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Épinard africain, corette du Togo, concombre citron… Les fruits et légumes exotiques ont désormais leur place dans les marchés du Québec, et de plus en plus de maraîchers intègrent à leur production des variétés venues d’autres continents. Si le phénomène ne date pas d’hier, il s’intensifie, car les consommateurs ont soif de nouveauté.
Ajouter à son panier d’épicerie hebdomadaire des concombres libanais ou du chou chinois n’a plus rien de rare au Québec. Les fruits et légumes dits « exotiques » ont trouvé leur place sur les marchés, et le phénomène n’est pas nouveau. Sur ses terres de Saint-Lin-Laurentides, Lorraine Nadon s’exclame : « Les carottes orange, ce n’est pas ça qui me fait triper! » Productrice depuis 1983, la responsable des Jardins de Stéphanie est restée fidèle à la tradition familiale tout en faisant un pas de côté. « Mon papa cultivait des tomates et des fraises. Il y avait de la concurrence, et j’ai compris qu’il fallait se démarquer. »
Tout un monde de variétés
À l’époque, pour séduire une clientèle italienne et grecque, Lorraine Nadon se spécialise dans les fines herbes (le persil), un défi qu’elle continue à relever 35 ans plus tard. Son coup de cœur actuel : le shiso rouge ou perilla, une herbe aromatique mexicaine utilisée dans les sushis, qu’elle fait pousser sur ses terres. La productrice fait en sorte de renouveler son offre et travaille avec un agronome. « Avant, seuls les restaurants haut de gamme étaient demandeurs; aujourd’hui, avec l’arrivée d’immigrés, la demande est très forte, notamment pour les herbes aromatiques d’Amérique du Sud et d’Asie. J’écoute mes clients, je fais des recherches sur Internet, je regarde les catalogues pour faire venir de nouveaux plants et les produire ici. »
À Charlevoix, Jean-Thomas Fortin, ancien travailleur social reconverti dans le maraîchage, produit des fruits et légumes qui n’ont rien de commun. Il a notamment construit sa réputation sur le concombre citron. « Il a la couleur du citron et goûte le concombre. L’été, je ne bois pas d’eau, je prends ça! » explique le propriétaire de La Bordée des Corneilles, qui fournit aussi du melon de Sibérie – une variété revenue au goût du jour – et des aubergines Little Finger et Snowy. Au total, il cultive 30 variétés anciennes ou exotiques en agriculture biologique.
Du côté de Farnham, Edem Amegbo s’apprête à commercialiser l’épinard africain (le gboma), la corette du Togo et vend déjà l’aubergine africaine, blanche et plus petite que l’aubergine traditionnelle, très en vogue actuellement. Pour ce type de produit, la demande est forte en raison du nombre d’immigrants, mais pas seulement : « Je m’aperçois que les Québécois aiment de plus en plus le côté exotique et je suis en manque de stocks. Alors, chaque année, je fais des tests pour proposer des nouveautés. »
Tous ces maraîchers observent la même chose : la production ne semble pas souffrir du climat québécois, pour deux raisons au moins. « Ici les étés sont très chauds; nos légumes africains s’adaptent parfaitement », assure Edem Amegbo. Et la plupart des producteurs font germer en serre, pour éviter les déconvenues du gel, et plantent en champ une fois l’hiver passé. Avec ces méthodes, il est possible d’adapter presque toutes les cultures au climat nord-américain, en toute saison.
Consommer local et nouveau Dans Lanaudière, la Ferme Mathieu Lavoie, grande productrice de courges, part à la conquête de variétés moins connues. Les nouvelles venues au catalogue se prénomment la stripetti, une alternative à la courge spaghetti très utilisée dans la cuisine africaine, et la delica, ronde et verte. « Notre défi est maintenant de convaincre les consommateurs, explique Audrey Lavoie. Nous avons observé au centre d’autocueillette que les gens ont envie de consommer du local et de la nouveauté. On s’inscrit dans ce créneau. »
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Agathe Beaudoin, collaboration spéciale