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À compter d’aujourd’hui, tous les travailleurs agricoles saisonniers migrants ou du Québec pourront adhérer à un syndicat, peu importe la taille de l’entreprise agricole où ils travaillent.
Dans un communiqué de presse, le syndicat de Travailleurs et travailleuses unis de l’alimentation et du commerce au Québec (TUAC) se réjouit de cette décision « d’accorder aux travailleurs agricoles saisonniers les mêmes droits que ceux de tous les travailleurs du Québec, notamment celui d’adhérer à un syndicat ».
Mais à l’Association des producteurs maraîchers du Québec (APMQ), on est en colère et on dénonce cette décision. André Plante, président de l’APMQ, croit que cette décision pénalisera notamment la compétitivité des entreprises québécoises. « Nous allons, lors d’une assemblée générale spéciale le 19 mars prochain, inviter tous nos membres à interpeller les candidats de leur circonscription sur l’avenir de la production des fruits et légumes du Québec », précise-t-il. Présentement, l’APMQ compte sur l’appui de tous les leaders agricoles québécois, notamment l’Union des producteurs agricoles (UPA), les différentes associations de producteurs et La Coop fédérée.
À l’Union, on mentionne avoir rencontré et questionné le gouvernement du Québec à la suite de la décision de la Cour supérieure du Québec. « Malheureusement, le gouvernement n’a pas su utiliser le temps alloué pour trouver une solution. Probablement que la perception du gouvernement était que cette décision allait avoir peu d’impact. Pour nous, ne rien faire n’était pas la solution », indique Marcel Groleau, président de l’UPA.
Les leaders agricoles croient à la nécessité d’encadrer le droit d’association pour les petites exploitations agricoles, qui emploient parfois quelques dizaines de travailleurs étrangers temporaires (TET). Pour la plupart, ces entreprises ne disposent pas des ressources nécessaires pour administrer des conventions collectives ou faire face à des griefs. « Ces exploitations gèrent les ressources humaines à la semaine, selon les situations. Et c’est cette particularité que l’article 21(5) reconnaissait, particularité qui existe toujours et que le prochain gouvernement devra adresser », dit Marcel Groleau.
Impact économique
« L’abrogation de l’article 21(5) exercera un impact économique important pour les producteurs maraîchers », indique André Plante. Les contrats de travail négociés par les différents pays précisent le nombre d’heures de travail minimal et maximal par semaine à un taux horaire. « Les TET ne donneront pas 7 à 10 $ par semaine à un syndicat pour contrôler des ententes déjà bien négociées. Si un syndicat voulait négocier du temps et demi après 50 heures de travail par semaine, ça fait 10 heures à temps et demi et ça représenterait 8 % d’augmentation sur la main-d’œuvre. Le personnel représente 50 % du coût d’exploitation des entreprises maraîchères. Avec de telles augmentations, les producteurs maraîchers vont faire autre chose, par exemple cultiver des céréales où le prix est fixe, le besoin de main-d’œuvre peu exigeant, etc. », affirme André Plante.
Piste de solution
« On croit que le gouvernement pour le secteur pourrait offrir une voie à travers la Commission des normes du travail, par exemple. L’intérêt pour les TUAC est de syndiquer les travailleurs étrangers temporaires, car il n’y a presque pas de travailleurs saisonniers québécois », estime Marcel Groleau. Les TET ont déjà des conditions de travail déterminées; le taux horaire, les frais d’hébergement, toutes les conditions de travail sont négociées par le pays d’où provient le travailleur. « Donc, il faut s’assurer que les conditions soient respectées par les employeurs québécois qui utilisent cette main-d’œuvre. Il faut se donner un régime simple pour s’assurer que les conditions négociées de part et d’autre soient respectées et où une tierce partie pourrait intervenir. Je crois que l’enjeu est là. Pour répondre à cet enjeu, la syndicalisation par entreprise n’est pas la solution, car il y aura toujours des entreprises avec des travailleurs étrangers temporaires qui ne seront pas syndiqués. Ces TET n’auront pas la protection ou l’assurance que leurs conditions seront respectées. Cette solution est peu coûteuse, facile à administrer et serait à l’avantage des travailleurs et des entreprises », conclut Marcel Groleau.
En mars 2013, la Cour supérieure du Québec confirmait la décision de la Commission des relations de travail (CRT). Celle-ci avait déclaré inconstitutionnel et inopérant l’article 21(5) du Code du travail parce qu’il contrevenait avec la liberté d’association garantie par la Charte canadienne des droits et libertés et la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Rappelons que l’article 21(5) du Code du travail stipule que les personnes employées sur une exploitation agricole ne sont pas considérées comme des salariés à moins que l’on y compte ordinairement et continuellement un minimum de trois employés. Le gouvernement du Québec avait un an pour apporter des modifications au CRT; il a plutôt décidé de rendre inopérant l’article 21(5).