Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
Il n’y a pas que dans les grandes villes que la pauvreté fait mal. Dans les villages, en région, loin des centres, les plus démunis sont nombreux à demander du soutien, discrètement, pour arriver à s’en sortir. Ils ont notamment recours à l’aide alimentaire d’urgence, aux comptoirs de dépannage vestimentaire et aux prêts d’entraide.
« La pauvreté, en région, c’est un sujet tabou. Personne ne veut en parler ouvertement », constate Nathalie Larose Jolette, responsable des communications et des activités bénévoles à la Ressourcerie Bernard-Hamel, de Rouyn-Noranda.
Chaque jour, elle côtoie des hommes et des femmes qui ont faim, qui ont des problèmes d’argent, mais qui hésitent à demander de l’aide pour des vêtements, des meubles, un prêt d’urgence [avec le Fonds d’entraide Desjardins] et de la nourriture.
« Ce sont aussi des familles entières qui viennent cogner à notre porte, observe-t-elle. On s’efforce de répondre à la demande grandissante. Il nous arrive fréquemment de livrer des denrées dans les villages plus éloignés pour rejoindre la clientèle dans le besoin. »
Cela confirme le constat posé tout récemment par la directrice générale du réseau des Banques alimentaires du Québec, Annie Gauvin, sur la condition précaire des gens qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts. Depuis un an, la demande d’aide alimentaire a explosé pour atteindre 25 %, non seulement dans les grandes villes, mais également en région.
Chose certaine, selon les intervenants sur le terrain, l’isolement est souvent le pire ennemi des personnes en manque de ressources, mais aussi, la peur d’être jugé.
« La pauvreté, c’est une réalité, convient Lorraine Gaudreau, professeure en travail social à l’Université du Québec à Rimouski [UQAR]. Dans les villages, personne ne veut être identifié comme quelqu’un de démuni. Les préjugés sont tenaces. »
Elle ajoute : « Ces gens-là ne vont pas toujours demander de l’aide et c’est là, le problème; d’où l’importance d’aborder de front l’enjeu de la pauvreté en milieu rural. »
Impliquer les municipalités
Lorraine Gaudreau s’est penchée sur cet enjeu de société et les problèmes d’exclusion sociale qui en découlent dans le cadre d’une recherche à laquelle ont participé activement les professeures Lucie Gélineau, de l’UQAR, et Sophie Dupéré, de l’Université Laval, de même que Paule Simard, de l’Institut national de santé publique du Québec.
Les travaux ont été documentés à partir, notamment, des actions posées à Saint-Pascal, Lebel-sur-Quévillon, Notre-Dame-de-Ham et Rouyn-Noranda, toutes reconnues pour leurs initiatives de lutte à la pauvreté sur leur territoire (voir tableau plus bas).
Le lancement d’une trousse d’outils pour sensibiliser les élus des municipalités rurales à la pauvreté fait partie des retombées de la recherche, dont les résultats ont été dévoilés l’automne dernier.
Lorraine Gaudreau mise d’ailleurs sur cette trousse pour aider les municipalités, mais aussi pour lancer un véritable débat, à la fois localement et dans l’ensemble de la province, sur les moyens à prendre pour adoucir la vie des gens sans moyens.
« Ce serait bien que les élus commencent par la nommer, la pauvreté, pour pouvoir mieux intervenir auprès de ceux qui en souffrent, soulève-t-elle. Il faudrait également inclure les défavorisés dans cette démarche pour identifier leurs besoins et faire intervenir les groupes communautaires. »
Initiatives de lutte à la pauvreté et à l’exclusion Saint-Pascal (Bas-Saint-Laurent) Cuisines collectives, groupes d’achats, activités d’initiation à la saine alimentation, jardin communautaire, création d’emplois d’été pour les jeunes. Lebel-sur-Quévillon (Nord-du-Québec) Semaine de la famille, comité logement social, comité pauvreté, fête des voisins, cuisine-o-thon pour offrir des repas aux personnes dans le besoin, campagne Zéro rejet, gala de reconnaissance des bénévoles, adoption d’une politique familiale. Notre-Dame-de-Ham (Centre-du-Québec) Kiosques de vente de produits locaux, guignolée, création d’un bottin de services, réalisation de panneaux historiques pour la valorisation de la communauté, promotion des services à domicile pour les aînés, comité d’accueil des nouveaux arrivants et des nouvelles familles, développement d’une trousse à l’intention des parents d’enfants de 0 à 5 ans dans un contexte d’isolement et de vulnérabilité, activités sociales et culturelles pour les 12 à 35 ans, organisation d’une journée Papi et Mamie. Rouyn-Noranda (Abitibi-Témiscamingue) Comité de parents, projet pilote d’accompagnement des personnes exclues du marché du travail, distribution de bons alimentaires, activités de sensibilisation contre les préjugés à l’égard des personnes en situation de pauvreté. |
Yvon Laprade, collaboration spéciale