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Après la montée vertigineuse du prix des grains, les dernières semaines ont laissé place à une baisse continue des prix.
« On a perdu 20 à 30 % de la valeur des grains depuis juin. Je ne pense cependant pas à une baisse d’un autre 25 %. C’est toujours possible, mais peu plausible. […] Présentement, je suis de neutre à légèrement baissier », indique Simon Brière, stratège principal pour la firme R.J. O’Brien, à Montréal. Il souligne l’importance de la gestion du risque, surtout lors d’une année folle comme 2022.
« La prochaine récolte aura coûté une fortune à produire en fertilisants, en carburant, et avec la hausse des taux. Quand le maïs était à 400 $/t, tout le monde faisait de l’argent. Les producteurs [qui n’ont pas vendu d’avance une portion de leurs grains à ces prix-là] ont laissé beaucoup d’argent sur la table. Cela pourrait leur occasionner énormément de stress et de mauvaises surprises à l’automne », anticipe-t-il. L’inverse est aussi vrai. Ceux qui ont profité de la manne pourraient bien s’en tirer.
Chose certaine, cette baisse de prix crée un doute et préoccupe beaucoup de producteurs, confirme Ramzy Yelda, analyste principal des marchés pour les Producteurs de grains du Québec. « J’ai eu plusieurs appels de producteurs. Ce fut un choc pour certains de voir le prix du maïs passer de 440 $/t à 294 $/t [pour la récolte 2022]. Surtout, c’est la rapidité de la baisse », souligne-t-il, ajoutant que les fonds de placement, en vendant des positions, ont contribué à accélérer le rythme baissier.
La décroissance des prix s’explique principalement par les exportations russes, juge M. Yelda. « D’abord, la récolte record de maïs en Amérique du Sud, en juin, a commencé à calmer les choses, mais le plus gros facteur baissier, c’est la Russie. On croyait qu’avec les sanctions, les opérations des Russes seraient ralenties. En vérité, ils ont continué à exporter à pleine vitesse, vers les pays du tiers monde. Même si la prime d’assurance de leurs navires a beaucoup augmenté, ils se sont ajustés en réduisant le prix de leurs grains », explique-t-il.
La Russie et l’Ukraine de côté
Simon Brière indique que les superficies en culture des Américains se confirment avec 90 millions d’acres de maïs et pratiquement la même chose pour le soya. Les conditions de cultures sont bonnes pour l’instant. Bref, la traditionnelle baisse de prix du maïs qui a lieu lors de la récolte pourrait également se concrétiser cette année, prévoit-il. Le spectre d’un ralentissement économique n’améliorera pas la situation. M. Brière signale un mouvement baissier de prix dans d’autres matières premières comme le pétrole, le cuivre et le coton. Concernant le conflit en Ukraine, il conseille de ne pas y relier ses décisions de commercialisation des grains. « Il ne faut absolument pas rentrer dans le cirque infernal des nouvelles [de la guerre]. Des choses annoncées le lundi ne sont plus vraies le mardi. Tout ce se passe en Russie et en Ukraine, je mets ça de côté. »
De son côté, Ramzy Yelda ne peut se prononcer sur la direction des prix du maïs, du soya et du blé. Les rendements pourraient être très élevés aux États-Unis, comme au Québec. La volonté de la Russie de laisser l’Ukraine sortir ses grains devrait également avoir l’effet d’ajouter quelques millions de tonnes sur les marchés. « Rien pour aider », souligne l’analyste.
Certains pays qui ont ralenti leurs importations, comme la Chine, pourraient cependant « se remettre à table, ce qui pourrait entraîner un rebond », affirme M. Yelda. « C’est un marché de guerre. Je crois qu’on aura encore beaucoup de surprises. Il faut des nerfs très solides », conclut-il.