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Le 4 juillet, Francis Allard a eu la surprise de recevoir une lettre d’avocat lui signifiant que des équipements agricoles qu’il avait achetés à l’encan étaient hypothéqués par un autre créancier. « En réalité, ça veut dire que j’ai acheté une machine, je l’ai payée, et elle n’est pas à moi », raconte M. Allard.
La lettre d’avocat, que La Terre a consultée, indique que les équipements ont beau avoir été achetés à la Ferme Kérina, une hypothèque mobilière a été publiée au Registre des droits personnels et réels mobiliers en faveur de la Ferme Chamvert, représentée par le cabinet d’avocats. « De ce fait, nous avons fait suivre l’hypothèque à votre nom », poursuit la lettre adressée à M. Allard. Ce dernier dit avoir acheté une voiture à foin et un semoir que la Ferme Kérina a mis en vente par le biais des Encans Boulet.
Francis Allard n’a jamais imaginé qu’un produit acheté à l’encan puisse encore être sous l’emprise d’une hypothèque mobilière. « Je ne suis tellement pas habitué de me faire faire ça, surtout en passant par un encan. Je pense que même l’encanteur n’était pas au courant qu’il y avait une autre hypothèque », souligne M. Allard. Ce dernier fait pourtant fréquemment le commerce d’équipement, étant copropriétaire d’Équipement agricole Québec, à Sainte-Perpétue, dans le Centre-du-Québec.
La Terre a contacté Les Encans Boulet, qui n’ont pas voulu commenter la situation. Il a par ailleurs été impossible de joindre le cabinet d’avocats Cliche Laflamme Loubier, qui représente la Ferme Chamvert.
Pour éviter les mauvaises surprises
L’un des meilleurs moyens de vérifier si un bien est sous l’emprise d’une dette consiste à consulter le Registre des droits personnels et réels mobiliers du Québec (RDPRM). Il en coûte 4 $ pour rechercher un véhicule ou un équipement à l’aide de son numéro de série et 12 $ pour vérifier si l’ensemble des biens appartenant à une compagnie est attaché à un créancier.
La Terre a fait l’exercice en payant 12 $ pour vérifier le dossier de la Ferme Kérina. L’information est publique et on y apprend que plusieurs biens de la ferme sont associés à deux hypothèques. Premièrement, la Ferme Chamvert a inscrit, le 18 juillet 2019, une hypothèque conventionnelle sans dépossession sur le quota de production de lait de 42,6 kg/jour, sur l’ensemble du troupeau laitier et sur plusieurs équipements reliés à l’exploitation de l’entreprise qui a fait l’objet de la vente entre la Ferme Chamvert et la Ferme Kérina.
Deuxièmement, la Banque Nationale du Canada a inscrit, le 18 juin 2021, une autre hypothèque conventionnelle sans dépossession. Celle-ci couvre « tous les biens meubles [de la Ferme Kérina], corporels et incorporels, présents et futurs, où qu’ils se trouvent, en plus du produit de toute vente, location ou autre disposition de ces biens », peut-on lire.
D’autres inscriptions sont recensées pour la Ferme Kérina dans le RDPRM, comme une réserve de propriété associée à un tracteur Maxxum de 125 chevaux dont le créancier est CNH Industriel Capital Canada. « Cette inscription indique donc que le bien n’est pas encore entièrement payé. Si vous achetez ce bien et que la personne qui l’a acheté avant vous cesse de faire ses versements, le vendeur pourrait reprendre le bien ou demander que vous remboursiez la dette », indique le site Internet du registre.
Une agente du RDPRM a expliqué à La Terre qu’il vaut toujours mieux effectuer deux recherches sur le site du registre avant d’acquérir un véhicule ou un équipement. Une première avec le numéro de série et une deuxième sur l’entreprise ou la personne qui vend le véhicule ou l’équipement. Car parfois, une recherche avec seulement un numéro de série n’indiquera pas que la personne ou l’entreprise qui vend l’équipement a hypothéqué l’ensemble de ses équipements.
La suite?
Francis Allard ne connaît pas encore la suite de l’histoire, car la lettre d’avocat qu’il a reçu mentionne que le fait que ses équipements sont hypothéqués ne signifie pas qu’il doit de l’argent à la Ferme Chamvert. Par contre, si la Ferme Kérina n’acquitte pas les sommes qui sont dues à cette dernière, elle pourra exercer son droit hypothécaire sur les biens acquis par M. Allard.