Économie 10 novembre 2022

Des éleveurs s’estiment facturés injustement

Trente-neuf producteurs ovins se sont vu facturer des montants de 178 $ à 1 190 $ de plus que les autres membres des Éleveurs d’ovins du Québec (LÉOQ) en raison d’une erreur liée à l’administration du Programme de paiements anticipés (PPA).

Édith Lavoie
Édith Lavoie

De 2017 à 2020, le Programme de paiements anticipés de LÉOQ a été administré par les Producteurs de bovins du Québec (PBQ). Ce programme fédéral permet aux producteurs d’avoir accès plus facilement à des avances de fonds à faible taux d’intérêt. Selon une lettre envoyée aux éleveurs et dont La Terre a obtenu copie, les revenus d’inscription de la production ovine au PPA, de près de 12 500 $, n’ont pas permis de couvrir les frais administratifs encourus, d’environ 59 000 $.

Pour rembourser la différence de 46 559 $ (plus taxes) aux PBQ, le conseil d’administration de LÉOQ a décidé de partager les frais supplémentaires selon une formule 50/50. « Ainsi, les 39 utilisateurs du programme devront assumer 50 % des frais supplémentaires selon le montant de leur avance sans intérêt. Les producteurs qui n’utilisent pas le service assumeront l’autre 50 % par le biais de LÉOQ », lit-on dans la lettre. 

Édith Lavoie compte parmi les 39 producteurs concernés. La copropriétaire de la Ferme Feber, à Saint-Hubert-de-Rivière-du-Loup, dans le Bas-Saint-Laurent, dénonce une injustice. « LÉOQ a changé de directeur général trois fois et entre-temps, les PBQ avaient envoyé une facture de frais d’administration à LÉOQ. À l’AGA l’année passée, ils nous ont dit que c’était tombé entre deux chaises. La facture est restée impayée. Les intérêts se sont accumulés et on est rendus à se partager des frais de 200 à 1 500 $ pour 40 producteurs, dit-elle. Ils admettent leur faute, payent la moitié, mais poussent la différence aux producteurs qui ont eu un PPA, mais ce n’est pas normal parce qu’au départ, le PPA était offert à tous les producteurs. Personne ne trouve ça correct. » Au moment de l’entrevue, la productrice rédigeait une résolution qu’elle comptait déposer en vue de l’assemblée générale annuelle (AGA) des Éleveurs d’ovins du Québec, qui aura lieu le 25 novembre prochain.

Le directeur général de LÉOQ, Jean-Philippe Deschênes-Gilbert, reconnaît qu’il y a eu plusieurs changements à la direction générale ces dernières années et que, bien que plus de la moitié des 39 producteurs ont acquitté leur facture de frais supplémentaire, il dit être ouvert à trouver des solutions avec les producteurs insatisfaits.

Cependant, il explique que les règles du PPA, fixées par le gouvernement fédéral, obligeaient l’administrateur à charger les mêmes frais aux deux organisations. Les PBQ sont parvenus à éponger leurs charges administratives grâce aux nombreuses avances de fonds du PPA de 100 000 $ ou plus contractées par ses producteurs. Or, chez les éleveurs d’ovins, peu de prêts de 100 000 $ ou plus ont été réclamés, ce qui a laissé un important montant aux frais de l’organisation.

« On est un secteur qui ne fait pas ses frais, contrairement aux bovins, et on a partagé la facture en deux en se demandant si c’était à l’ensemble des producteurs de payer. Aux bovins, [ce sont les utilisateurs du PPA qui payaient], alors on s’est dit qu’on allait couper la poire en deux et assumer la moitié parce qu’il y avait eu des changements à la direction générale et on aurait peut-être mieux fait en termes d’information aux producteurs s’il n’y avait pas eu ces changements-là. Et pour le reste, on facture aux utilisateurs parce que ce n’est quand même pas à l’ensemble des producteurs de payer pour les 39 utilisateurs », dit-il.

Des changements depuis 2020

La situation est complexe, mentionne Jean-Philippe Deschênes-Gilbert, en précisant que les PPA des bovins et des ovins sont toujours offerts, mais ne sont plus administrés par les PBQ depuis 2020. Ceuxi-ci disaient à l’époque vouloir mettre fin au risque financier à soutenir pour offrir le programme à leurs membres. Le programme des deux organisations est maintenant géré par la société ontarienne Agricultural Credit Corporation.