Au-delà des innombrables heures qu’ils consacrent au champ, des producteurs maraîchers trouvent le moyen – et le temps – de lâcher leur fou. Ainsi, ils dévoilent au public une autre facette de leur personnalité et de leur entreprise. Voici cinq personnages dont l’esprit bouillonne de créativité.

La « Bottine Souriante » version punk rural

Avec son groupe Carotté, l’agriculteur Médé Langlois se plaît à passer du champ à la scène. Travailler à la Ferme Langlois, de Neuville, et chanter du punk-trad rural sont pour lui des passions complémentaires, voire indissociables. Peu importe son métier, « c’est toujours bon de s’évader avec ce qu’on fait dans la vie, estime l’artiste. J’aime encore plus ma job quand je reviens sur ma terre, même si je n’ai pas dormi du week-end à cause des spectacles ».

Dans son tout nouvel album, Dansons donc un quadrille avant de passer au cash, le groupe qu’il considère comme sa deuxième famille a d’ailleurs composé une chanson sur le pot. « On s’excuse sincèrement pour la pénurie à la SQDC [Société québécoise du cannabis]. C’est peut-être un peu de notre faute », a écrit le groupe à la blague pour introduire son vidéoclip sur sa page Facebook. Le groupe Carotté entreprendra une tournée pour le temps des Fêtes. Pour plus d’info : carotte.biz.

Une image qui a du mordant

Grâce à sa caricature et à son nom d’entreprise, Yannick Côté, alias le Jardinier déchaîné, a voulu innover avec le concept de l’image de marque. 

« Je trouvais que c’était toujours trop bucolique les noms de ferme. J’avais envie d’aller ailleurs, raconte-t-il en entrevue sur sa terre, à Cookshire-Eaton. [Mon image] démontre qu’il faut que tu te démènes quand tu es maraîcher. Il faut que tu te déchaînes pour mener ton été à bien. »

C’est avec un ami illustrateur, rencontré lorsqu’il travaillait en communication, qu’il a développé cette image où il croque dans une carotte. « En général, les gens ne l’oublient pas. Ils aiment bien mon nom aussi. Ça frappe l’imaginaire », estime celui qui produit des paniers de légumes et de fruits biologiques à temps plein depuis trois ans.

Le rap engagé de Capitaine Dandelion

Le producteur Arham Savoie, connu sous les noms de Capitaine Dandelion ou Mc Farmer, a fait un véritable tabac il y a deux ans avec son rap et vidéoclip Manger Local. Vidéoclip : bit.ly/Capitaine_Dandelion 

Depuis, il n’est pas rare que des clients des marchés publics ou de sa petite épicerie à Québec, Accommodation Bio, lui demandent de chanter un extrait de son hymne engagé. L’agriculteur de la Ferme Hantée dans Lobtinière accepte, mais à une seule condition : « Le client doit me faire la chorégraphie. En plus, je lui donne un légume gratuit! » affirme-t-il.

Avec son occupation de maraîcher, M. Savoie admet que « c’est du sport » de trouver du temps pour nourrir sa passion. « La ferme est très prenante, mais j’essaie de travailler une heure par jour là-dessus. Le chant est une façon de me désennuyer du dur labeur, de me reconnecter et de motiver mon équipe. Ça me donne le courage et la volonté de continuer », témoigne-t-il.

Par sa chanson et ses nouvelles créations, il espère aussi rendre plus accessible l’agriculture et trouver une maison d’édition intéressée par son art.

Un piano et des vaches

L’agriculteur de Saint-Joseph-de-Beauce Philippe Vachon et le pianiste Serge-André Jones ont trimbalé leur piano dans un pick-up cet été pour divertir les foules dans Chaudière-Appalaches. « Les gens étaient surpris de voir un piano arriver dans un camion », raconte M. Vachon. 

Pour ce producteur laitier et maraîcher, ce projet musical a contribué à son équilibre de vie et à mettre de l’avant son côté social. « Ça m’a permis de montrer que oui, je suis agriculteur, que je travaille beaucoup, mais que je prends aussi le temps de vivre de mes passions », conclut-il. 

Le producteur a d’ailleurs tourné un vidéoclip avec son piano dans l’étable, au grand bénéfice de son public bovin! Vidéoclip : bit.ly/pianoetvaches

La poésie dans les légumes

Depuis maintenant 14 ans, les abonnés des paniers de la ferme Terra Sativa – Terre de cultures à Saint-Alban ont droit à un journal lyrique hebdomadaire, le Mâche-Patate, dans lequel Guillaume Baril informe ses lecteurs des légumes offerts dans leur panier et des manières de les cuisiner, le tout par le biais d’un poème sous forme de prose. L’inspiration lui vient souvent lors des récoltes. 

« J’aime l’écriture et c’est ma façon d’écrire. Le style peut varier d’une fois à l’autre, mais ça se veut franchement humoristique. Je ne me prends pas au sérieux », précise-t-il.

Voici l’extrait de l’une des dernières éditions de la saison : « La laitue est de ces feuillages qui, avec un petit coup de pouce, parviennent à traverser les gelées sans pour autant défunter. La frisée rouge qui parvient jusqu’à vous cette semaine porte avec fierté le souvenir de l’été, sauvegardé dans le vert et la tendreté. »