Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
Christian Taillon, de Saint-Prime au Lac-Saint-Jean, est un producteur de grandes cultures et de lait bio qui ne craint pas les défis. Avec les trois autres actionnaires de la Ferme Taillon et Fils inc., il s’est lancé dans la culture de graines de chanvre bio alors qu’il ne s’en faisait à peu près pas au Québec.
« Comme la culture des grains conventionnels est difficile dans notre région à cause de notre climat nordique, nous sommes toujours à l’affût de nouvelles productions rentables. À la suggestion des Aliments Trigone, nous avons semé cinq hectares de chanvre en 2004 et obtenu 1 600 $ la tonne pour nos graines et un rendement d’environ une tonne par hectare. Malgré quelques difficultés à récolter, on a aimé l’expérience. Mais en 2006, nous avons connu notre meilleure année à vie. Ça nous a motivés au boutte », raconte-t-il.
Évidemment, la culture du chanvre pour la graine demande des soins particuliers. « Quand on maîtrise bien sa production, le chanvre, c’est très rentable », poursuit-il. C’est ce qui fait que de 2004 à 2016, une trentaine de producteurs de sa région se sont lancés dans l’aventure avec le soutien du Groupe multiconseil agricole et du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ). Il faut dire que les prix ont fracassé des records, surtout en 2015 et 2016 alors qu’ils ont grimpé jusqu’à 4 000 $ la tonne, rapporte Christian Taillon.
Selon lui, ces bons prix ont entraîné une augmentation de la production québécoise et des provinces de l’Ouest. Mais les importations en provenance de la Chine ont fait baisser les prix.
L’offre grandissante a également eu pour effet d’accroître les exigences des acheteurs. Ces derniers veulent maintenant des graines 99,9 % pures, sans traces de mauvaises herbes, avec un taux d’humidité de 8 % et un comptage bactérien très bas. Ils n’acceptent qu’un minimum de graines jaunes ou brunes. Selon M. Taillon, on doit récolter quand les plants femelles atteignent 70 ou 75 % de leur maturité pour éviter les grains jaunes. Ces critères l’obligent également à être très minutieux lors des étapes du criblage et du séchage pour éviter les grains bruns.
Les petits producteurs ont eu du mal à répondre aux nouvelles normes et plusieurs se sont retirés de la production. « Quand tu classes pas, tu ne vends pas. Il n’y a pas de second marché pour les graines de moins bonne qualité », déplore Christian Taillon.
Les graines de chanvre, pourtant riches en protéines et en acides gras, ne sont pas encore autorisées en alimentation animale – sauf pour les animaux de compagnie –, ce qui aurait permis un plan B pour réduire les risques. Vendre la fibre n’est pas toujours payant.
Selon Christian Taillon, il reste moins de 10 producteurs de chanvre actifs au Saguenay–Lac-Saint-Jean. Le traitement des graines de la récolte à la livraison aux clients est devenu une étape critique.
Ces irréductibles producteurs n’ont pas baissé les bras. Ils sont en train de s’organiser pour faire face aux exigences de la production et des acheteurs. Ils sont à l’origine de la création d’un comité également composé du Groupe multiconseil agricole, du MAPAQ et de l’UPA. Même les MRC se sont impliquées.
« On s’est donné quatre objectifs : stabiliser la qualité des grains, optimiser les rendements, mettre en œuvre un plan d’action à la suite d’une recherche menée par AGECO et adapter les infrastructures de conditionnement des graines. Les Producteurs de grains du Québec ont également soutenu l’initiative en accordant une aide de 10 000 $ tout récemment », explique Christian Taillon.
Une coopérative d’utilisation de la machinerie agricole (CUMA) avec un budget de 150 000 $ a également été formée pour gérer les traitements et l’entreposage afin d’être en mesure de répondre rapidement aux différents volumes de commandes des acheteurs.
« On se prend en main; l’avenir du chanvre est assuré au Saguenay–Lac-Saint-Jean », conclut le producteur.
Cet article est paru dans l’édition d’octobre du magazine GRAINS.