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QUÉBEC — Malgré les nombreuses critiques à son endroit, le programme d’assurance stabilisation des revenus agricoles (ASRA) en production porcine s’avère toujours légitime, affirme un spécialiste bien connu de l’agroalimentaire québécois.
L’ASRA joue un rôle de stabilisation essentiel dans la production porcine, un secteur où « ça swingue pas mal », a expliqué le professeur de l’Université Laval Daniel-Mercier Gouin lors de l’assemblée semi-annuelle des Éleveurs de porcs du Québec. Cet outil permet également aux producteurs d’ici de se battre à armes égales avec les éleveurs étrangers, soutenus eux aussi par leurs gouvernements.
Entre 2008 et 2016, le niveau de soutien public a été largement supérieur au Québec qu’en Ontario, au Manitoba, en France, en Espagne, au Danemark et aux États-Unis. Étonnamment, chez nos voisins du Sud, le Farm Bill soutient peu le secteur des viandes comparativement aux grandes cultures et au lait, a précisé M. Gouin. Au Québec, au cours de la dernière décennie, le prix de marché n’a dépassé le revenu stabilisé que durant une seule année, soit en 2014. « En 2008, le prix ne couvrait même pas le coût d’alimentation », a rappelé l’universitaire. L’année suivante, le programme atteignait un
déficit record.
Coût de production
En comparant les coûts de production porcins 2014-2015 des éleveurs québécois à ceux du reste de l’Amérique du Nord, Daniel-Mercier Gouin et Catherine Brodeur, du Groupe AGÉCO, ont découvert que le Québec devait négocier avec un désavantage significatif au niveau des coûts d’alimentation. Ce surcoût de l’alimentation n’est pas lié à l’efficacité des éleveurs, mais plutôt aux prix des aliments du bétail. « Vous avez moins de marge de manœuvre que vos concurrents, ce qui amène un déficit de trésorerie par rapport à eux », a résumé M. Gouin.
Vétusté
En termes de productivité et de coût du travail, le Québec performe moins bien que ses compétiteurs. Cette productivité nettement inférieure pourrait s’expliquer par un parc de bâtiments vieillissant, a poursuivi Catherine Brodeur. Selon l’étude de coûts de production des Éleveurs de porcs, de 2007 à 2011, les investissements moyens en immobilisation se sont élevés à 17 000 $/an, ce qui s’avère insuffisant, a indiqué le directeur adjoint des affaires économiques des Éleveurs, Julien Racicot. De plus, les frais d’entretien ont connu une hausse marquée entre 2015 à 2017, confirmant ainsi le non-renouvellement du parc de bâtiments et « la théorie du patchage », a illustré M. Racicot.
Hypothèse
L’historique du programme ASRA tend aussi à appuyer cette hypothèse. « Si la ferme ASRA existe, de 2007 à 2013, elle a eu un revenu net négatif année après année. C’est une explication plausible pour les sous-investissements dans les bâtiments et la plus faible productivité. Dans ce contexte, les compensations ASRA gardent toutes leur justification », a conclu Daniel-Mercier Gouin.
Une semaine plus tard, lors des audiences de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec concernant l’arbitrage de la mise en marché des porcs, le professeur a tenu à rappeler que l’ASRA n’est cependant pas conçue pour pallier les déficiences des mécanismes de fixation des prix.
Un nouveau modèle en 2019 Le secteur porcin est en plein renouvellement de son modèle de coût de production. Ce dernier est basé sur les données 2017 et sera applicable en 2019. Le nouveau modèle se caractérise notamment par une augmentation de la taille des entreprises de même que par des changements de structure, entre autres la hausse du nombre de porcs élevés à forfait. Son analyse confirme la présence d’un contexte qui ne permet pas de refléter une situation normale de renouvellement des actifs, ont indiqué les Éleveurs lors de leur assemblée semi-annuelle. Pour l’organisation, cette étude ne donnera pas aux exploitations porcines la possibilité de perdurer dans le temps. D’autre part, à compter du 1er janvier prochain, La Financière agricole du Québec retirera la modulation de la prime d’assurance stabilisation des revenus agricoles pour les entreprises de grande taille (plus de 3 000 truies et plus de 10 400 000 kilos porcs). Celle-ci sera remplacée par l’application d’une franchise de 4,40 $/100 kg, c’est-à-dire un montant qui ne sera pas couvert par l’assurance. |