Vie rurale 1 février 2018

Une patate, c’est une patate!

Lorsqu’on lance son entreprise, on se cherche des clients, on essaie de répondre à toutes les exigences. Avec le temps, j’apprends à répondre à ces clients qui recherchent un prix plutôt qu’un produit.

Cette année, j’ai même refusé une vente… par principe. Je ne voulais pas « donner » mon produit, ou le vendre à quelqu’un qui négocie exagérément versus mes super clients prêts à m’encourager et qui sont présents année après année sans rien demander.

Ce n’est pas facile. À la suite de cet événement, je me trouvais bizarre d’avoir refusé une vente pour une différence de 2 $! Pourtant, mon produit a une valeur raisonnable. Je fais le tour des marchés et des épiceries pour fixer mon prix et je m’assure de rentabiliser mon coût de production. Non, mais quand même, ces patates, je les ai plantées et j’ai épandu l’engrais à la main. Pour ne pas mettre d’herbicide, j’ai désherbé au pyrodésherbeur (donc à la main) et j’ai fait une seule application d’insecticide sur le feuillage pour contrer ce fameux doryphore (et je peux dire qu’avant cette application, il y a eu quelques ramassages manuels). Par la suite, récolte manuelle et lavage à la main! Chaque tubercule est donc inspecté avant l’ensachage… Gagez-vous qu’elles sont plus belles, plus fraîches et meilleures que ce qu’on retrouve à l’épicerie?

Donc, pour revenir à mon monsieur (bougon, en plus), il me dit : « Qu’est-ce qu’elles ont tant, vos patates, pour que vous les vendiez cher de même? Une patate, c’est une patate! » Bien non, mon cher monsieur, car mes patates, elles ont beaucoup moins d’insecticides qu’une patate conventionnelle, aucune application de fongicide, elles sont fraîchement cueillies, elles ne noircissent pas à la cuisson. Elles n’ont pas fait des centaines de kilomètres en camion pour se rendre du point A à B puis à C. Et c’est bizarre à dire, mais elles goûtent la bonne patate : sucrées, goûteuses, fermes, elles ont été récoltées il y a moins d’une semaine. Donc, j’ai dit à mon monsieur que je ne baisserais pas mon prix… Un client de moins, car je ne pense pas qu’il va revenir, mais en même temps, est-ce ce genre de client que je désire ou bien des clients heureux de m’encourager, qui sont conscients du travail que cela comporte et qui savourent de bons légumes frais et goûteux?

Oui, je me casse la patate à soigner comme cela mes produits, mais je contrôle mes variétés, les formats, le goût, les moments de récolte, pour avoir un produit le plus frais possible et de la plus belle qualité possible, et c’est notre fierté, nous, les agriculteurs, d’offrir ces denrées après avoir tant travaillé! 

Annie Drolet, Agrimom

NDLR – Afin de préserver l’authenticité du style des blogueuses et à la demande de celles-ci, les textes diffusés sur le blogue Agrimom.ca sont publiés ici dans leur version originale.