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L’agriculteur Réjean Côté allume son four à pizza à sa ferme le samedi, et les clients le savent; certains font 40 minutes de route pour venir sur place la goûter et acheter les légumes bio de la ferme Potager merci la terre, située à Métabetchouan–Lac-à-la-Croix, au Saguenay–Lac-Saint-Jean.
Si plusieurs petits producteurs de légumes biologiques enregistrent présentement une baisse des ventes, Réjean Côté assure que sa ferme, qui est maintenant entre les mains de sa fille, connaît plutôt une hausse du chiffre d’affaires. Les événements organisés sur place ne sont pas étrangers à ce succès, estime-t-il. « Mes enfants voulaient qu’on installe une plate-forme de yoga. Je ne voyais pas tant le lien avec la ferme, mais ils ont eu du flair, car chaque samedi, on reçoit 25 à 35 adeptes de yoga. Là-dessus, il y a des gens habitués, d’autres qui sont en vacances et passent à la ferme. […] C’est une activité qui s’autogère; les gens sont invités à laisser une contribution volontaire au professeur. Ça marche super bien », explique le maraîcher.
L’autre attrait du samedi est sans contredit la formule de concerts. « On a différents artistes qui viennent. Dernièrement, on avait un événement spécial, une chorale de voix masculines de chants marins. C’est hot », commente M. Côté.
Tendance
La tendance est à la création d’événements éphémères et ponctuels, explique Benedicte Armstrong, conseillère en communication à la Table agroalimentaire du Saguenay–Lac-Saint-Jean. « Les fours à pizza [à la ferme] sont très populaires. Ça permet d’aller chercher les excursionnistes, les gens qui se cherchent quelque chose à faire en famille ou entre amis. Les touristes aussi. C’est une façon d’offrir une belle proximité entre le public qui découvre les produits et les humains derrière la ferme », dit-elle.
Consciente que plusieurs entreprises agricoles manquent d’employés, elle remarque qu’une formule gagnante consiste à aménager un kiosque libre-service pendant la semaine, qui économise les ressources humaines, pour ensuite créer un événement rassembleur, pendant quelques heures, la fin de semaine. « Il y a des choses qui ne coûtent rien ou très peu à organiser, mais qui amènent une expérience au consommateur. Il peut s’agir d’inviter d’autres producteurs. Ce n’est pas de la compétition, mais de la coopétition. Tout le monde y trouve son compte », observe-t-elle.
Des attentes à gérer
Benedicte Armstrong souligne que ce ne sont pas toutes les fermes qui veulent offrir des pizzas, installer une trampoline géante pour les enfants, construire des commodités pour les personnes à mobilité réduite, etc. « Et c’est normal! On travaille justement un volet de caractérisation des fermes afin de réguler les attentes du consommateur. Les fermes qui misent sur l’expérience agrotourisme et le tourisme gourmand seront identifiées comme telles. On indiquera aussi les fermes qui n’aspirent pas à l’agrotourisme, mais qui offrent une mise en marché directe; par exemple, les fermes où les gens peuvent aller simplement cueillir leurs fraises pour faire leurs réserves et profiter du paysage sans qu’elles aspirent à l’agrotourisme », indique Mme Armstrong.
Un modèle d’affaires changé par la relève
À ses débuts, la ferme maraîchère biologique Merci la terre offrait des abonnements de paniers de légumes, mais Marion Côté-Potvin, la fille du propriétaire de l’époque, Réjean Côté, a changé le modèle d’affaires pour le mieux, estime ce dernier. « En 2015, nous sommes montés à 110 [abonnements], mais on ne rentrait pas dans nos frais. On a eu une rencontre au sommet. J’ai dit aux enfants qu’il faudrait monter à 150 paniers pour être rentable. Ma fille a répondu que mon modèle ne lui convenait pas. Elle voulait en faire un marché fermier. Et elle a eu raison sur toute la ligne! J’aimais les paniers, car ça donnait du cash à l’avance, mais je vois qu’avec le marché fermier, on vit une belle croissance. Les gens achètent plus et ils reviennent », partage M. Côté.
La ferme que sa fille a baptisée Potager merci la terre vend des légumes au choix et offre aussi une formule de cartes prépayées allant de 200 $ à 600 $. Plus le client choisit un gros montant prépayé, plus il obtient un rabais intéressant. Les légumes du kiosque sont photographiés chaque semaine pour faire la promotion de la diversité et de leur fraîcheur sur les médias sociaux. « Chaque samedi matin, on annonce, à 9 h 45, les primeurs de la semaine au kiosque. On a 4 500 abonnés sur notre page Facebook. On voit que ça fonctionne. À 10 h, on a du monde qui attend en file au kiosque », signifie M. Côté.