir les sommes accumulées sur la durée restante de la vie du bénéficiaire ou de son ou sa conjointe.
Le compte d’épargne libre d’impôt (CÉLI)
Depuis le 1er janvier 2009, chaque résident canadien, de 18 ans et plus au moment d’effectuer le dépôt, peut déposer jusqu’à 5000 $ par année dans le compte d’épargne libre d’impôt (CÉLI). Le montant inutilisé se cumule. Ainsi, une personne qui n’a jamais contribué à un CÉLI pourra mettre 15 000 $ en 2011.
Le CÉLI est différent du REÉR. Lors du dépôt d’argent dans le CÉLI, aucune déduction fiscale n’est permise. Les revenus accumulés dans le CÉLI (intérêts, dividende, gain en capital, etc.), s’accumuleront libre d’impôt (tout comme le REÉR) mais lors du retrait d’argent, le capital et les revenus accumulés ne seront pas imposables. Les sommes retirées du CÉLI s’ajouteront aux droits de cotisation (5000 $ par année) de la personne pour l’année suivante. Ainsi, si quelqu’un retire 10 000 $ de son CÉLI, ses droits de contribution futurs augmenteront automatiquement de 10 000 $ pour tenir compte du retrait. Un CÉLI peut être ouvert dans la plupart des institutions financières qui ont actuellement le droit d’offrir des REÉR. Puisque les revenus et les retraits du CÉLI ne sont pas inclus dans le calcul du revenu imposable, ils ne seront pas pris en considération pour établir l’admissibilité à différents programmes sociaux (ex : prestations fiscales pour enfants, supplément du revenu garanti, prêts et bourses, etc.).
Au décès du cotisant, le CÉLI ne sera pas imposable et sera transférable au conjoint survivant.
Le tableau qui suit permet de visualiser l’impact d’une contribution annuelle dans un régime comme le REÉR ou le CÉLI donnant un rendement de 5 % sur une période de 20 ans.
Mieux vaut plus tôt que trop tard
Règle générale, un individu aura avantage à contribuer tôt dans sa vie à un REÉR car les rendements non imposables ont un effet exponentiel qui permet d’accumuler des sommes importantes. Reprenons le cas de notre producteur qui, bien qu’ayant besoin de ses liquidités, décide de contribuer dès maintenant à son REÉR ou CÉLI. Il y versera 5000 $ par année et continuera ainsi pendant vingt ans. Son voisin, qui veut lui aussi investir dans un REÉR ou CÉLI, préfère attendre dix ans avant de contribuer et versera 10 000 $ par année pour les dix années suivantes. Tous deux obtiendront un rendement annuel de 8 % sur les sommes investies.
Bien que les deux voisins aient contribué chacun 100 000$ au total, notre producteur aura réussi à accumuler 220 810 $ au bout de 20 ans. Son voisin quant à lui aura accumulé la somme de 144 866 $ soit 83 944 $ de moins que notre producteur. On réalise qu’il vaut mieux contribuer tôt même pour des montants modestes.