Régions 7 février 2018

Aucun secteur n’est à l’abri

Johanny Perreault peine à recruter des travailleurs malgré tous les avantages sociaux qu’elle offre. Un casse-tête auquel sont confrontés tous les secteurs de toutes les régions.

Un problème récurrent

Johanny Perreault travaille 15 heures de plus par semaine qu’en 2017 à sa ferme laitière de Sainte-Mélanie, dans Lanaudière. Elle peine à recruter et à retenir les 25 à 50 ans, même si elle fournit un véhicule de fonction, donne la possibilité de louer un logement à proximité, offre des horaires flexibles toujours préparés deux semaines d’avance, un salaire de 15 $/h et des vacances. Elle a réussi à embaucher un travailleur mexicain durant une courte période, mais il s’ennuyait trop de sa famille. En attendant, elle engage des jeunes et des retraités, une main-d’œuvre temporaire, et fait preuve de résilience, car le problème est récurrent dans sa région depuis l’époque de ses parents. 

Petite ferme, grand stress

Le manque de fiabilité et d’ardeur au travail de certains employés a causé beaucoup de stress à Jean-Michel Plante et Annik Lachance, qui produisent des paniers de légumes biologiques pour 1 500 personnes, à Saint-Édouard-de-Lotbinière. « Le problème de recrutement, c’est très difficile à vivre. On a eu des employés qui se couchaient dans le champ; d’autres qui partaient avant la fin de leur contrat. Il y a des cultures qu’on a dû abandonner. Et on travaillait comme des fous pour combler les départs », mentionne M. Plante. La vie des producteurs a changé lorsqu’ils ont décidé en 2017 d’embaucher des travailleurs étrangers. « Ils travaillent à la perfection et nous respectent. On peut se concentrer sur la mise en marché », ajoute-t-il. 

« Des étrangers ou je quitte la ferme »

Claire Désaulniers a appris l’espagnol à 50 ans. « Je n’en pouvais plus des problèmes de main-d’œuvre et mon mari était insatisfait des performances du troupeau. Ça entraînait même des conflits dans notre couple. On embauchait des travailleurs étrangers ou je quittais la ferme », relate la copropriétaire de la Ferme Pittet, qui possède 260 vaches en lactation à Saint-Tite. Elle mise actuellement sur la meilleure équipe constituée de quatre employés étrangers et d’une Québécoise.

« Contrairement à ce que les gens croient, la main-d’œuvre étrangère n’est pas donnée, mais elle nous le rend bien. C’est même venu valoriser mon travail à la ferme », assure Mme Désaulniers. 

Pas de bûcherons; on mécanise

L’abattage d’arbres est un travail physique qui n’attire pas les jeunes, affirme l’entrepreneur Louis Quintal, de Trois-Rivières. « Trouver du monde, ce n’est vraiment pas évident. Ceux qui savent manœuvrer une scie préfèrent travailler comme émondeurs ou pour Hydro-Québec; c’est plus payant. Notre solution, c’est de nous mécaniser au maximum », dit celui qui mise sur une abatteuse multifonctionnelle pour travailler en forêt privée. Lorsque l’abattage manuel est requis, faute de main-d’œuvre, il doit lui-même manier la scie. « J’ai essayé des travailleurs étrangers, mais comme d’autres entrepreneurs l’ont aussi remarqué, ils ne se débrouillent pas bien en mécanique. Tu ne peux pas les envoyer bûcher tous seuls », mentionne-t-il. 

Un service de remplacement très sollicité

La Coopérative de solidarité de services de remplacement agricole a permis de combler 4 800 heures de remplacement l’an dernier dans des fermes de l’Estrie et du Centre-du-Québec. Certains agriculteurs font appel à ce service à la suite d’un accident, d’épuisement ou pour la conciliation travail-famille. D’autres le font en raison de problèmes de main-d’œuvre. « Des producteurs m’appellent en panique pour me dire que leur employé est parti et qu’il leur faut quelqu’un rapidement. On ne fournit pas », dit la coordonnatrice Christine Gaudet. Ironiquement, l’organisme peine à recruter… des remplaçants. 

Stratégie musclée chez Olymel

Olymel dispose d’une équipe à temps plein et d’une stratégie en plusieurs volets pour embaucher. L’employeur organise des navettes d’autobus pour les travailleurs de Montréal et de Québec, fait appel à des firmes spécialisées de recrutement, participe à des foires d’emploi et a créé un microsite Internet dédié. Des primes pouvant atteindre 500 $ ont été instaurées pour chaque employé recommandé par un travailleur en place. Finalement, Olymel compte aussi sur le programme des travailleurs étrangers temporaires depuis 2009 et attend d’ailleurs 119 francophones de l’île Maurice d’ici peu. Certains viennent également de Madagascar et bientôt de Belgique. Olymel appuie la demande de résidence permanente de ceux qui le souhaitent. 

VOIR AUSSI
La pénurie de main-d’œuvre est généralisée
La croissance des transformateurs compromise
5 conseils pour recruter et retenir ses employés