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Jusqu’à maintenant, les changements climatiques menaçaient surtout la luzerne pendant l’hiver. Après deux années de temps extrêmement sec dans certaines régions du Québec, des producteurs s’interrogent sur les moyens à prendre pour se garantir une récolte de foin suffisante par temps de sécheresse. La Terre fait le point sur cette question qui ne fait que commencer à se poser.
« On voit qu’avec le réchauffement des températures, on va avoir des étés plus secs et plus chauds. Il va falloir un effort d’adaptation », confirme Gilles Bélanger, chercheur à Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC) et spécialiste des fourrages. « Le changement de climat arrive abruptement. La sécheresse n’a jamais été vraiment étudiée au Québec, mais ça devrait l’être », estime pour sa part Alphonse Pittet, producteur laitier et président du Conseil québécois des plantes fourragères (CQPF), qui déplore le peu d’investissements en recherche sur les plantes fourragères.
Choix des espèces
Parmi les efforts d’adaptation à faire, il y a notamment le choix des espèces. Gilles Bélanger indique par exemple que la fléole des prés, appelée plus communément le mil, est une plante fourragère très répandue au Québec. Il est cependant reconnu qu’elle résiste mal à la sécheresse en raison de ses racines peu profondes.
Le chercheur d’AAC mentionne que la fétuque élevée, plus résistante, est déjà utilisée par certains producteurs. Il faut toutefois des coupes plus rapides avec cette espèce afin de conserver une bonne appétence pour les animaux.
De nouvelles espèces sont également envisagées, comme la chicorée. « En 2008, nous avons effectué un voyage d’études en Nouvelle-Zélande lors d’une sécheresse historique et la chicorée poussait très bien alors que les autres espèces flétrissaient », explique Denis La France, professeur en agriculture biologique au Cégep de Victoriaville. Des essais ont été réalisés l’an dernier en prairie à la ferme de l’Institut national d’agriculture biologique et la chicorée « était belle, malgré une sécheresse relative ». La chicorée fourragère, qui ressemble un peu à du pissenlit, est encore en observation cette année. Une chercheuse de l’Université Laval s’intéresse d’ailleurs à cette plante.
Des producteurs de France et de Nouvelle-Zélande considèrent également le plantain comme une espèce fourragère résistante à la sécheresse et qui remplace le ray-grass à certains endroits. Le tanin qu’elle contient aurait par ailleurs des effets positifs sur la santé des ruminants. Aucun essai sur cette plante résistante à la sécheresse n’aurait été fait au Québec.
Cultivars de fléole
L’abandon de la fléole n’est peut-être pas la seule option. La chercheuse Annie Classens, d’AAC, travaille de son côté à tester des cultivars de fléole provenant de 19 pays pour voir quels sont ceux qui ont le meilleur système racinaire et le plus grand regain après une période de sécheresse. On devrait obtenir de premiers résultats dans les prochains mois.
L’entreprise Pickseed a par ailleurs mis en marché une variété résistante à la sécheresse. Certaines variétés de festulolium, une graminée issue du croisement entre une fétuque et un ray-grass, seraient également de bons choix.
Stocker plus de foin Une autre approche pour mieux se préparer en cas de sécheresse serait de produire plus de fourrages les bonnes années et de les entreposer de façon efficace pour pouvoir les conserver 18 mois ou plus. « Dans le marché des céréales, les stocks de report sont importants. On essaie d’imaginer un système semblable pour le foin », lance Alphonse Pittet. Ce dernier estime qu’il serait possible d’engranger du foin ou de l’ensilage pendant 24 mois dans de bonnes conditions. Il craint qu’une autre année de sécheresse en 2019 soit « catastrophique » puisqu’il n’y aura pratiquement plus de réserves. |