Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
De nos jours, créer une érablière résiliente revêt une importance capitale. Ignorance et négligence peuvent s’avérer catastrophiques pour plusieurs décennies. Et si se donner des bases solides commençait justement par bien comprendre le système racinaire de l’érable?
Il convient d’emblée de rappeler que les racines jouent principalement trois rôles, soit de fixer l’arbre dans le sol, d’assurer son alimentation en eau et en minéraux, et de stocker certaines réserves (carbone, amidon, azote, etc.). Dans une érablière, l’essentiel de l’appareil absorbant se situe en surface, là où se trouvent les ressources concentrées dans l’humus produit par la chute des feuilles et où s’opère le cycle des éléments nutritifs.
« En forêt, ou dans un sol ayant de la compétition pour les ressources, la profondeur d’enracinement sera réduite au minimum. Souvent, 95 % des racines occupent le premier pied et 99 % s’observent dans les trois premiers pieds. Le système racinaire de l’érable à sucre et de l’érable rouge est très latéral. Au départ, il faut donc créer un espace vital libre de végétation autour des plants », relève David Lapointe, ingénieur forestier au ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ).
On doit également savoir que la distribution racinaire est rarement circulaire. « Si elles meurent et se régénèrent, le risque de blessures aux racines est aussi à considérer lorsqu’il y a une perturbation du sol à une distance inférieure à 12 fois le diamètre à hauteur de poitrine [DHP]. Par exemple, si le DHP est de 12 pouces, mieux vaut travailler à plus de 12 pieds de l’arbre avec de la machinerie lourde et le faire en hiver », ajoute M. Lapointe.
Plantation en pleine lumière
Est-il préférable de planter en ligne ou de manière désorganisée? Sur une période de dix ans et moins, des études indiquent qu’il n’existe pas de différences significatives dans l’accroissement en hauteur et le diamètre des érables à sucre. En rang, il est toutefois conseillé de planter « serré » pour avoir le choix des arbres à enlever, bien que certaines plantations réussissent à merveille avec des espacements de 20 pieds sur 20, par exemple.
Selon le spécialiste, quelques règles permettent d’améliorer ses chances de succès, comme de toujours retirer les arbres présentant des chancres eutypelléens, de planter en fonction de l’entretien – tondeuse, faucheuse, débroussailleuse –, de mettre en terre tôt (en mai) ou tard (en septembre ou octobre) en saison, de planter petit en compactant autour des tiges, de protéger les racines, de désherber et d’écarter les rongeurs et les cerfs.
Plantation en sous-bois
Ici, l’idée à retenir est celle du « bon arbre au bon endroit ». Un sol bien drainé, profond, frais et caractérisé par une texture légère répondra aux besoins de l’érable à sucre, dans la mesure où le plant est disposé sur une butte. Un drainage imparfait, combiné à une nappe phréatique plus haute et à une texture de sol lourde commandera plutôt la plantation d’érables rouges. L’érable argenté composera pour sa part avec un terrain très mal drainé.
« Dans un sol de type calcaire, riche, à pH élevé, modérément à bien drainé, il y a possibilité de planter de l’érable noir, complète David Lapointe. Autrement, en sous-bois, avant de procéder à la plantation, il faut tenir compte des arbres semenciers déjà présents, des érables d’avenir, de la régénération naturelle et favoriser des plants issus de semences locales. Pour mieux suivre les arbres plantés, on pourra leur mettre un ruban de couleur. »
Créer une érablière résiliente
Les changements climatiques et l’activité humaine exercent une pression de plus en plus forte sur les écosystèmes forestiers. La remontée vers le Nord de plusieurs espèces animales et végétales s’additionne, entre autres, aux phénomènes que sont les sécheresses prolongées, l’adoucissement des températures hivernales, le gel profond du sol en l’absence de neige, les tempêtes de verglas et des précipitations devenues très variables d’une année à l’autre.
« La question est de savoir si nos érablières sont équipées pour faire face à ces multiples perturbations. La création d’un environnement résilient prend donc toute son importance. De façon générale, on doit tendre à imiter la nature avec une compréhension raisonnée de celle-ci, propose l’ingénieur forestier. Dans la production de sirop d’érable, par exemple, la stabilité des revenus s’obtient grâce à une stratégie qui vise la durabilité, la pérennité. »
Lorsqu’une érablière est déjà exploitée pour le sirop, on privilégiera un aménagement forestier léger en pratiquant de petites trouées dans le couvert afin de permettre la régénération, de même que la croissance d’individus de différentes classes d’âge. Pour la faune et la microfaune, la préservation de chicots et d’arbres avec cavités est également souhaitable. Dans toute démarche, l’aide d’un spécialiste demeure évidemment indiquée.
Miser sur les espèces compagnes Diversité des genres et des espèces rime avec meilleure résilience de l’érablière face aux perturbations. Les espèces compagnes de l’érable doivent être complémentaires à celui-ci en ne puisant pas l’énergie du sol dans les mêmes couches et celle de la lumière au même moment. Il faut aussi que ces espèces soient collaboratrices en soutenant, par exemple, les érables lors d’un verglas, améliorantes à l’égard de leurs conditions de croissance (pH du sol, oligo-éléments) et fiables en étant moins sensibles aux maladies, aux insectes et au stress. Tilleul d’Amérique, caryer cordiforme, cerisier tardif, bouleau, peuplier, chêne rouge, pruche, érable à épis, érable de Pennsylvanie, noisetier à long bec, aulne, charme de Caroline, ostryer de Virginie, petits cerisiers et if du Canada constituent les meilleures espèces compagnes. MAPAQ : L’érable et son environnement : ce que la science nous apprend |