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Christian Doyon a bien compris le principe de « penser hors de la boîte ». Celui qui possède 25 000 plants d’aronias dans la région de la Capitale-Nationale s’apprête à faire l’acquisition d’une récolteuse lui permettant de cueillir suffisamment de petits fruits pour répondre aux besoins en approvisionnement de compagnies pharmaceutiques.
« Pour que le marché de l’aronia s’ouvre au Québec, il faut en cultiver en grande quantité et être patient », témoigne celui qui a planté ses premiers semis à Saint-Casimir en 2011. Près de 10 ans plus tard, il est le plus gros producteur de cette baie au Québec et affirme que deux clients potentiels veulent s’approvisionner chez lui pour la fabrication de crème à main et de produits nutraceutiques à base d’aronias.
« La majeure partie des gens n’aiment pas le goût du fruit à la cueillette, explique M. Doyon. C’est pourquoi il faut l’utiliser pour faire des produits transformés. »
Le producteur trouve la baie intéressante parce qu’elle est riche en antioxydants, mais aussi parce qu’elle présente des propriétés qui la rendent « très bonne pour la peau ».
« C’est ce filon que j’ai eu envie d’exploiter. Mais je ne pourrais pas envisager de fournir les compagnies pharmaceutiques si je n’avais que 1 000 ou 2 000 plants, comme la plupart des producteurs d’aronias au Québec. »
Avec la récolteuse qu’il a fait fabriquer sur mesure à Sainte-Anne-de-Beaupré et dont il prévoit faire l’acquisition cet été, l’agriculteur espère passer d’une récolte d’environ 5 000 livres de baies par saison à 25 000.
Une culture qui demeure marginale
Selon des données fournies par le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ), le nombre d’entreprises déclarant cultiver l’aronia au Québec est passé de 2 à 13, de 2010 à 2019. Toutefois, comme certaines personnes ne déclarent pas leur plantation, le MAPAQ spécifie que le nombre réel de producteurs de ce fruit pourrait être un peu plus élevé. Ensemble, tous les agriculteurs recensés depuis 2016 cultivent 22,8 hectares d’aronias, soit l’équivalent de 45 000 plants. Considérant que Christian Doyon en détient 25 000 à lui seul, les 12 producteurs restants, pour la plupart, possèdent des cultures plutôt marginales.
Diane Ouellette cultive 2 000 plants de cette baie à Potton, en Estrie. L’été, elle ouvre ses champs à l’autocueillette, en plus de proposer des produits transformés à base d’aronias, notamment des sirops et des confitures. « Je fais pousser d’autres fruits aussi, pas juste l’aronia. Ce serait difficile de rentabiliser ma production si je ne cultivais que ça, c’est trop méconnu », remarque-t-elle.
Même constat du côté de Charles Henri Auger, qui produit des vinaigres aromatisés à base de petits fruits émergents – camerises, baies de sureau, aronias – à Sainte-Brigide-d’Iberville, en Montérégie. Il soutient que l’aronia est de loin la baie la plus méconnue du lot. Daniel Turcotte, qui s’occupe de 1 000 plants à Saint-Cyprien-de-Napierville, en Montérégie, évoque quant à lui les pertes qu’engendre la culture de ce fruit, puisque les arbustes, dit-il, sont très productifs, « parfois trop ». Comme la cueillette doit se faire à la main, faute d’options de machinerie à un prix raisonnable, beaucoup de baies restent dans les arbres à la fin de la saison.
« S’il existait un groupe de discussion ou un réseau de producteurs d’aronias informel permettant aux agriculteurs d’échanger entre eux, le marché au Québec s’ouvrirait peut-être davantage », suggère Christian Doyon. Soulignons qu’à l’heure actuelle, il n’existe aucune fédération ou association officielle pour cette baie.
L’aronia en bref L’aronia est une baie noirâtre de 6 à 10 mm de diamètre qui pousse dans un arbuste de 1 à 2 mètres de hauteur et de 1,5 mètre de largeur. Bien que ce petit fruit soit originaire d’Amérique du Nord, sa production mondiale est surtout concentrée en Europe, notamment dans les pays scandinaves et en Russie. Au Québec, la baie est prête à être cueillie dès la fin du mois d’août. Reconnue pour ses propriétés médicinales, elle présente un potentiel pour le traitement de l’hypertension et agit comme stimulant des systèmes digestifs et immunitaires. L’aronia peut également agir en prévention de certains cancers et contre les maladies cardiovasculaires et neurodégénératives. Pour conserver au maximum ses antioxydants, le fruit doit être rapidement nettoyé et congelé après la récolte. On recommande un espacement d’environ 4 mètres entre les rangs et d’environ 1 mètre entre les plants. La culture est peu exigeante en fertilisants et les rendements varient entre 5 et 10 tonnes de baies par hectare de plantation. Sources : Coopérative Cultur’Innov, MAPAQ |