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SAINT-TITE – Maxime Tessier a mal aux mains. Après 20 ans en production cunicole, l’un des plus importants producteurs de lapins de la province doit se résoudre à vendre sa ferme. En seulement cinq jours, celle qu’il qualifie de « perle rare », Jasmine Vigeant, répond à son annonce du mois de janvier. Ce qui s’enligne au départ pour être une belle histoire de transfert de ferme est aujourd’hui assombri par des difficultés de financement.
La décision de vendre
En mars 2023, Maxime Tessier perd son employé principal, ce qui l’oblige à se remettre les deux mains – au sens propre comme au sens figuré – dans le quotidien de la production. La ferme Laprodéo produit 800 lapins par semaine. La condition physique de l’agriculteur l’empêche de poursuivre la mise en œuvre de ses plans de développement établis sur 15 ans.
L’homme venait d’investir une importante somme d’argent pour se faire une nouvelle image de marque avec Lapin de Saint-Tite. Il comptait développer un site Web transactionnel et développer des produits transformés avec des chefs pour, notamment, les commercialiser en épicerie.
Il met sa ferme en vente en janvier 2024.
Les aspirations d’une relève
Après un quatrième congé de maternité, Jasmine Vigeant souhaite revenir sur le marché du travail. Cette dernière travaille dans des fermes depuis l’âge de 14 ans et son expérience l’a amenée à gérer des troupeaux de vaches et de brebis laitières. Autodidacte, elle se dit que l’élevage cunicole serait tout approprié pour démarrer sa propre ferme avec une jeune famille. D’autant plus que la pandémie a brisé le rêve de son conjoint, un combattant d’arts martiaux mixtes (MMA), et qu’il est prêt à embarquer dans l’aventure.
Les dernières années ont toutefois été financièrement éprouvantes pour le couple, qui aura besoin d’aller chercher toute l’aide de financement offerte pour s’engager dans une acquisition. Une recherche des fermes à vendre sur le site Web Lapin du Québec fait découvrir à Jasmine l’annonce de Maxime Tessier. Elle saute sur l’occasion et va visiter la ferme.
Le profil de la jeune femme de 29 ans plaît immédiatement au producteur et il accepte sa proposition de travailler dans la ferme en attendant de se faire octroyer le financement. Le hic, c’est que celui-ci s’avère beaucoup plus difficile à obtenir qu’ils ne l’auraient imaginé.
Financement ardu
Jasmine cogne d’abord à la porte du Fonds d’investissement pour la relève agricole, mais se fait expliquer que ses années d’expérience ne sont pas reconnues étant donné qu’elle n’a jamais détenu de parts dans les entreprises agricoles pour lesquelles elle a travaillé.
Elle se tourne donc vers La Financière agricole du Québec, afin d’obtenir un prêt de garantie. Maxime Tessier croit tellement en ce jeune couple qu’il leur fait don d’une partie de la mise de fonds. L’organisme Evol (anciennement connu sous le nom de Femmessor) offrira la différence lorsque Jasmine obtiendra l’aval de la Financière. À sa grande déception, la jeune femme essuie un refus de la part de l’organisme gouvernemental pour diverses raisons, notamment le fait qu’elle n’a pas de diplôme et que sa jeune famille n’habite pas sur le site.
« On a le gros support de tout le monde, sauf de La Financière agricole », mentionne Jasmine. Il faut que la Financière prenne des risques, renchérit Maxime Tessier. « Elle est où, l’instance qui aide ceux qui ont moins de mise de fonds, mais qui ont le cœur gros comme ça ne se peut pas et le mental pour le faire? Jasmine a des lettres de référence hallucinantes, alors il faut que La Financière agricole commence à voir ça autrement si on veut une agriculture durable, diversifiée par la production, mais aussi par ses gens. »
La Financière n’a pas souhaité commenter ce cas particulier.
À la suite d’une rencontre entre le prêteur et les parties impliquées dans la transaction, le 31 mai à Trois-Rivières, la jeune femme s’accroche à un espoir de voir son dossier analysé de nouveau.
Malgré tout, Maxime Tessier est persuadé d’avoir trouvé la perle rare. « Jasmine est une éleveuse dans l’âme. Ça, tu l’as ou tu ne l’as pas dans la vie. La plupart du monde n’a pas ça. C’est de se rendre compte de tout, tout le temps, de comprendre vite, d’avoir des solutions et d’être gestionnaire d’entreprise aussi. [Son conjoint et elle] ont tout pour réussir. J’ai totalement confiance que ça va marcher, leur affaire », affirme-t-il.