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Le rendement de ses chèvres laitières était bon. Sa production était vendue en totalité à divers acheteurs et pourtant, depuis avril, ce ne sont plus des chèvres que Paméla Courchesne nourrit dans son étable, mais des agneaux. L’instabilité de la dernière année a eu raison de plusieurs fermes laitières caprines comme la sienne, même si la motivation est loin d’avoir quitté tous les producteurs.
Des briques sur la tête
« En hiver, on nous dit : “Ça y est, c’est fini, on n’a plus de contrats.” Deux mois après, on nous affirme qu’il manque de lait et tout le monde produit. On reçoit toujours des briques [sur la tête]. Ce n’est pas stable et on n’est pas bien protégés », résume Mme Courchesne pour justifier sa décision. Quitter la production laitière caprine lui trottait dans la tête depuis longtemps, mais c’est l’annonce de la fermeture de l’acheteur de son lait, l’usine Damafro propriété d’Agropur, à Saint-Damase, qui l’a convaincue de passer à l’action.
L’agricultrice n’est pas en deuil. Elle est plutôt déçue d’avoir dû en arriver là. « On avait un bon coût de production, l’alimentation était correcte, mais le syndicat ne nous dit rien. On n’est pas au courant de ce qui se passe et c’est décourageant », mentionne-t-elle. (voir encadré)
L’ex-productrice laitière dénonce aussi le manque de solidarité dans le secteur caprin. « On n’est pas prêts à fonder quelque chose et à se dire : “Go, on avance et on va essayer de se défendre ensemble” », poursuit-elle.
Pas la seule
Paméla Courchesne n’est pas la seule à avoir quitté la production, confirme l’agronome et économiste Michel Morin. L’homme témoigne d’au moins deux cas similaires sur la quarantaine d’éleveurs qu’il a contactés dans le cadre d’une étude sur les coûts de production des chèvres laitières. « Il y en a probablement d’autres avec qui l’on n’a pas communiqué », ajoute celui qui œuvre au Centre d’études sur les coûts de production en agriculture. Rappelons que l’on dénombrait 65 fermes laitières caprines au Québec en 2018.
Le taux de participation à l’étude de M. Morin frôle les 45 %, ce qui démontre un engagement des éleveurs à l’égard de la production. « Dans ceux qu’on rencontre, il y en a qui ont encore des projets, des investissements à faire. […] On a des agriculteurs qui croient au secteur et qui continuent d’avancer », souligne M. Morin. L’étude qu’il effectue permettra de dresser un portrait de la production et de mieux défendre le secteur lors de négociations avec les acheteurs, mais aussi de donner aux éleveurs la possibilité de comparer les performances de leur ferme par rapport au reste du groupe.
L’étude devrait être dévoilée à la fin de l’automne.
Pas de nouvelles d’Agropur La fermeture de l’usine d’Agropur, initialement prévue en avril 2019, aura lieu à la fin juillet. « On n’a pas eu d’autres nouvelles depuis cette annonce-là, souligne le président des Producteurs de lait de chèvre du Québec, Christian Dubé. Les éleveurs ressentent toujours de l’insécurité par rapport à l’année prochaine et ce n’est pas motivant pour eux. » Il observe que certains se sont délestés de quelques bêtes et prédit que le lait de chèvre se fera plus rare à l’automne. Quant aux critiques faites à l’égard de son organisme en raison du manque de communication, Christian Dubé répond qu’il n’en sait pas plus que les producteurs eux-mêmes. « On ne peut pas aller plus vite que les acheteurs. Concernant Agropur, les gens me disent : “Tu sais des affaires que les autres ne savent pas”, mais je ne sais pas grand-chose, moi. […] On est tous dans le même bateau. » |