Politique 24 octobre 2019

Le Parti québécois plaide pour un contrepoids rural

LONGUEUIL — Le chef du Parti québécois (PQ), Pascal Bérubé, propose de réunir les députés des régions au sein d’une instance formelle afin de développer un réflexe de ruralité au gouvernement. Une façon de donner un rapport de force au monde rural dans un « Québec à deux vitesses », affirme-t-il.

« Depuis quelques années, je réalise que le poids des députés ruraux en politique québécoise doit être augmenté », affirme le « fier député rural ». Son idée de regrouper de manière non partisane les députés des régions n’est d’ailleurs pas étrangère à la configuration actuelle de l’Assemblée nationale. Ainsi, la Coalition avenir Québec (CAQ) est absente de la Côte-Nord et de pratiquement tout l’Est-du-Québec, fait remarquer M. Bérubé. De plus, les trois régions administratives de Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine, du Bas-Saint-Laurent et de Chaudière-Appalaches ont la même ministre régionale. « De Thetford Mines aux Îles, le gouvernement a manqué de sensibilité en nommant la même ministre », estime le chef du PQ.

Le député lance donc l’idée de mettre en place un cercle des députés ruraux, tous partis confondus, à l’image du Cercle des femmes parlementaires et du Cercle des jeunes parlementaires, deux instances reconnues par l’Assemblée nationale.

Un cercle des députés ruraux permettrait de réunir de façon formelle ces élus pour discuter des enjeux qui les touchent particulièrement tels que l’agriculture, la forêt, la démographie, le soutien aux petites municipalités ou encore l’accès à Internet haute vitesse. « Ce sont des revendications très légitimes qui couvrent beaucoup de territoire au Québec, insiste le député dont la circonscription compte un record de 45 municipalités. Le monde rural mérite d’être mis à l’avant-plan de façon positive et d’avoir de l’attention gouvernementale. »

Son projet soulève l’intérêt de la part de ses collègues députés ruraux. D’ailleurs, la ministre des Affaires municipales s’est montrée ouverte à un tel cercle, affirme M. Bérubé. Un consensus entre les partis s’avère cependant nécessaire afin que le Bureau de l’Assemblée nationale donne son aval à ce nouveau cercle.

Nationalisme versus souveraineté

Le chef du Parti québécois se montre critique face au nationalisme dont se revendique le gouvernement. « Je souhaiterais rappeler quelque chose de fondamental à la Coalition avenir Québec [CAQ], qui s’autoproclame nationaliste. Le nationalisme, c’est beaucoup l’achat local et il n’y a rien de plus local que l’agriculture », lance Pascal Bérubé. Il juge que l’actuelle politique bioalimentaire de la CAQ, héritée des libéraux, « n’a pas suscité énormément d’enthousiasme jusqu’à maintenant ». Il rappelle la politique de souveraineté alimentaire mise de l’avant par le dernier gouvernement du Parti québécois en 2013. « Ils peuvent changer le nom s’ils n’aiment pas le mot souveraineté, mais tout était-là! […] S’ils avaient envie de reprendre cette politique, on en serait ravis et ce n’est pas pour rien que j’en ai commandé deux exemplaires récemment : un pour moi et un pour le ministre de l’Agriculture, que je vais lui apporter en mains propres », promet-il. 

L’agriculture, est-elle une priorité ?

Un an après l’élection de la Coalition avenir Québec (CAQ), l’occasion était belle de dresser un premier bilan agricole du gouvernement avec le chef du 3e groupe d’opposition. « Le ministre [André Lamontagne] a un intérêt, une curiosité sincère à l’égard de l’agriculture », affirme Pascal Bérubé. Le député de Matane-Matapédia ne sent toutefois pas que le portefeuille de l’agriculture figure dans les grandes priorités gouvernementales. « Jusqu’à maintenant, ce n’est pas le ministre qui a été mis le plus de l’avant », ajoute-t-il, en avouant du même coup mettre la barre haute. « En agriculture, on a eu Jean Garon et François Gendron, des ministres dont on parle encore. Qui sera le prochain ministre qui va transcender les partis politiques? Je le souhaite à M. Lamontagne », déclare Pascal Bérubé. À son avis, la réforme du Programme de crédit de taxes foncières agricoles constitue un « test concret. La revendication du monde agricole est très claire. Le gouvernement a des marges de manœuvre financières importantes », note-t-il. La décision de soustraire à la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) l’étude du dézonage de près de 100 hectares de terres à Beauharnois pour l’implantation de la multinationale Google représente un autre « test de cohérence. Le gouvernement est capable d’accueillir cette entreprise-là sans brader nos ressources. […]. Des fois, le nationalisme se confond avec un mot qui rime, mais qui n’est pas la même chose : le mot “affairisme”. C’est un manque de considération pour une loi qui est essentielle pour le monde agricole », dénonce Pascal Bérubé.