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En pleine conception du nouveau Code de pratiques pour le soin et la manipulation des veaux lourds, le Conseil national pour les soins aux animaux d’élevage (CNSAE) doit conjuguer avec les agendas divergents des producteurs et des groupes de défense des animaux.
Le comité d’élaboration du Code travaille à sa révision depuis 2014. De décembre 2016 à février 2017, les gens ont pu consulter une version préliminaire et émettre leurs réactions. Aux termes de la période de consultation, le Conseil a récolté quelque 11 000 commentaires provenant de 1 000 répondants. Près de la moitié émane de groupes de défense des animaux, indique Jackie Wepruk, directrice générale du CNSAE. De plus, environ 50 % de tous les commentaires sont issus de la Colombie-Britannique. Étrangement, cette province ne recense aucun élevage de veaux.
Dans le cas de la version préliminaire du Code, la Société pour la prévention de la cruauté envers les animaux (SPCA) de Montréal s’est alliée à l’organisme Mercy for Animals pour mobiliser les gens à l’aide d’une pétition pour dire « au CNSAE que de forcer les bébés animaux à endurer un traitement normalement réservé aux criminels les plus endurcis est tout simplement inacceptable ». Selon Me Sophie Gaillard, avocate au Département de défense des animaux de la SPCA de Montréal, « le nouveau code continue à permettre des pratiques qui sont intrinsèquement cruelles ». L’organisme encourage les gens à réduire leur consommation de veau, voire à éliminer carrément ce produit de leur alimentation.
Sur la page de la pétition, Mercy for Animals présente une vidéo de veaux maltraités, filmée par caméra cachée dans une ferme de Pont-Rouge en 2014. Cette histoire avait fait grand bruit à l’époque. L’ex-employé de la ferme a été reconnu coupable d’abus et de mauvais traitements envers des animaux.
Le phénomène de cette mobilisation virtuelle n’est pas nouveau. En avril, La Presse a révélé qu’une consultation de Santé Canada sur les produits naturels avait été noyautée par des groupes de pression à l’aide d’une pétition et d’un modèle de réponses à « copier-coller » au questionnaire de consultation. « L’influence de cette campagne sur l’ensemble des résultats de la consultation ne peut être écartée », indique le rapport de la firme Intersol, qui dresse le bilan de l’exercice.
« Les groupes de défense du bien-être et des droits des animaux ont toujours participé aux consultations publiques depuis leur mise en place en 2008, avec le Code de pratiques pour le soin et la manipulation des bovins laitiers, explique la directrice générale du CNSAE. Certains codes ont toutefois reçu plus d’attention que d’autres. » Le champion toutes catégories demeure le Code de pratiques pour le soin et la manipulation des porcs en 2013, qui a généré plus de 30 000 commentaires provenant de près de 5 000 participants. De son côté, le Code de pratiques pour le soin et la manipulation des poules pondeuses a suscité près de 21 000 remarques en 2016.
Jackie Wepruk insiste sur l’importance de distinguer les groupes dédiés au bien-être des animaux de ceux voués à la défense de leurs droits. Pour sa part, le Conseil travaille avec les organismes de bien-être animal. D’ailleurs, la Fédération des sociétés canadiennes d’assistance aux animaux siège aux comités d’élaboration des codes. Ceux-ci regroupent aussi des représentants des gouvernements, des éleveurs, des vétérinaires, des scientifiques, des transporteurs et d’autres gens de l’industrie.
Les producteurs inquiets Les tentatives de noyautage des consultations publiques concernant les règles de bien-être animal par des groupes de défense des droits des animaux soulèvent l’inquiétude des éleveurs. « Ce qu’on souhaite, c’est travailler avec la science, avec des éléments vérifiables. C’est complexe le bien-être des animaux. Il ne faut pas faire d’anthropomorphisme et se mettre à la place de l’animal », prévient le président de la Fédération des producteurs d’œufs du Québec, Paulin Bouchard. Dans le cas du Code de pratiques pour le soin et la manipulation des poules pondeuses, la stratégie des groupes de pression ne semble pas avoir fonctionné. « Les éléments qui ont été ajoutés au Code sont ceux qui ont été conclus par un comité d’experts, dont des vétérinaires, des chercheurs et des agriculteurs. Ils ont fait un bon travail, souligne le dirigeant. Comme producteurs, ça fait partie de nos premières responsabilités de faire ce qui est le mieux pour nos animaux, d’apprendre des choses concernant leur comportement naturel et d’intégrer ça à nos bonnes pratiques », rappelle M. Bouchard. Le 1er vice-président des Producteurs de bovins du Québec, Kirk Jackson, abonde dans le même sens. « Tout le monde veut faire le mieux possible pour le bien-être des animaux. On espère toujours que les décisions seront basées sur la science et non sur l’émotivité », affirme le producteur. Il rappelle les réelles intentions des groupes de défense des droits des animaux, qui s’opposent à toute forme d’élevage. « Peu importe la façon dont ils présentent les choses, leur but est que le monde entier devienne végétarien », conclut M. Jackson. |