Alimentation 27 septembre 2019

6 millions de repas d’hôpitaux à base d’aliments plus locaux

MONTRÉAL — De nombreux agriculteurs québécois rêvent du jour où de très gros joueurs comme les hôpitaux développeront le réflexe d’acheter des aliments locaux. Ce rêve est en train de devenir réalité à Montréal.

L’Hôpital Notre-Dame et l’ensemble du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal (CIUSSS-CSIM) mettent en place des actions concrètes pour que leurs six millions de repas annuels soient de plus en plus confectionnés à partir d’aliments produits localement et selon les principes de développement durable. « Il se passe quelque chose! Il y a cinq ans, on n’avait pas ça en tête. Mais là, des démarches sont en cours et pas juste chez nous, ailleurs au Québec et au Canada », assure le chef des activités d’alimentation de l’Hôpital Notre-Dame, Jean-Marc Riverin.

Il donne en exemple, avec fierté, les desserts au lait que lui prépare maintenant la coopérative alimentaire Nutrinor, située à Alma au Lac-Saint-Jean, les boulettes de protéines végétales maintenant confectionnées par une entreprise de la région de Québec, sans oublier les fruits et légumes d’ici qu’il réclame à son fournisseur établi sur la rive sud de Montréal. « L’an passé, il n’y avait plus de fraises locales. On n’a pas remplacé ça par des fraises de la Californie, on a trouvé d’autres solutions locales », dit avec aplomb Helena Shopova, cuisinière et chef d’équipe à l’hôpital.

Un effet multiplicateur

Le CIUSSS-CSIM achète 49 M$ d’aliments par année, autant pour l’Hôpital Notre-Dame que pour les centres d’hébergement de soins de longue durée (CHSLD) et autres centres sous sa gouverne. Le virage local de cet acheteur de taille est difficile à chiffrer pour les producteurs québécois, mais Jean-Marc Riverin fait remarquer qu’en plus des achats tels quels effectués par son groupe, il faut également considérer un effet multiplicateur fort intéressant.

L’hôpital au marché

Le chef des activités d’alimentation de l’Hôpital Notre-Dame de Montréal, Jean-Marc Riverin, et certains membres de son équipe ont visité le Marché Jean-Talon le 19 septembre afin d’acquérir des légumes en vue de concevoir un repas spécial 100 % local pour 250 personnes à l’hôpital.

Le maraîcher d’expérience Jacques Rémillard, de qui M. Riverin venait d’acheter trois caisses de légumes, voit évidemment d’un bon œil l’engouement des grands acheteurs institutionnels pour l’achat local.

M. Riverin rêve du jour où des maraîchers québécois livreront directement leurs fruits et légumes à l’hôpital, mais cela nécessitera une coordination parfaite. « Les repas dans un hôpital, c’est non-stop. Tout est régi, tout est mesuré. Ça prend une grande stabilité d’approvisionnement. Il faudrait que les producteurs débarquent comme des métronomes. Pour l’instant, il manque cette infrastructure de distribution », explique-t-il.

À court terme, ce qui aiderait les gestionnaires institutionnels d’achats alimentaires comme lui serait une révision de la réglementation. « Avec la loi des approvisionnements [Loi sur les contrats des organismes publics], je ne peux pas imposer un critère de provenance du produit dans mes soumissions. Cette loi devrait être révisée pour qu’on puisse être plus créatifs », estime-t-il.

Sainte-Justine

Le Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine de Montréal termine une deuxième année d’achats de légumes biologiques effectués directement auprès de petites fermes québécoises. Lors d’un entretien avec La Terre l’automne dernier, Josée Lavoie, chef de service des activités d’alimentation de l’hôpital, disait qu’il fallait « vraiment un levier politique si on veut augmenter la présence de produits locaux et bio dans les hôpitaux ».

Le relationniste du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ), Yohann Dallaire-Boily, mentionne que le gouvernement soutient les achats de produits locaux, notamment en « développant un répertoire qui fera connaître l’étendue de l’offre bioalimentaire québécoise auprès du secteur institutionnel […] afin de proposer des solutions de rechange québécoises aux produits importés ».