Alimentation 24 août 2018

Fruits et légumes exotiques – Quand tout est à faire

La production et la mise en marché des fruits exotiques comportent des défis particuliers. Gérard Trudeau en sait quelque chose. « On a été les premiers à développer le marché des fines herbes dans les années 1980. C’est très long de faire entrer quelque chose dans les habitudes des gens, et on ne sait jamais à quel point les consommateurs vont y adhérer. Créer une tendance demande un effort énorme », soutient le propriétaire des Fermes Trudeau.

C’est parce que son entreprise est solidement établie qu’il peut maintenant faire face aux défis qu’implique la production de légumes asiatiques, croit M. Trudeau. « On est en compétition avec les gros marchés d’alimentation qui baissent constamment leurs prix. C’est très difficile de survivre. Et dès qu’un nouveau joueur se rajoute, il y a un excédent de production, car le marché se développe très lentement. »

Les principaux détaillants qui achètent les fruits et légumes exotiques produits localement sont Loblaws et IGA, où l’on trouve des sections qui leur sont réservées, ainsi que certains magasins spécialisés. Des restaurateurs s’y intéressent également.

Guy et Daniel Pouliot, de la Ferme Onésime Pouliot, travaillent depuis 15 ans sur la culture de la patate douce. Crédit photo : Gracieuseté de la Famille Pouliot
Guy et Daniel Pouliot, de la Ferme Onésime Pouliot, travaillent depuis 15 ans sur la culture de la patate douce. Crédit photo : Gracieuseté de la Famille Pouliot

Guy Pouliot, de la Ferme Onésime Pouliot, cultive 150 hectares de patates douces à l’Île-d’Orléans depuis 15 ans. « C’est une démarche d’essai-erreur. Puisqu’aucun agronome ne pouvait nous conseiller, il a fallu développer notre routine de culture par nous-mêmes, avec de meilleurs résultats d’année en année. » Cultivées sur paillis de plastique pour réchauffer le sol, les patates douces sont abritées par des polythènes tendus sur des arceaux de métal. Ces miniserres doivent être enlevées lors des canicules du milieu de l’été, puis réinstallées. « Trop chaud n’est pas mieux non plus. Il faut alors déplacer les 50 000 sacs de sable qui maintiennent les polythènes et les replacer quand le temps se rafraîchit », dit Guy Pouliot.

Pour alléger ce travail, Guy Pouliot fonde un espoir sur une nouvelle variété de patates douces adaptée à notre courte saison, qui sera disponible l’an prochain grâce au Vineland Research and Innovation Centre de l’Ontario. « On serait bien contents si on n’avait plus besoin de polythène pour les recouvrir au champ », lance-t-il.

Adopter des saveurs d’ailleurs

On s’entend pour qualifier d’exotiques les végétaux provenant de pays tropicaux. Toutefois, le critère de la nouveauté semble incontournable. Ainsi, la tomate ou la pomme de terre, des plantes originaires de l’Amérique du Sud, sont tellement ancrées dans nos mœurs qu’elles ne sont plus exotiques à nos yeux. Des produits exotiques aujourd’hui pourraient ainsi ne plus l’être du tout dans quelques années. 

Aux Serres Arundel, dans les Laurentides, la famille Provost mène une petite production de babaco, un fruit exotique de l’Équateur. C’est un chercheur qui leur avait laissé quelques plants de cet arbre aux allures de palmier. Grâce au système de chauffage aux résidus de bois qu’ils ont mis au point, ils réussissent à chauffer leurs serres toute l’année et à les faire fructifier. Le fruit jaune en forme de courge, dont le goût ressemble à celui de la poire, est servi dans quelques restaurants, tandis qu’Alice, une bière au babaco, vient d’être lancée par la microbrasserie La Veillée, à Sainte-Agathe-des-Monts. En 30 ans, les Provost ont créé un petit marché pour le babaco.

Des goûts exotiques en provenance du terroir québécois

Ferme Onésime Pouliot. Il y a 15 ans, les Pouliot ont démarré une production de patates douces à l’Île-d’Orléans, à cause du calendrier de production qui s’intégrait bien à celui des fraises.
Ferme Onésime Pouliot. Il y a 15 ans, les Pouliot ont démarré une production de patates douces à l’Île-d’Orléans, à cause du calendrier de production qui s’intégrait bien à celui des fraises.
Fermes Trudeau. Spécialisée en fines herbes depuis plus de 30 ans, cette ferme de la Montérégie produit aussi des légumes exotiques, tels le bok choy, la bette à carde, le chou kale et la citronnelle.
Fermes Trudeau. Spécialisée en fines herbes depuis plus de 30 ans, cette ferme de la Montérégie produit aussi des légumes exotiques, tels le bok choy, la bette à carde, le chou kale et la citronnelle.
Ferme Jean Forest et Fils. Des bok choy, des choux plats, des choux napa et courges kabocha sont produits en champs  à Saint-Jacques-de-Montcalm. Ces légumes asiatiques sont ensuite distribués par Organzo, aux États-Unis et même en Asie.
Ferme Jean Forest et Fils. Des bok choy, des choux plats, des choux napa et courges kabocha sont produits en champs à Saint-Jacques-de-Montcalm. Ces légumes asiatiques sont ensuite distribués par Organzo, aux États-Unis et même en Asie.
Les Serres Arundel. En plus des bananiers, ananas et autres plantes tropicales cultivées dans leurs serres des Laurentides, Roger Provost et Jacqueline Hardy mènent une petite production de babaco, un fruit provenant de l’Équateur.
Les Serres Arundel. En plus des bananiers, ananas et autres plantes tropicales cultivées dans leurs serres des Laurentides, Roger Provost et Jacqueline Hardy mènent une petite production de babaco, un fruit provenant de l’Équateur.
Jardins Ricard. À Louiseville, le Groupement volontaire pour le développement rural Nord-Sud cultive des légumes africains, dont l’aubergine, la feuille de la courge et de haricot, la morelle, l’oseille, le leome, et les piments forts.
Jardins Ricard. À Louiseville, le Groupement volontaire pour le développement rural Nord-Sud cultive des légumes africains, dont l’aubergine, la feuille de la courge et de haricot, la morelle, l’oseille, le leome, et les piments forts.
 Les Jardins d’Edem. Edem Amegbo, originaire du Togo, produit des okras, de la corète potagère et de l’amarante, en plus d’une trentaine de sortes de légumes dans ses jardins maraîchers biologiques, à East Farnham.
Les Jardins d’Edem. Edem Amegbo, originaire du Togo, produit des okras, de la corète potagère et de l’amarante, en plus d’une trentaine de sortes de légumes dans ses jardins maraîchers biologiques, à East Farnham.