Régions 31 mai 2018

La maladie de Lyme poursuit sa progression et inquiète

Transmise par une tique infectée, la maladie de Lyme gagne du terrain en Estrie et dans le sud du Québec. Sa vitesse de progression est impossible à prédire. Même si un antibiotique préventif est maintenant offert dans certaines pharmacies, la prise en charge médicale est matière à controverse.

Le nombre de cas d’infection a presque doublé au Québec, passant de 179 en 2016 à 329 l’an dernier. Parmi ceux-ci, 126 provenaient de l’Estrie. Devant la prolifération de la maladie dans la région, la pharmacienne Julie Coderre, de Cowansville, a travaillé avec le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSS) de l’Estrie pour pouvoir prescrire la doxycycline à titre préventif.

Voici à quoi ressemble une tique gorgée de sang lorsqu’elle s’agrippe à la peau d’un animal ou d’une personne. Crédit photo : Shutterstock.com
Voici à quoi ressemble une tique gorgée de sang lorsqu’elle s’agrippe à la peau d’un animal ou d’une personne. Crédit photo : Shutterstock.com

Tous les deux jours, au moins une personne se présente à sa pharmacie après avoir été piquée. Le besoin d’offrir cet antibiotique qui neutralise la bactérie sans que l’on ait à se rendre à l’urgence était bien réel. La Direction de santé publique (DSP) de l’Estrie a donc autorisé une ordonnance collective pour les pharmaciens de la région, en vigueur depuis peu. 

Le médicament peut être prescrit seulement si la tique est restée accrochée à la personne pendant au moins 24 heures et doit être administré dans les 72 heures après le retrait de la tique. Il ne peut toutefois être donné aux enfants de moins de sept ans et aux femmes enceintes.

Zones grises 

Est-ce que l’antibiotique sera offert ailleurs au Québec? « J’ai l’impression que ça va aller vite », affirme Mme Coderre. « Ça viendra », s’est limitée à dire la Dre Arsenault, de la DSP de l’Estrie. 

Selon la Dre Arsenault, les symptômes de la maladie de Lyme (voir encadré) sont bien connus et le diagnostic n’est pas « très complexe ». Autre son de cloche du côté de la pharmacienne Julie Coderre. « En ce qui concerne le diagnostic, on ne sait pas tout. On se fie seulement aux symptômes cliniques, mais c’est encore difficile d’établir clairement [s’il s’agit de cette maladie] », indique Mme Coderre.

Annie Roussy, vice-présidente de l’Association québécoise de la maladie de Lyme, déplore la façon dont certains patients sont pris en charge dans le milieu médical. Elle affirme qu’il y a des gens qui se sont sentis incompris ou dont le cas n’a pas été pris au sérieux. « Il y a des personnes qui ont consulté une quinzaine de spécialistes, qui se sont fait dire qu’elles étaient en parfaite santé, alors qu’elles sont de véritables loques humaines », avance celle qui représente environ 250 membres.

La DSP de l’Estrie se dit au fait des cas médiatisés de patients qui soutiennent ne pas avoir reçu « l’écoute nécessaire » lorsqu’ils ont consulté des professionnels de la santé au Québec.

Certains symptômes de la maladie de Lyme peuvent également être associés à d’autres infections ou troubles, ce qui peut compliquer la tâche des médecins qui n’étaient pas confrontés à cette affection jusqu’à tout récemment, croit Mme Roussy. « C’est quand même une maladie qui n’est pas si mystérieuse. Nos tests sont efficaces et il n’y a pas beaucoup de situations d’exception », affirme pour sa part la Dre Arsenault. 

Être « malchanceux »

« Il ne faut pas semer un vent de panique. Ce n’est pas tout le monde qui va se faire mordre par une tique infectée et développer la maladie, convient Annie Roussy, de l’Association québécoise de la maladie de Lyme. Mais il faut être conscient que ça existe. »

Selon les activités de surveillance de la DSP de l’Estrie, en 2016, une tique sur cinq (22 %) prélevée chez 116 résidents était porteuse de la bactérie Borrelia burgdorferi. Les résultats des analyses de l’année dernière ne sont pas encore disponibles. « Il faut quand même être malchanceux pour tomber sur la sorte de tique qui peut transmettre la maladie », estime Yan Quirion, conseiller en communication au CIUSS de l’Estrie.

Comme indiqué sur cette carte publiée par l’Institut national de santé publique du Québec, l’Estrie est la région où le niveau de risque est le plus élevé.
Comme indiqué sur cette carte publiée par l’Institut national de santé publique du Québec, l’Estrie est la région où le niveau de risque est le plus élevé.

Les symptômes à surveiller

Lésion atypique ou de 5 cm et moins après la piqûre de la tique;
Réaction probable d’hypersensibilité pendant 72 h;
Possible fièvre, fatigue, maux de tête, raideur à la nuque, douleurs musculaires et articulaires.

Le risque est plus grand si la tique reste accrochée 24 h ou plus et si elle provient de certaines zones (Estrie, Montérégie, Outaouais). La doxycycline doit être administrée en 72 h ou moins pour les cas à risque.

D’où vient la maladie de Lyme?

La maladie de Lyme a été décrite pour la première fois en 1977. Plusieurs cas ont alors été signalés chez des enfants de la ville de Lyme au Connecticut, aux États-Unis. Depuis, des milliers de cas ont été rapportés chez nos voisins du Sud, au Canada et dans des pays d’Europe.

Pour éviter les piqûres de tiques
En promenade, marchez de préférence dans les sentiers et évitez les herbes hautes;
Utilisez un chasse-moustiques sur les parties exposées de votre corps, en évitant le visage;
Portez un chapeau, des souliers fermés et des vêtements longs;
Entrez votre chandail dans votre pantalon;
Entrez le bas de votre pantalon dans vos chaussettes ou vos bottes.

Source : Ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS)
Pour plus d’information : sante.gouv.qc.ca/problemes-de-sante/maladie-de-lyme