Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
À lire également :
- Le bien-être animal et l’élevage porcin
- Le bien-être animal et les poules pondeuses
- Le bien être animal et le transport
- Le bien-être animal : une valeur partagée par les éleveurs
- Dossier : Le bien-être animal
Selon une étude, les problèmes de boiterie touchent de 20 à 30 % des vaches laitières canadiennes. Cela entraîne un coût estimé à environ 400 $ par vache boiteuse et une perte de 5500 $ par année pour un producteur possédant un troupeau de 55 têtes. Ces chiffres font réaliser à plusieurs éleveurs que le bien-être animal peut se révéler rentable. À cela s’additionne la perception d’un consommateur de plus en plus informé et sensible au traitement que l’on réserve aux animaux.
La vache se cogne à cause d’un mauvais positionnement des barres
La même vache plus confortable grâce à un positionnement de barres adéquat
Lors d’un récent voyage en Californie, L’Utili-Terre a été stupéfié par le scepticisme et le négativisme des consommateurs américains envers les pratiques de leur industrie laitière. Plusieurs évoquaient ces fermes gigantesques, dont certaines contiennent plus de 10 000 bêtes, où les vaches sont traitées comme des machines, stimulées aux hormones de croissance, forcées de tomber en chaleur par des hormones de synchronisation, amputées de leur queue et écornées. Des images de vaches aux prises avec de graves problèmes de mammite, boitant ou glissant dans une mare d’excréments ont été diffusées ici et là sur Internet. Ces images, combinées au travail des groupes de pression, ont semé le doute chez plusieurs.
Entendons-nous : la situation est complètement différente au Québec. Très rares sont les voix qui dénigrent les producteurs laitiers d’ici. Mais puisque cette production a bonne presse, pourquoi alors renforcer les normes de bien-être? Anne-Marie de Passillé, chercheuse chez Agriculture et Agroalimentaire Canada répond : « Historiquement parlant, dans les années 1980, l’industrie canadienne était perçue comme novatrice en mettant en place des codes de pratiques volontaires. Ceux-ci sont toutefois considérés comme insuffisants aujourd’hui, surtout comparativement à ce qui se fait en Europe et aux États-Unis. C’est donc pour répondre à la critique internationale, rassurer les consommateurs canadiens et diminuer les coûts financiers entraînés par les mauvaises pratiques d’élevage que de nouvelles exigences en matière de bien-être des vaches laitières ont été formulées. Elles sont publiées dans un ouvrage très complet intitulé Code de pratiques pour le soin et la manipulation des bovins laitiers. »
Le Code : la norme?
Le Code comporte des exigences qui devraient idéalement être respectées par tous les producteurs, mais aucune réglementation ne les y oblige; il s’agit d’une démarche volontaire. « Manifestement, nous aimerions que les pratiques décrites dans le dernier Code soient adoptées par un maximum de producteurs, souligne Thérèse Beaulieu, directrice adjointe aux communications stratégiques chez Les Producteurs laitiers du Canada. Le Code repose sur des connaissances scientifiques qui, en améliorant le bien-être des vaches, augmentent directement les performances du troupeau. De plus, si nous devons démontrer à nos consommateurs que leurs produits laitiers répondent à des normes de bien-être animal, le Code nous permettra d’être prêts. » Le fameux Code ne remet pas en doute la compétence des éleveurs laitiers qui sont généralement réputés pour prendre grand soin de leurs bêtes, mais il propose des améliorations. À ce sujet, les prochaines lignes présentent des changements suggérés par l’industrie, de même que des initiatives de certains producteurs pour le bien-être animal.
Taille des sabots. « C’est inscrit en haut de ma liste, dit Sylvain Fraser, propriétaire de la Ferme Terranous inc. Cette tâche n’est pas des plus amusantes, mais si tu attends qu’une vache boite, il est déjà trop tard : l’animal est inconfortable et sa production vient de baisser. » Ce producteur de la Mauricie a remarqué une diminution des pertes de production et des coûts de traitement depuis qu’il effectue deux tailles de sabots par année plutôt qu’une. « Les chiromanciennes lisent les lignes de la main, mais un producteur peut en apprendre beaucoup sur la santé d’une vache en regardant sous ses sabots. Par exemple, si j’aperçois des ulcères, c’est un signe de carences alimentaires ou un problème d’inconfort. » Le Code abonde dans le même sens en mentionnant qu’un manque de régularité dans la taille des onglons constitue une cause de boiterie. Il souligne toutefois qu’il faut éviter les tailles excessives; une erreur courante qui peut également entraîner des problèmes de boiterie. De fait, la taille doit simplement redonner la forme naturelle à l’onglon.
Largeur des stalles et des allées. Yves Choinière est ingénieur et copropriétaire d’une importante firme-conseil spécialisée en génie agricole. À ses yeux, plusieurs installations n’ont pas suivi l’évolution de la génétique. « Certaines vaches pèsent maintenant plus de 1400 livres et même les logettes d’une largeur de 48 pouces sont trop étroites en stabulation libre. La tendance s’oriente peu à peu vers les stalles de 50 pouces. Les vaches faisant plus de 1550 livres devraient quant à elles disposer d’un espace de 52 pouces, une situation toutefois assez rare au Québec. Mais les logettes ne constituent pas les seules installations qu’il faut adapter. En stabulation libre, les traverses et les allées d’alimentation doivent aussi être agrandies. » Le Code recommande que les allées donnant accès aux mangeoires mesurent au moins 14 pieds de largeur. Les traverses devraient compter 12 pieds et plus de largeur; Yves Choinière parle même d’une tendance à 16 pieds. « Une vache doit boire de 80 à 130 litres d’eau par jour et elle le fait généralement en 25 minutes. L’abreuvoir étant fixé au mur de la traverse, si la vache est bousculée ou dérangée, elle risque de cesser de s’abreuver. Moins de liquide ingéré égale moins de lait produit. »
Lorsque plusieurs vaches se déplacent en même temps, une traverse et une allée d’alimentation plus larges diminuent le nombre d’occasions où les animaux se blessent sur les infrastructures et font décroître les occurrences de brutalité de la part des dominantes. Élargir les allées représente toutefois des coûts. « Les nouvelles normes d’espace génèrent à elles seules des frais supplémentaires de 10 à 15 % lors de la construction d’un nouveau bâtiment », estime M. Choinière. Dans le cas d’une étable à stabulation entravée déjà existante, augmenter la taille de chaque logette nécessite d’en diminuer le nombre : « En 2001, nous avons doublé la superficie. Mais parce que nous avons élargi les stalles afin de les rendre confortables pour les vaches de plus en plus grosses, nous n’avons pu augmenter le troupeau que du quart, passant de 48 à 60 vaches », note Sylvain Fraser.
Positionnement des barres. Une vache doit être couchée au moins dix heures par jour, ce qui constitue un comportement normal en prairie. Steve Adam, spécialiste confort et comportement chez Valacta, ajoute qu’au-delà de ce délai, chaque heure supplémentaire où la vache sera au repos engendre des gains de production de 1,7 kg par jour. « La logette doit être confortable, c’est ce qui permet à la vache de se coucher fréquemment. Or, si la bête se cogne sur une barre chaque fois qu’elle se lève ou si la mauvaise configuration de sa logette l’oblige à exécuter des mouvements douloureux à chaque levée, la fréquence et la durée de ses périodes de repos en seront diminuées. » Tout comme le sont les affirmations de M. Adam, le Code est clair à ce sujet : des stalles confortables qui n’entravent pas le mouvement des vaches permettent réellement à ces dernières de produire davantage, de donner du lait de meilleure qualité et de bénéficier d’une meilleure santé.
Un positionnement de barres inadéquat se remarque à l’apparition de blessures au cou et aux pattes arrière. Mais le meilleur moyen de le diagnostiquer consiste simplement à observer la levée des animaux. Une vidéo a justement été tournée à la ferme de M. Fraser, où un problème de positionnement de barres restreignait certaines bêtes. La vache filmée demeure sur ses genoux, les fesses relevées, et attend. Elle se demande pendant un certain temps comment faire pour se lever sans se cogner. La logette a ensuite été reconfigurée correctement. De fait, le positionnement des barres est un art; il faut des ajustements et être bien conseillé. Dans les stabulations entravées, Steve Adam recommande une hauteur de 48 à 50 pouces pour la barre d’attache; mais horizontalement, il importe de décaler celle-ci de 14 pouces par rapport à la barre d’alimentation, et ce, à l’opposé du dalot. En stabulation libre, la hauteur reste la même, mais la barre de cou doit se trouver à environ 70 pouces de l’allée de circulation.
L’envers de la médaille du confort accru des vaches concerne l’entretien. « Une vache qui se lève avec aisance se tient un peu plus profondément dans sa logette, ce qui signifie qu’elle y défèque davantage, augmentant le temps de main d’œuvre », précise Steve Adams. Il existe des dresseurs électriques qui, par le biais de légères décharges, font reculer la vache lorsqu’elle se lève. Mais ce moyen ne fait pas l’unanimité. « On repositionne les barres pour améliorer leur bien-être. J’aurais bien de la difficulté à regarder mes vaches dans les yeux si, par la suite, je leur donnais des décharges électriques sous prétexte de les rendre plus propres », nuance Sylvain Fraser.
Litière. Selon le Code, les élevages au sein desquels les vaches sont propres et où la litière est maintenue en bon état présentent les plus faibles taux d’incidence de mammite. Plusieurs fermes laitières vouent une grande importance à la litière. C’est le cas à Laurierville, où des éleveurs ont investi dans ce qui est considéré comme le nec plus ultra des litières : le sable. « Nos vaches se couchent maintenant sur une litière composée d’une épaisseur de huit pouces de sable. Nous pouvons affirmer que leur confort est supérieur, puisqu’auparavant elles se trouvaient sur une litière standard, et les éraflures de même que les blessures s’avéraient plus fréquentes. En fait, 10 à 15 % de nos vaches présentaient des jarrets enflés; aujourd’hui, c’est extrêmement rare. Le sable étant également une matière inorganique, il représente un milieu moins propice au développement de bactéries que la ripe ou la paille. Le nombre de mammites a diminué significativement », observe Sabrina Caron, copropriétaire. Elle ajoute que le sable nettoie les pattes et est plus sec. Il fait ainsi obstacle à un problème rencontré en stabulation libre : les pattes des animaux qui baignent dans l’humidité. Si la litière de sable ajoute au confort des vaches, le tapis peut également y contribuer, souligne M. Giguere. « Avec le fumier et l’urine, les rainures sur le béton s’avéraient insuffisantes; les taures glissaient et avaient même peur de se déplacer. Nous avons donc disposé des tapis dans leur parc et dans toutes les allées. » Les propriétaires de la Ferme Savaron sont conscients que leurs installations subiront une usure prématurée en raison du sable; mais pour eux, ce type de litière demeure avantageux et s’insère dans une logique d’entreprise. « L’étable a été construite l’an dernier. Ça constitue un investissement très important et à long terme. Pour nous, il était important de mettre en place des installations et des pratiques augmentant le bien-être animal. D’une part, parce qu’elles seront peut-être exigées des consommateurs, d’autre part, parce qu’elles induisent des performances supplémentaires et augmentent la longévité des vaches. »
Parc de vêlage. « Il était une époque pas si lointaine où les producteurs et financiers n’associaient pas de rentabilité aux aires de traitement que nous proposions, se souvient Yves Choinière. Aujourd’hui, 10 à 15 % de l’espace logeable d’une étable en stabulation libre comprend une zone de traitement particulier. Les animaux y reçoivent de meilleurs soins; ils sont moins stressés et le contrôle sanitaire est supérieur. Nous préconisons des enclos de vêlage indépendants, où une litière mince d’un pouce remplace la traditionnelle accumulation de paille. L’objectif : chaque fois qu’une vache a vêlé, l’enclos est nettoyé et désinfecté pour briser le cycle de maladies, comme la paratuberculose. Et pour un animal blessé ou malade, j’estime qu’il s’agit d’une source indéniable de bien-être qu’il puisse être soigné dans le calme, sans être bousculé par les autres. » Le Code valide cette méthode et souligne qu’une aire de vêlage maintenue propre avant et après la naissance du veau minimise les problèmes pouvant mettre à l’épreuve son système immunitaire.
Compétition alimentaire. En stabulation libre, l’espace disponible par vache à la mangeoire doit être suffisant. Autrement, on enfreint une règle de bien-être animal fondamentale : la satiété alimentaire. De plus, un manque d’accès aux mangeoires entraîne une réduction du temps que passent les vaches à s’alimenter, en particulier chez les dominées et les génisses, diminuant leurs rendements laitiers et contribuant à un certain niveau de stress. Le Code recommande que la ration soit également adaptée au stade de reproduction, comme celui de la transition entre la période de gestation et de lactation, par exemple. Autrement, la vache pourrait être incapable de combler sa faim, devenant alors susceptible de présenter des défenses immunitaires réduites, des performances à la baisse, et même, de vivre moins longtemps. Sylvain Fraser est un éleveur qui prend ces éléments au sérieux. « Une vache en fin de lactation a bon appétit, mais il faut surveiller sa quantité de nourriture, car une trop forte corpulence pourrait lui occasionner certains problèmes, comme des troubles du métabolisme au vêlage. Inversement, une bête en début de lactation mange moins vite. Sauf qu’ici, les vaches ne sont pas groupées selon leur phase de lactation. Pour empêcher les vaches en fin de lactation de manger la ration de celles qui en sont au début, des séparateurs les empêchent d’avoir accès à la nourriture de leurs voisines. »
Ventilation. « Quand nous avons agrandi, on nous a conseillé des murs ouverts pour profiter de la ventilation naturelle; mais nous avons vite réalisé qu’étant situés dans une petite vallée, le vent n’était pas suffisant pour rafraîchir les bêtes. Lors de chaudes journées, non seulement les vaches étaient essoufflées simplement à se tenir debout, mais les mouches étaient – extrêmement – nombreuses! Nous avons installé six ventilateurs de type tunnel qui ont corrigé la situation. Des changements réels ont été mesurés concernant le confort des vaches; car même en période de températures élevées, leur production est constante, a observé M. Fraser. » Selon le Code, la ventilation devrait abaisser les concentrations en ammoniac sous les 25 ppm et permettre aux vaches de résister à la chaleur. Des données scientifiques soulignent que les températures chaudes doivent être contrôlées, puisqu’elles créent un inconfort aux vaches ainsi qu’une baisse de production. Ce phénomène touche encore davantage les vaches d’élite. En effet, leur métabolisme dédié à une production élevée engendre un important dégagement de chaleur, les rendant plus sensibles aux températures très chaudes.
Génétique. Les avancées en matière de génétique ont bien servi les producteurs québécois. Mais les généticiens sont pointés du doigt; en Europe du moins, pour avoir manqué d’équilibre dans leur sélection, priorisant la production au détriment de la santé des vaches. De fait, les super productrices seraient davantage concernées par des problèmes de désordres métaboliques et de mammites. Leur longévité s’en trouverait également affectée. Anne-Marie de Passillé commente : « Une production de 14 000 kg de lait, c’est quand même inouï si l’on compare aux 3000 kg qu’une vache donnait il y a 50 ans! Sauf qu’avant de penser à les rendre encore plus productives, nous devrions prendre une pause et orienter les progrès génétiques vers le bien-être et la santé des vaches. Des bêtes moins sujettes aux infections ou aux maladies, qui vivent plus longtemps, voilà ce qui me paraît un choix avantageux dans la sélection génétique des producteurs. »
Pratiques douloureuses. Le Code recommande d’effectuer l’écornage avant que les veaux n’aient atteint l’âge de trois semaines, et qu’une combinaison de sédatif, d’anesthésiant local et d’analgésique soit administrée. Dans la même optique, si la castration s’avère nécessaire, il faut la pratiquer à un jeune âge et employer des mesures de contrôle de la douleur. Car il est documenté que toutes les techniques de castration, même celles employant le traditionnel élastique, induisent de la douleur et de la souffrance. Des mesures visant à contrôler ces dernières devraient également accompagner le marquage au fer des bêtes, dans les cas où cette pratique est imposée pour l’exportation. Une exigence est mise en évidence : ne pas amputer la queue des vaches, à moins que des raisons médicales ne soient évoquées. L’amputation de la queue provoque douleur et inconfort, les génisses montrant notamment une plus grande sensibilité du moignon à la chaleur et au froid. La perte de la fonction « chasse-mouches » brime l’animal, sans compter le risque d’infection. Or, le Code met en lumière des recherches indiquant que contrairement à ce que croient certains producteurs, couper la queue ne contribue pas de façon évidente à la propreté du pis et des pattes et ne réduit pas le risque d’infection mammaire. Raser les poils du pis à intervalles réguliers constitue par contre une pratique recommandée. Pour plus de rapidité, l’épilation thermique à l’aide d’une flamme tiède employée correctement, s’avère un bon choix.
Vaches au pâturage. L’Autorité européenne de sécurité des aliments a récemment publié une revue scientifique dans laquelle on mentionne que le manque d’accès au pâturage constituait une entrave au bien-être des vaches laitières. En Scandinavie, la réglementation de certains pays oblige les producteurs à envoyer leurs vaches laitières au pâturage, au moins durant l’été. Est-ce réaliste au Québec? « J’avais l’idée que des vaches attachées perdaient la forme, relate Sylvain Fraser. Ainsi, pendant dix ans, nous avons aménagé un enclos d’exercice à l’extérieur et nous les avons sorties tous les jours durant une heure, même l’hiver. Mais nous en sommes venus à la conclusion que ce n’était pas si bénéfique. Avec la neige ou la glace, les vaches glissaient de temps à autre, ce qui entraînait des blessures. Lors des journées froides, mes plus vieilles vaches ne faisaient pas trop d’exercice, préférant demeurer près de la porte. Maintenant, nous les attachons durant la lactation et les plaçons en stabulation libre lors du tarissement. Cela me paraît une meilleure pratique pour leur bien-être, surtout considérant que mes pâturages ne se trouvent pas vraiment à proximité de l’étable. » Il semble que sortir les vaches quotidiennement obéisse à la théorie du cas par cas. Certains producteurs québécois le font et y voient des avantages. D’autres, comme Sabrina et Danny, ont remarqué des effets positifs sur l’état physique de leurs animaux, simplement en passant de la stabulation entravée à la stabulation libre. Est-ce que cette dernière est obligatoirement à privilégier? « La stabulation entravée n’est pas bien vue dans l’univers du bien-être animal, reconnaît Anne-Marie de Passillé. Au Québec, 92 % des vaches logent dans des étables entravées. Nous observons une tendance vers la stabulation libre, et à titre comparatif, en Alberta, 87 % des vaches ne sont pas attachées. Pour maximiser le bien-être de l’animal, je pencherais vers une stabulation libre. Toutefois, l’entretien et les soins portés aux animaux revêtent plus d’importance que l’installation. Même en stabulation libre, le bien-être des vaches peut s’avérer inférieur si l’étable est sale et manque de litière, comparativement à une stabulation entravée, propre et bien aménagée. » De son côté, le Code mentionne que le temps passé en dehors des surfaces dures comme le béton constitue un important facteur de réduction de boiterie et qu’il est possible de concevoir des zones de circulation mieux drainées, diminuant ainsi la présence de boue et de glace. Aux États-Unis, des fermes possèdent ce type de zones, conçues à l’aide de toiles géotextiles et de gravier.
Luminosité. Plusieurs producteurs se sont maintenant conformés à la norme des 200 lux, conscients que cela améliore les performances. « Notre ancienne étable était aménagée dans une structure métallique en demi-rond. Ce type de bâtiment limite le nombre de fenêtres et la luminosité présentait une déficience. Dans la nouvelle étable, nous avons favorisé une forte lumière naturelle, et la clarté dépasse du double les normes. Cela a contribué à améliorer le taux de reproduction et la consommation de nourriture des vaches, confirme Sabrina Caron. » Outre les meilleures performances, un bon éclairage réduit le risque de blessures lors des déplacements des bêtes.
Les producteurs évalués?
Nombre d’intervenants du secteur laitier aimeraient qu’un moyen soit mis en place pour assurer l’application de mesures améliorant le bien-être des vaches laitières. « En Californie, des évaluateurs externes notent le nombre de blessures ainsi que les méthodes des éleveurs. Ce genre de contrôle a diminué le taux de boiterie sous la barre des 10 %. Je doute qu’une loi vienne forcer les producteurs canadiens à être ainsi évalués, mais pour l’instant, un système d’audits internes volontaires est envisagé. » Anne-Marie de Passillé ajoute que les Producteurs laitiers du Canada sont justement à développer un outil permettant aux éleveurs de poser un diagnostic sur le bien-être de leurs vaches. Si des points faibles sont relevés, l’outil fournira des moyens pour y remédier. Cet outil est présentement testé et développé dans plus de 240 fermes et sera bientôt offert aux éleveurs.
D’ici là, plusieurs producteurs prennent les moyens de maximiser le bien-être de leurs bêtes. « En ce qui me concerne, une vache qui ne semble pas bien, ça m’agace. Je demande beaucoup à mes animaux et je dois faire le nécessaire pour leur rendre la pareille, c’est-à-dire, leur procurer du confort. Étant donné que notre troupeau ne possède pas une génétique exceptionnelle, je suis assez fier de mes résultats avec un intervalle de vêlage de 390 jours et une production annuelle de 10 200 kg; lesquels, il faut le reconnaître, sont tributaires du bien-être des vaches. Le bien-être animal, j’y crois », conclut Sylvain Fraser. Le spécialiste Steve Adam tient un discours similaire. « La meilleure génétique et la meilleure alimentation frappent un mur : celui du bien-être animal. En ce sens que même la ration la mieux équilibrée ne sera pas absorbée adéquatement par une vache si elle est stressée, en position inconfortable ou en compétition avec ses consœurs. Accroître le bien-être animal, c’est excellent pour les vaches et très rentable pour l’éleveur. »
Bien-être des vaches : cinq conseils d’un ingénieur
Yves Choinière et son équipe conçoivent les plans de plusieurs nouvelles fermes laitières. Très au fait du bien-être animal, il souligne les cinq façons de faire générant le plus d’impact sur le confort des bêtes.
1- Pour les troupeaux comprenant des vaches de 650 kilos et plus, il est conseillé d’ajuster les allées de traverses ainsi que les logettes aux dimensions des vaches. Aussi, s’assurer que le positionnement des barres dans les stalles leur permet des mouvements naturels sans contraintes.
2- Installer un tapis de caoutchouc dans chaque logette. Idem pour les zones de déplacements : cela diminue les blessures, l’arthrite, etc. L’investissement est notable, mais le bien-être des vaches s’en trouve amélioré et certaines d’entre elles vont peut-être donner une ou deux lactations supplémentaires par jour.
3- S’assurer de l’abondance de litière. Si de la paille ou de la ripe est utilisée, une épaisseur d’un pouce contribue à éliminer l’abrasion sur les pattes. Le sable s’avère également une litière très efficace.
4- En stabulation libre, aménager des zones de vêlage indépendantes, de même qu’une aire de traitement. Autrement, placer des vaches mal en point avec leurs congénères peut augmenter leur stress et les risques de blessures.
Installer une brosse rotative : les vaches se nettoient et se détendent.