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MONTRÉAL — Reconnue pour avoir su innover dans la mise en marché du sirop d’érable et avoir réussi à vendre du sirop québécois dans les Costco du Canada et des États-Unis, l’entreprise Groupe 29 février rend les armes.
C’est avec une humilité qui commande le respect que le propriétaire François Décarie accepte de nous parler de sa route vers le succès, puis vers le déclin. Il partage son expérience avec le désir d’en aider d’autres. « Les derniers mois ont été très difficiles. J’ai eu des idées noires, dit-il. Mais je ne suis pas amer. Ç’a été un très beau voyage. Par contre, si je pouvais reculer dans le temps, je ferais les choses autrement. »
Faire évoluer la conserve
Spécialiste en marketing événementiel, François Décarie remarque que le sirop d’érable vendu en boîte de conserve ne rend pas justice à la noblesse du produit. Il constate aussi que ce contenant est impopulaire au Canada anglais et aux États-Unis. Il fonde alors Groupe 29 février, en 2013, afin d’offrir du sirop dans un emballage plus distinct. Après s’être fait dire non par le géant Costco, il demande à ses fournisseurs de revoir leurs prix, il engage un agent qui a des contacts avec la chaîne et réussit à y faire entrer son produit : un trio de petites bouteilles de sirops clair, ambré et foncé. « C’est là que c’est parti. On a vendu plus de 100 000 livres de sirop en 2016. On était tous emballés! » se rappelle-t-il avec le sourire. En 2017, son contenant de sirop se hisse parmi les finalistes de tout le milieu agroalimentaire canadien au prestigieux Grand Prix du Salon international de l’alimentation Innovation 2017 de Toronto.
Apprentissage à la dure
François Décarie a le vent dans les voiles. Mais Costco lui annonce que son trio de sirops ne sera plus vendu en magasin; seulement en ligne. « Dans la même période, j’avais aussi signé un contrat avec un gros distributeur américain. Il m’a passé des commandes qu’il a été incapable de vendre. C’est moi qui ai dû tout absorber. J’ai appris à la dure! J’aurais dû développer les États-Unis marché par marché », regrette-t-il. La croissance rapide de l’entreprise a mis une forte pression sur ses liquidités. Non sans stress, l’entrepreneur a ensuite joué le tout pour le tout avec cette nouvelle idée : du sirop dans un contenant de table semblable à un « vinier » aux couleurs des équipes de la Ligue nationale de hockey. « Les gens me disaient : “Super bonne idée, François! Ça va pogner, vas-y!” » Costco et Metro l’ont mis en marché, sauf que les ventes n’ont jamais décollé. « Je reste encore convaincu que c’est le meilleur type de contenant pour conserver toute la fraîcheur du sirop, mais le prix était trop élevé pour le consommateur. Je n’ai que moi à blâmer. J’aurais dû faire des groupes de discussion au lieu de gambler », analyse-t-il.
Avant d’y laisser sa santé
Les durs coups ont eu raison de son moral et des garanties personnelles qu’il avait consenties à ses créanciers. « Mais le plus beau dans toute mon aventure, c’est ma rencontre avec les producteurs acéricoles. Ce sont des passionnés. Je me suis aussi rendu compte que le sirop d’érable est un produit encore meilleur que je pensais. C’est notre richesse gastronomique nationale », souligne l’entrepreneur. Il n’a pas fait faillite, mais a décidé de tirer sa révérence avant d’y laisser sa santé. Il se dit cependant prêt à partager son expérience comme mentor avec des jeunes qui voudraient se lancer en affaires, et même à offrir sa marque : 29 février.
« J’aurais dû m’associer à une érablière » Le principal conseil que François Décarie formulerait à quelqu’un qui voudrait lancer une marque de sirop haut de gamme comme la sienne : s’associer avec une ou deux grosses érablières orientées sur la qualité. « Quand tu veux créer une marque, il faut que tu t’assures de fournir des volumes suffisants et de la qualité. Moi j’achetais mon sirop d’un acheteur autorisé qui faisait des assemblages. Au début, je ne le voyais pas, mais le goût du produit variait et pas toujours pour le mieux. L’un de mes clients, Costco, m’a même contacté pour dire que j’avais du sirop en défaut de saveur. Ce n’est pas très bon pour l’image », explique-t-il, spécifiant qu’il a goûté à d’excellents sirops au Québec, mais aussi à d’autres qui avaient été produits trop rapidement et qui étaient insipides. En devenant partenaire avec une ou deux grosses érablières, il aurait pu obtenir une traçabilité et un contrôle beaucoup plus précis de la qualité. De plus, il aurait pu associer à sa marque de sirop une image artisanale. « L’avenir, c’est un sirop artisanal, mais distribué à grande échelle », assure-t-il. |