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Une étude menée auprès de producteurs de fraises et de framboises qui embauchent des travailleurs étrangers montre qu’il est possible de faire baisser de moitié le coût de main-d’œuvre pour chaque boîte de fruits récoltés en modifiant le mode de rémunération.
Une simulation basée sur l’entreprise type de 500 000 $ de revenus bruts et 27 500 $ de bénéfices (Forest Lavoie Conseils, 2017) montre qu’une augmentation de 10 % de l’efficacité de la main-d’œuvre permet d’atteindre un bénéfice pratiquement équivalent à celui obtenu en doublant la superficie cultivée (53 500 $ vs 55 000 $ de bénéfices). Une vitesse de travail en hausse de 3,5 % représente 16 % de profits en plus.
Comme les salaires constituent 54 % des dépenses dans ces productions, ces constats ont stimulé la curiosité des agriculteurs réunis pour la Journée provinciale annuelle de l’Association des producteurs de fraises et framboises du Québec. Ces questions sont d’autant plus importantes que l’instauration d’un salaire minimum à 15 $/h entraînerait des pertes annuelles de 37 500 $ pour la ferme type citée plus haut.
Jasmine Sauvé, agronome formée à l’Université Laval, a mené une enquête en 2017 en réalisant 10 entrevues auprès de fermes du secteur qui comptaient en moyenne 86 travailleurs étrangers temporaires. Une comparaison a été effectuée entre la simple paie à l’heure, le bonus au rendement et les tirages afin d’en constater les avantages et les inconvénients. La Ferme Horticole Gagnon a ensuite testé une nouvelle méthode qui tient compte des lacunes identifiées.
Bonus
En donnant un bonus de 0,50 $ par boîte récoltée au-delà du seuil de 2,5 boîtes à l’heure, les agriculteurs peuvent motiver certains travailleurs à produire 5,5 boîtes à l’heure. La rémunération reçue par boîte passe alors de 4,80 $ à 2,45 $ en tenant compte d’un salaire de base de 12 $/h, ce qui décourage les bons cueilleurs. De plus, selon cette méthode, la qualité décroît, et ce système ne convient pas à toutes les tâches dans la saison. Le rendement est néanmoins au rendez-vous et le sentiment d’injustice entre les cueilleurs diminue.
Tirages
L’instauration de tirages en fonction de critères définis de qualité et de rendement est une autre approche testée par des fermes participantes. Ce système est moins coûteux et demande peu de gestion. Les meilleurs reçoivent plus de coupons pour le tirage. Selon l’étude de Jasmine Sauvé, l’effet des tirages est éphémère et les gains sont parfois peu liés à l’effort.
Approches étrangères
Des producteurs de la Californie varient le mode de rémunération en saison en payant parfois à l’heure ou à l’heure avec bonus (5,75 $ US/h + 1,5 $ par boîte de 4,1 kg) ou carrément au rendement avec un montant par boîte seulement. La paie au rendement augmente la motivation. Plusieurs entreprises de cet État versent en plus un bonus pour la rétention des employés. En Hollande, les producteurs valorisent le rendement lorsqu’il y a plus de kilogrammes à l’heure et tiennent compte de la vitesse de cueillette associée à chaque variété.
Nouvelle méthode prometteuse Dans un scénario réaliste, soit une augmentation de 3,5 % du rendement, l’étude montre un gain de 4 400 $ en une saison. Avec cette méthode, le gain est partagé à 50 % avec le travailleur pour payer le bonus. « Les employés cherchent eux-mêmes des solutions pour aller plus vite », lance David Lemire, propriétaire de la Ferme Horticole Gagnon, qui va continuer selon cette façon de faire en 2018 en effectuant des ajustements. Le bonus sera affiché « en temps réel » pour conserver la motivation au long de la saison. Il envisage aussi un bonus par équipe, demandé par les employés, qui permet que chacun soit utilisé d’après ses forces. Le pourcentage accordé à chaque critère pourra changer dans le temps selon les priorités de la ferme. « Plusieurs producteurs vont l’essayer cette année », affirme David Lemire, qui va effectuer un suivi de l’étude de 2017. |