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Après déjà quelques années de procédures administratives éprouvantes pour faire croître leur cheptel laitier dans un horizon de 10 à 20 ans, les propriétaires des fermes Landrynoise et Lansi, toutes deux de Saint-Albert dans le Centre-du-Québec, ont reçu une bonne tape dans le dos le 26 février. Le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) a recommandé dans un rapport que les projets des deux entreprises soient autorisés par le ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques.
« C’est une très bonne nouvelle », a réagi le propriétaire de la Ferme Lansi, Sylvain Landry. Ce dernier était loin de s’imaginer que les démarches seraient aussi ardues lorsqu’il a déposé sa demande de projet d’expansion au ministère de l’Environnement en 2014. Bien qu’il reste des étapes au processus d’étude d’impact pour faire passer progressivement son troupeau de 670 vaches en lactation à 1 350, la conclusion du BAPE représente un pas en avant, selon lui. À terme, il souhaiterait passer d’une production de 1 200 kg de MG/jour à 2 200 kg de MG/jour.
Des projets sur plus de 15 ans
À la Ferme Landrynoise, la plus grosse ferme laitière du Québec, l’objectif est de faire croître le troupeau de 1 300 vaches en lactation à 2 300 d’ici 2030 et d’atteindre une production de 3 700 kg de MG/jour. « Ça se peut très bien qu’on ne soit pas capable de se rendre là; ça dépendra de beaucoup de facteurs », note l’un des copropriétaires, Carl Landry. Outre les lourdes et onéreuses procédures d’étude d’impact, le temps d’acquisition des quotas de lait nécessaires à l’expansion de cheptels laitiers aussi importants que ceux des fermes Landrynoise et Lansi est un obstacle important.
« C’est écrit dans le rapport du BAPE qu’on se donne jusqu’à 2055, parce qu’on ne savait pas quoi répondre. En fait, ça pourrait aller à dans dix ans. On pourrait aussi ne jamais atteindre notre objectif de doubler le cheptel. On ne le sait pas », souligne Sylvain Landry, cousin des propriétaires de la Ferme Landrynoise.
La gestion de l’offre fait en sorte que des confrères doivent quitter la production ou vendre leur quota pour que d’autres producteurs puissent en acheter par l’entremise du système centralisé. Les quotas disponibles chaque mois sont répartis entre les agriculteurs qui ont fait une demande d’achat. Par ailleurs, les plus grosses fermes ne peuvent acquérir plus de 6 kg de MG/jour chaque mois, à l’heure actuelle. « Ça pourrait être long à ce rythme-là », soutient Sylvain Landry.
Des démarches « douloureuses »
« Quand on se lance là-dedans, il faut s’attendre à ce que ce soit coûteux, long et éprouvant; ce sera pire que ce qu’on anticipait au départ », prévient Carl Landry, qui évalue son projet d’expansion à une valeur de 100 à 115 M$.
« Toutes ces procédures, c’est douloureux », renchérit Sylvain Landry, qui estime de son côté à 200 M$ la somme qu’il devra investir au total pour doubler son cheptel, incluant les dépenses qu’il a déjà faites depuis 2014. Outre les 10 M$ qu’il a déboursés en 2019 pour construire une nouvelle étable et acquérir de l’équipement, il calcule dans son estimation l’achat de terres et de bêtes ainsi que le droit de produire. Il inclut également les sommes requises pour embaucher des ressources afin de l’aider à répondre aux nombreuses exigences environnementales. « Je préfère faire ces démarches-là moi-même pour épargner ça à mes fils et à mes petits-enfants qui prendront la relève », soutient-il.
Pour réussir sa croissance, il faut planifier
Selon René Roy, agroéconomiste pour Lactanet bien connu dans le domaine de la gestion agricole, l’erreur commise par de nombreux producteurs laitiers qui souhaitent croître est de « vouloir faire les choses trop rapidement ».
« La clé, c’est la planification rigoureuse à long terme. Si on veut augmenter sa production de 100 kg de MG/jour, ça ne se fera pas en un an. Ça peut prendre cinq ans, même plus », explique-t-il.
Ce dernier soutient que les producteurs ont intérêt à faire l’acquisition des bêtes avant de construire une nouvelle étable, quitte à assumer les frais d’élevage à forfait s’ils manquent d’espace. Il suggère également aux agriculteurs de faire l’acquisition du maximum de quota possible avant de faire construire.
« Une bâtisse vide qui ne rapporte rien, il n’y a rien de pire que ça. Ceux qui réussissent leur projet d’expansion mettent plusieurs années à planifier avant d’investir dans de nouvelles installations. La planification est longue, mais quand ils s’y mettent, ça va vite », conclut-il.
Conditions environnementales Dans son rapport, le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) suggère au ministère de l’Environnement d’approuver les projets d’expansion des fermes Landrynoise et Lansi, mais émet certaines recommandations. Concernant spécifiquement la Ferme Lansi, l’autorisation éventuelle devrait être conditionnelle à la réalisation des travaux correctifs des bandes riveraines, exigés dans un jugement obtenu par la municipalité de Saint-Valère, après un recours juridique. Les activités de la ferme s’étendent jusqu’à cette municipalité voisine de Saint-Albert. Pour les deux fermes, le BAPE suggère par ailleurs au ministère d’exiger un examen environnemental rigoureux pour chaque tranche supplémentaire de 400 unités animales sous gestion sur fumier liquide afin de s’assurer d’une conformité au Règlement relatif à l’évaluation et l’examen des impacts sur l’environnement de certains projets. |