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Depuis 40 ans, la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles (LPTAA) veille au grain. Malgré cette loi, le milieu agricole a sacrifié plusieurs dizaines de milliers d’hectares de sa zone verte. En dépit de leurs critiques, les différents acteurs de l’aménagement du territoire témoignent de l’importance de la Loi et plaident pour une légère cure de rajeunissement. La Terre s’est penchée sur la question.
En 1978, le gouvernement de René Lévesque adoptait la Loi sur la protection du territoire agricole. Quarante ans plus tard, cette pièce législative a-t-elle réussi à protéger la zone verte?
« Je pense que la protection du territoire agricole est une préoccupation qui est bien intégrée et que la nécessité de préserver le territoire agricole fait encore consensus », affirme d’emblée le nouveau président de la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ), Stéphane Labrie.
Malgré ce « constat positif », il observe que les défis de l’époque existent toujours. « Il y a encore une forte pression pour de l’utilisation de terres agricoles à des fins autres. Ça réaffirme la nécessité de maintenir cette loi. »
La CPTAQ est souvent perçue comme un frein au développement, tant en territoire rural qu’urbain. Pour Me Labrie, il s’agit d’une perception erronée. « Bon an, mal an, entre 60 et 70 % des demandes d’autorisation sont accordées », précise-t-il. En même temps, la Commission se montre critique à l’égard de l’appétit de certains demandeurs. Depuis le début des années 1990, l’organisation a refusé près de 80 000 hectares (ha) de dézonage. « Sans la CPTAQ, on aurait probablement perdu de très bonnes terres au profit de développements qui se sont probablement réalisés en zone blanche », affirme Me Labrie.
Pour Bernard Ouimet, qui a présidé la Commission de 1994 à 2004, la LPTAA fait face à des défis importants, dont la réduction de l’étude des demandes au cas par cas. « Cela entraîne une lourdeur inévitable quand vous avez rendu des dizaines de milliers de décisions au fil des ans », soutient-il. En plus de minimiser les effets à long terme des décisions, le cas par cas mène à une judiciarisation non souhaitable. Bien des gens – des avocats, des consultants en zonage, des développeurs et des municipalités – tirent profit de cette judiciarisation, affirme l’auteur du rapport Protection du territoire agricole et développement régional. Publié en avril 2009 à la demande du gouvernement, ce document proposait une série de réformes à la LPTAA dont la grande majorité n’a pas été implantée.
Petits ajustements, grand changement
De l’avis de M. Ouimet, quelques petites retouches suffiraient à insuffler à la Loi une dynamique pour les 40 prochaines années. « Il faudrait poursuivre l’allégement dans son application », explique-t-il. Sa solution, maintes fois répétée, passe notamment par l’identification d’usages non agricoles, largement autorisés par la Commission, qui pourraient être permis sans l’autorisation de cette dernière. « J’ai toujours parlé d’ententes, de consensus et de concertation. Non pas de donner plus de pouvoirs aux municipalités », précise Bernard Ouimet.
Les pouvoirs du législateur
En 40 ans, la présence de la loi sur la protection du territoire agricole n’a pas empêché le Québec de perdre de grands pans de sa zone verte. Les plus importants morceaux ont été retirés par le gouvernement lui-même en écartant la CPTAQ, comme cela a été le cas avec le prolongement de l’autoroute 30. Le récent projet de loi 85 viendrait aussi écarter la Commission de l’étude de dossiers d’implantation d’entreprises du secteur de la logistique aux abords de cette même autoroute. Pour sa part, le projet de loi 122 autorise maintenant Québec à « prévoir, par règlement, les cas où l’utilisation de lots à une fin autre que l’agriculture est permise sans autorisation de la Commission ».
66 000 ha sacrifiés Depuis 1994, plus de 66 000 hectares (ha) ont été perdus ou fragilisés pour la pratique agricole. Ceux-ci sont toutefois passés sous le radar puisqu’ils n’ont pas été comptabilisés comme un rétrécissement de la zone verte. Selon la Commission, la zone verte n’a perdu que 459 ha par rapport au début des années 1990. Ces statistiques ne tiennent pas compte des quelque 66 843 ha utilisés à des fins autres qu’agricoles depuis 1994. Ces 66 000 ha ont fait l’objet de ce que la Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) appelle des usages non agricoles. Ces UNA, dans le jargon du zonage, comprennent notamment la construction de résidences, l’exploitation de sablières et de gravières de même que le passage de lignes électriques. À la CPTAQ, ces autorisations ne sont pas comptabilisées dans les exclusions de la zone verte. Elles représentent néanmoins des pertes ou des contraintes pour l’activité agricole. D’ailleurs, peu de ces hectares reviennent un jour à l’agriculture. La Commission ne dispose cependant pas de chiffres précis à cet effet. |
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