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Prévenir plutôt que guérir. Les producteurs en serre du Québec sont de plus en plus nombreux à employer des solutions de rechange comme l’utilisation d’auxiliaires avant d’avoir recours à des pesticides conventionnels pour gérer les ennemis des cultures, constatent deux agronomes.
Dans la production en serre ornementale, au moins 90 % des producteurs appliqueraient la méthode de lutte intégrée contre les ravageurs et 80 % introduiraient des auxiliaires et acariens prédateurs, soutient Marie-Édith Tousignant, agronome et responsable de la veille phytosanitaire à l’Institut québécois du développement de l’horticulture ornementale, en se basant sur une compilation maison.
« L’utilisation des pesticides perd en popularité, remarque-t-elle. Leur application demande du temps, donc les autres méthodes deviennent plus attrayantes. » La résistance aux pesticides contribue aussi à cette tendance. « Dans les dernières années, on a connu quelques épisodes où la pharmacie habituelle ne fonctionnait plus contre le thrips et la mouche blanche. Les producteurs ont dû se tourner vers l’emploi de prédateurs ou d’acariens », indique l’agronome. Enfin, des préoccupations concernant la santé des travailleurs inciteraient les producteurs à n’utiliser la lutte chimique qu’en dernier recours.
Les producteurs maraîchers en serre ont adopté depuis longtemps cette approche, confirme Philippe-Antoine Taillon, conseiller expert en cultures légumières et fruitières en serre au ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ). « À ma connaissance, tous les producteurs maraîchers en serre appliquent au moins un des éléments de la lutte intégrée comme le dépistage et la plupart utilisent toutes les étapes de cette gestion. Dans les serres, on a les conditions parfaites pour établir ces pratiques, car on a un contrôle sur notre environnement qui nous permet de mettre des barrières physiques. On a aussi des conditions climatiques assez stables et on a des cycles de culture qui s’étirent sur presque toute l’année. »
Une boîte à outils qui s’agrandit
Cette tendance survient dans un contexte où la recherche a fait de grands progrès sur les ennemis des cultures. « On peut parler d’un domaine en pleine ébullition tant au niveau des connaissances que de l’apparition de nouveaux produits à faible toxicité comme des bio-insecticides, des biofongicides, mentionne Marie-Édith Tousignant. Alors qu’auparavant les savons insecticides ont été longtemps les seules alternatives, l’arrivée sur le marché il y a 15 ans des spores de champignons Beauveria bassiana compatibles avec d’autres outils a vraiment changé la donne. »
Certains changements réglementaires comme la permission de tremper des boutures dans des huiles minérales à la réception et la commercialisation de nouveaux auxiliaires dans différents formats (vrac, sachets, banderoles, etc.) ont permis aussi de garnir l’arsenal des serristes.
Au développement des connaissances et des outils s’ajoute le Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) du MAPAQ qui est un outil précieux pour les producteurs, rappelle Philippe-Antoine Taillon, qui pilote le réseau pour les légumes en serre. « Avec l’expérience, on sait à peu près à quelle période de l’année certains nuisibles font leur apparition, ce qui donne le temps aux producteurs d’agir en prévention, explique-t-il.
À travers cette veille, on accompagne aussi les agronomes dans leurs efforts pour identifier des ravageurs ou des maladies. »
Tout porte à croire que la lutte intégrée est là pour demeurer dans les serres du Québec, estime Marie-Édith Tousignant. « Les producteurs ont appris à agir de façon préventive plutôt que curative. Si certains sont encore réticents à changer d’approche, les jeunes générations n’ont pas besoin d’être convaincues des bienfaits de la lutte intégrée. »