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Victor-Lévy Beaulieu constitue à la fois l’un des écrivains et des éditeurs les plus prolifiques de sa génération et l’un des rares qui réalisent l’ensemble de leur œuvre à la campagne, à proximité de la ferme familiale.
Celui que l’on appelle aussi VLB, un nom composé de ses simples initiales, a toutefois travaillé 25 ans à Montréal à la suite d’un exode forcé vers la grande ville, lorsque son père a décidé d’aller y gagner sa vie comme infirmier.
« On a rattrapé et même dépassé les Américains », affirme fièrement Marcel Bouchard, fondateur du Réseau BIBLIO des Laurentides. Impliqué aussi dans l’expansion des bibliothèques au Saguenay–Lac-Saint-Jean, en Outaouais et dans Lanaudière, il a contribué à l’ouverture de 155 d’entre elles dans le monde rural.
« Moi, j’aimais ça, la terre », raconte Victor-Lévy Beaulieu, en entrevue avec Vivre à la campagne, le 1er octobre dernier, dans sa vaste demeure de Trois-Pistoles, qui lui sert également de maison d’édition. Les travaux de la ferme s’avéraient pourtant très exigeants pour un garçon de son âge, mais il avait développé une passion pour les animaux qu’il cultive toujours aujourd’hui.
La vie en ville commence à la dure, en 1958, à l’âge de 14 ans. VLB se considère alors comme un « immigrant de l’intérieur ». Son père, un « citadin dans l’âme », peine à trouver un premier petit logement pour sa famille de 13 enfants à Rivière-des-Prairies, qui ressemble encore à un village à l’époque. Les Beaulieu « essaiment » peu après vers Montréal-Nord, qui compte déjà beaucoup d’immigrants italiens, grecs, polonais et portugais.« Moi, j’aimais ça, la terre », raconte Victor-Lévy Beaulieu, en entrevue avec Vivre à la campagne, le 1er octobre dernier, dans sa vaste demeure de Trois-Pistoles, qui lui sert également de maison d’édition. Les travaux de la ferme s’avéraient pourtant très exigeants pour un garçon de son âge, mais il avait développé une passion pour les animaux qu’il cultive toujours aujourd’hui.
Dès cette période, VLB commence à écrire ses premiers livres. Il a 18 ans lors de la sortie de son premier titre. Il dégote également son premier travail pour Distribution Éclair qui distribue le TV Hebdo. Il effectue de la pige pour cette publication et dirige le Digest Éclair, une sorte de Reader’s Digest francophone. Peu à peu, il délaisse son métier d’écrivain pour se consacrer à ces nouvelles occupations.
En 1976, à une époque plus patriotique et propice aux livres québécois engagés et aux parutions d’ici en général, Victor-Lévy Beaulieu laisse sa marque en fondant VLB éditeur. Il conserve son entreprise pendant neuf ans, mais il se décide à vendre à Québecor lorsque cette première période stimulante s’estompe.
De Montréal à Trois-Pistoles
De retour dans le Bas-du-Fleuve, il fonde les Éditions Trois-Pistoles malgré les nombreux défis de l’édition en général. L’« establishment de l’édition » vit à Montréal et n’a « jamais mis les pieds en région ». Les réunions, les concours littéraires, les émissions de radio ou de télévision se réalisent donc presque toujours dans la grande ville. En conséquence, les coûts de transport s’avèrent nettement plus élevés pour un éditeur éloigné du pôle d’attraction de littérature principal. On remarque d’ailleurs un phénomène similaire en France, où Paris accapare une grande partie du monde littéraire.
Et il y a pire. Les gens de la ville spécialisés dans le domaine regardent souvent de haut les auteurs des régions. « Ces auteurs ne sont pas considérés comme de vrais écrivains», déplore Victor-Lévy Beaulieu, qui estime qu’une écrivaine comme Nicole Filion, par exemple, jouirait sans doute d’une plus grande réputation si elle avait toujours habité à Montréal. La campagne est vue comme « lointaine, dépassée et réactionnaire ». De jeunes talents du monde rural migrent d’ailleurs encore fréquemment vers les villes parce qu’ils ne se sentent pas assez appuyés localement et qu’ils veulent maximiser leurs chances de se faire connaître.
Il reste maintenant très peu d’éditeurs littéraires en région. À part Éditions Trois-Pistoles, VLB mentionne JCL, de Chicoutimi, et Les Éditions Vents d’Ouest, de Gatineau. « Je ne retire que 33%du 20 $ de la vente », explique l’éditeur et auteur, qui ajoute que le reste va aux intermédiaires comme le libraire et le distributeur. Pourtant, il y a de moins en moins de contraintes techniques pour éditer en région. Éditions Trois-Pistoles fait d’ailleurs affaire avec un graphiste de Saint-Alexis, près de Matane, et un autre de Saint-Hubert, sur la rive sud de Montréal. Le livre électronique pourrait donner un second souffle aux éditeurs en région en diminuant les coûts de production.
« Je suis très heureux de constituer un éditeur à la campagne », conclut malgré tout Victor-Lévy Beaulieu, qui vante la qualité de vie dans son coin de pays où il peut travailler une heure dans son jardin pour s’offrir une pause. Le fait d’être moins sollicité facilite également le travail de l’esprit. « L’écriture n’est pas la même », ajoute l’auteur, qui estime que le décor champêtre se transpose dans les écrits.
« Ma façon de dépeindre l’hiver n’est pas celle d’un livre rédigé à Montréal. C’est un plaisir ici », fait-il valoir.
En campagne pour les campagnes
Victor-Lévy Beaulieu est également un homme engagé et un farouche défenseur des régions. Il est toujours un peu en campagne pour les campagnes! Il déplore d’ailleurs le manque de compréhension entre les gens de la ville et ceux du monde rural. Pour mettre fin au dialogue de sourds entre la ville et la campagne, il faudrait une « vraie décentralisation ». VLB refuse que les règles soient « fixées d’en haut » par Québec.