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SAINT-LÉONARD-D’ASTON — Pour les actionnaires des Entreprises Leblanco, la décision de vendre de la viande à la ferme ne s’est pas prise sur un coup de tête. Au fil des ans, cette initiative a évolué pour répondre aux besoins particuliers des membres de cette famille agricole. Malgré quelques difficultés, ils sont très heureux aujourd’hui de leur choix puisque leurs produits sont appréciés et vendus à bon prix.
C’est en 2009 que les frères Leblanc, Jean-Philippe, Pierre-Luc et Gabriel, tous les trois agronomes, se sont joints à leur père Mario, qui a quitté la production laitière et vendu son quota pour passer à l’élevage de bœufs. « La ferme laitière familiale de cinquième génération ne pouvait pas assurer notre avenir. Nous avons donc décidé de garder notre emploi à l’extérieur et, pour conserver notre patrimoine, de nous associer dans cette nouvelle production », explique Jean-Philippe.
L’entreprise comptait 60 vaches et la majorité de la production allait à l’encan commercial, ce qui ne satisfaisait pas complètement les quatre actionnaires. « Nous vivions toutes les fluctuations du marché », se rappelle Jean-Philippe. À cette époque, le groupe commence à faire de la vente à la ferme et lorgne le biologique, mais sa réflexion l’amènera finalement ailleurs.
Bœuf à l’herbe
Pour vendre des produits à la ferme, il vaut mieux se démarquer. En 2014, les actionnaires se lancent donc dans l’élevage de bœuf à l’herbe. « Ça correspondait à notre ADN. Nous étions habitués comme anciens producteurs de lait à faire des fourrages de bonne qualité en trois ou quatre coupes par année sur nos 370 acres. »
Leurs taux de protéines ont alors été adaptés aux besoins des bovins de boucherie grâce à un bon équilibre entre légumineuses et graminées. « Si on donnait nos fourrages à une vache laitière, elle deviendrait grosse comme une baloune, affirme l’éleveur. De plus, nos animaux sont gardés dans l’étable en hiver, ce qui ne ralentit pas leur croissance. »
Pas question d’utiliser des hormones ni des antibiotiques à la ferme Leblanco, sauf pour soulager une vache ou un veau malade. Le bien-être animal est au cœur des préoccupations des éleveurs.
« Dès le départ, nous avions choisi des sujets Angus, mais avec l’expérience, on a fini par les croiser avec des Simmental pour ajouter du poids aux carcasses et avoir des femelles moins grasses », explique Jean-Philippe. Selon lui, ça donne une viande persillée et riche en oméga-3. Elle est vieillie au moins trois semaines pour la rendre vraiment tendre.
Un bon partenaire
Graduellement, les actionnaires des Entreprises Leblanco ont réduit les découpes pour vendre des demi-bœufs, se créer un logo et monter d’une coche, c’est-à-dire écouler leur viande à Montréal en s’associant à un distributeur. « Nous nous sommes promenés dans un vrai labyrinthe. Les marges étaient serrées, déplore Jean-Philippe. L’avantage, c’est que nous avons fait connaître notre entreprise et notre produit. »
C’est ainsi qu’il y a deux ans, Pascal Hudon, propriétaire de la boucherie Pascal le boucher, située sur la rue Saint-Denis à Montréal, a été particulièrement impressionné par la qualité du bœuf à l’herbe des Leblanc. M. Hudon tient un établissement qui fait la promotion de la consommation de viande « plus éthique et écoresponsable », et il retrouve dans les élevages de la ferme Leblanco les valeurs auxquelles il adhère.
Ce partenariat est à ce point avantageux pour les deux parties que le boucher achète presque toute la production des Leblanc, et à bon prix. « Je me fais un point d’honneur de ne pas négocier de prix avec nos agriculteurs. Je leur demande combien ils ont besoin pour vivre leur passion. C’est un système économique alternatif. Oui, ça coûte plus cher, mais pour moi, c’est ce que ça coûte, manger de la viande », a-t-il déclaré à La Terre.
Les éleveurs doivent tenir compte du fait qu’il faut près de 24 mois pour que leurs bœufs à l’herbe atteignent le poids de 1 250 à 1 300 livres. C’est six mois de plus que dans le conventionnel. Ça se reflète donc dans les prix.
« Alors que grosso modo le prix du bœuf commercial s’élève à 2,50 $ la livre carcasse, nous vendons le nôtre près du prix obtenu dans le bio », affirme Jean-Philippe Leblanc. Il insiste sur le fait qu’on parle ici d’un produit de créneau. Selon lui, les grands abattoirs ne sont pas intéressés au bœuf à l’herbe. « Ils nous donneraient le prix commercial », dit-il.
Devant cette possibilité de vendre toute leur production, les Leblanc ont décidé de réduire leur troupeau de 60 à 35 vaches et de garder seulement deux générations à la ferme pour un total de 110 têtes. « Le nombre de bovins peut paraître petit, mais on transforme maintenant 100 % de notre production », précise-t-il.
« Ce qui fait la force de notre entreprise, c’est notre relation très étroite avec Pascal Hudon. La journée où il n’a plus de clients, je suis mal pris, avoue Jean-Philippe. Notre bœuf, on ne le vendra pas moins cher. Et si on le vend moins cher, on n’en fera pas! »