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Le Programme d’investissement pour fermes laitières (PIFL) soulève le mécontentement de nombreux éleveurs québécois. Plusieurs s’interrogent sur le respect du principe du premier arrivé, premier servi.
Le 22 août dernier, Rose-Alice Côté envoyait sa demande de financement au PIFL, deux secondes après l’ouverture des candidatures. « Nous avions un projet sans faille. Nous avions même les numéros de série des robots de traite », raconte la productrice du Saguenay–Lac-Saint-Jean, qui exploite avec sa famille une ferme laitière et la Fromagerie Médard.
Leur projet majeur était bien documenté puisqu’il faisait déjà l’objet d’un soutien de La Financière agricole du Québec. Le 16 janvier, Mme Côté a reçu une lettre d’Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC). Cette dernière stipulait : « Compte tenu du moment où votre demande a été reçue, votre projet ne sera probablement pas financé dans le cadre de la phase actuelle du programme. Votre demande est donc placée sur une liste d’attente et sera examinée si des demandes présentées plus tôt que la vôtre sont retirées ou jugées non admissibles. » Rose-Alice Côté se questionne sur le réel fonctionnement du principe du premier arrivé, premier servi, puisque des projets soumis plusieurs heures après le sien ont été acceptés. « Quelles sont les nouvelles règles? On a droit à des réponses », lance-t-elle, révoltée.
Guy Caza, de Saint-Anicet, a également reçu une réponse négative pour son projet majeur de construction d’une nouvelle salle de traite. « J’ai appelé chez AAC. Ils ne m’ont pas donné grand renseignements, sauf que du point de vue régional, je n’ai pas déposé mon projet assez vite. Si huit minutes après l’ouverture du programme, mon projet était déjà en retard, comment ça se fait qu’AAC a laissé le programme ouvert pendant une semaine? Il n’y a rien de logique! Premier arrivé, premier servi, ça ne fonctionne pas », affirme-t-il.
« Ça nous donne l’impression qu’ils ont choisi d’accepter plus de projets mineurs plutôt que d’y aller selon le principe du premier arrivé, premier servi comme c’était annoncé », déplore pour sa part Éric Bolduc, un éleveur d’Amos. Son volumineux dossier a été acheminé deux minutes après l’ouverture du programme. Puisque son projet rentrait de justesse dans la date de rétroactivité de la première phase du PIFL, il ne sera pas admissible à la deuxième phase.
Fédéral
Le porte-parole d’Agriculture Canada, Patrick Girard, assure que les demandes sont examinées selon le principe de premier arrivé, premier servi. Par la suite, l’enveloppe budgétaire est distribuée selon la répartition régionale du quota national de même qu’un juste équilibre entre les petits investissements et les gros. Le fédéral assure que « plus des trois quarts des demandeurs ont été avisés que l’un de leurs projets sera probablement approuvé » et que « jusqu’ici, aucun projet n’a été refusé ».
Plus de chance
Certains producteurs laitiers ont tout de même reçu des réponses favorables du PIFL. C’est le cas de Kevin Lampron, dont le projet de séparateur de lisier sera financé. L’agriculteur est allé déposer sa demande directement à Ottawa. De son côté, Olivier Lavertu a vu l’un de ses deux projets accepté. L’éleveur de Warwick devrait recevoir environ 50 000 $ pour soutenir ses investissements de 600 000 $.
M. Lavertu nageait en plein chantier d’agrandissement lorsque le PIFL a été lancé, en août dernier. « Ç’a tellement parti en peur! Dans la même semaine, le prix des silos a augmenté de 20 %. Le plus triste, ce sont les producteurs qui ont de la misère à arriver et qui se lancent dans des projets. Ça me fait peur », conclut le copropriétaire de la Ferme Vertulait.
Pas plus d’argent
Jean-Claude Poissant, le secrétaire parlementaire du ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, affirme que le gouvernement s’est inspiré des recommandations de producteurs laitiers avant d’élaborer le Programme d’investissement pour fermes laitières (PIFL). « Les jeunes nous proposaient d’avoir un programme d’investissement dans les entreprises plutôt que d’envoyer un chèque à tout le monde », explique-t-il.
Ottawa consulte encore afin d’évaluer si des modifications seront apportées pour la deuxième phase du programme, qui devrait être annoncée plus tard cette année. Il promet que les éleveurs auront plus de temps pour monter leurs dossiers. Une bonification de l’enveloppe n’est toutefois pas prévue.
Plus d’équité réclamée À l’origine, le gouvernement fédéral devait mettre en place un programme d’aide afin d’atténuer les pertes liées à l’Accord économique et commercial global (AECG) entre le Canada et l’Union européenne. Pour les Producteurs de lait du Québec, le PIFL n’atteint pas cet objectif puisqu’un nombre restreint d’éleveurs en bénéficieront, alors que l’AECG et le Partenariat transpacifique auront un impact sur tous les producteurs de lait au pays. De plus, les fonds du programme sont largement insuffisants. L’actuelle première phase dispose de 129 M$ pour tout le Canada, dont 47 M$ pour le Québec. Pourtant, dans la Belle Province seulement, 1 382 projets ont été soumis pour 130 M$ de demandes! « Nous sommes très, très déçus. Ce n’est pas ce que nous avions demandé », affirme Daniel Gobeil, président des Producteurs de lait du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Deux phases Le PIFL dispose d’une enveloppe de 250 M$ sur cinq ans. Il se base sur le principe de partage des coûts, jusqu’à un maximum de 50 % de remboursement et jusqu’à concurrence de 250 000 $ pour les projets majeurs et de 60 000 $ pour les mineurs. Lors de la deuxième phase, la priorité sera accordée aux producteurs qui n’auront pas reçu de financement au cours de la première. |