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Aubergine africaine et chou chinois, okra, amarante, patate douce ou babaco, de plus en plus de fruits et légumes exotiques sont cultivés dans les serres et les champs du Québec. En quête de variété, le consommateur en redemande, ce que des producteurs ont bien compris. Après tout, s’il est possible d’en faire la production chez nous, pourquoi laisser ce marché à l’importation?
Au moment de remplir le panier d’épicerie, des critères comme la traçabilité ou le respect des normes de culture sont devenus décisifs pour bon nombre de consommateurs. Entre un bok choy cultivé en Asie, et un autre issu des terres de Lanaudière, il est bien possible que le légume produit localement gagne en premier la confiance de l’acheteur, préoccupé de santé et d’environnement.
Cette demande croissante pour les légumes exotiques, de surcroît cultivés chez nous, incite de plus en plus de producteurs à faire le saut.
Pour les frères Philippe et Pascal Forest, qui produisent chou napa, courge kabocha et chou chinois plat à Saint-Jacques-de-Montcalm, dans Lanaudière, tout a commencé il y a huit ans. « Un jour, un monsieur chinois s’est arrêté devant notre champ de melons, raconte Philippe Forest. Il allait prendre sa retraite et voulait léguer son savoir. Il disait qu’il connaissait un marché pour les fruits et légumes exotiques. » Les Forest l’ont alors référé à Julie Nichols, une agronome qui voulait faire du commerce. C’est ainsi qu’Organzo a commencé. Aujourd’hui, les frères Forest cultivent 85 hectares de légumes asiatiques, achetés en totalité par cette entreprise, qui les distribue aux États-Unis et même en Asie.
De petits projets de culture de légumes exotiques sont mis en place ici et là, parfois par des immigrants. Edem Amegbo cultive des okras et des légumes africains comme la corète potagère, l’amarante et toute une panoplie de piments dans ses Jardins d’Edem à East Farnham. Agrémenter les paniers de légumes bio de ses abonnés, tout en écoulant sa petite production au marché auprès d’une clientèle africaine qu’il a découverte à Granby, lui convient parfaitement. « Je n’en ferais pas mon gagne-pain principal, car ça prend du temps à produire et c’est toujours risqué. Si on a un été froid, la production sera médiocre », raconte le Togolais d’origine, qui fait venir ses semences d’Afrique.
Paterne Mirindi, directeur général de l’organisme Groupement volontaire pour le développement rural Nord-Sud, a mis sur pied un projet de culture de légumes africains aux Jardins Ricard, à Louiseville. Nourrir ses compatriotes africains, mais également fournir une occasion d’échanges culturels entre la population d’accueil et les personnes immigrantes, sont les motivations au cœur de ce projet démarré en 2013.
Aubergine africaine, feuille de courge et de haricot, morelle et amarante germent en serres pour être plantées aux champs dès que les risques de gel sont passés.
M. Mirindi a développé ses méthodes de culture en se fiant à l’expérience d’agriculteurs africains, tout en les adaptant à la réalité du climat et du sol québécois.
Un climat pas plus facile qu’avant « Le lien commun entre ces cultures issues de climats tropicaux est d’être exigeantes en eau et en chaleur et d’avoir besoin d’un sol riche », explique Albert Mondor, horticulteur et expert en plantes tropicales. Toutefois, plusieurs légumes asiatiques, notamment de la famille des choux, apprécient nos nuits fraîches, précise-t-il. Même avec le réchauffement climatique, notre climat ne serait pas plus favorable qu’autrefois à la culture des plantes tropicales. « Globalement, nos étés ne sont ni plus chauds ni plus longs. On observe plutôt un décalage de la saison d’été, qui finit plus tard, mais commence plus tard également. » S’il est plus facile de cultiver des plantes tropicales, c’est surtout parce que le matériel de culture est plus performant et que des cultivars adaptés sont développés, juge Albert Mondor. |