Lait 5 novembre 2024

Un troupeau de Suisses brunes poussé vers la productivité

ACTON VALE – Sitôt entrée dans l’étable de la Ferme Hans, La Terre est accueillie par de sympathiques vaches qui viennent lui tapoter l’épaule avec leur tête en guise de salutations. D’autres viennent braquer leur museau devant la caméra durant la prise de photos, comme pour signaler qu’elles ont hâte de participer au reportage. 

« C’est vraiment facile de travailler avec les Suisses brunes, parce qu’elles sont très calmes et affectueuses, mais aussi très collantes. Presque trop, des fois », rigole Hans Schweizer, lors de la visite de ses installations d’Acton Vale, où les animaux déambulent librement. « Elles sont toujours après moi et après les visiteurs qui rentrent ici. »

Son troupeau de 65 têtes, qui compte environ 40 vaches en lactation, est uniquement composé de Suisses brunes, ce qui est peu commun au Québec, car cette race n’a pas la réputation de produire beaucoup de lait et d’être aussi rentable que la Holstein.

Les Suisses brunes aiment beaucoup braquer leur museau devant la caméra, lors de la prise de photos. Photo : Caroline Morneau/TCN

Or, selon les données du contrôleur laitier Lactanet, les vaches de Hans Schweizer comptent parmi les plus productives de leur race à l’échelle de la province, voire du pays, chacune d’elles produisant, en moyenne, plus de 10 000 kg de lait par année. C’est plus bas que la moyenne canadienne de 11 253 kg de la Holstein, mais suffisant pour que la ferme soit rentable, affirme l’agriculteur, en soulignant que les Suisses brunes donnent beaucoup de matière grasse. À titre comparatif, le lait de son troupeau contient 4,3 % de gras, alors que celui d’une Holstein en contiendrait plutôt 4,08 %, en moyenne.

Elles vont donner moins de lait, surtout à la première lactation, mais il sera plus riche, fait valoir l’éleveur. Et il y a moyen d’améliorer le rendement laitier, en leur donnant de bonnes choses à manger et les bons suppléments. C’est la même chose que pour la Holstein; si tu leur donnes de la scrap, c’est certain qu’elles ne produiront pas. 

Hans Schweizer

M. Schweizer précise que cette race est reconnue, à la base, pour bien transformer le foin en lait. En suivant à la lettre les recommandations de son agronome et en faisant bien ses analyses, il tâche donc de cultiver un fourrage de qualité, auquel les vaches ont droit à volonté. Toujours avec l’aide de son expert-conseil, il ajoute à la ration le bon dosage de tourteau de soya et de maïs humide. Pour la reproduction, par ailleurs, il dit sélectionner des taureaux en fonction du rendement laitier qu’ils transmettent.

Lors de sa visite, le 28 octobre, La Terre a fait la connaissance de Pouffa, la meilleure productrice du troupeau, qui avait vêlé la veille. Après n’avoir produit que 8 000 kg de lait à sa première lactation, sa production annuelle a grimpé à 13 000 kg, à chacune des lactations suivantes. Elle en sera à sa cinquième.

Des vaches calmes et un robot de traite 

À la Ferme Hans, toutes les vaches vont se faire traire d’elles-mêmes, depuis que la ferme est passée à la stabulation libre, en 2015, et qu’un robot y a été ajouté. Cette décision allège beaucoup le travail de Hans Schweizer, 62 ans, qui s’occupe seul de la ferme, avec l’aide occasionnelle de sa voisine et de son fils. Surtout que les Suisses brunes se gèrent bien en stabulation libre. Elles sont douces et peu bagarreuses, ce qui ­facilite la manipulation des animaux.

« J’ai déjà eu des Holsteins et je n’y retournerais pas. Pour moi, les Suisses brunes, ça marche très bien. J’aime leur calme. Elles vivent longtemps et sont moins souvent malades », énumère le producteur laitier ­originaire de Suisse. 

Originaire de Suisse

En 2000, il raconte avoir repris la ferme d’Acton Vale que son père avait acquise quatre ans plus tôt, après avoir immigré au Québec. À l’époque, l’entreprise laitière ne logeait que des Holsteins. Puis, un événement banal, en 2006, a été l’élément déclencheur de la conversion ­progressive du troupeau vers la race Suisse brune.

« C’est ma fille qui m’avait dit, quand elle avait à peu près 16 ans, qu’elle voulait essayer une autre couleur de vache et j’ai accepté », raconte M. Schweizer, avec un sourire. « Comme je connaissais bien la Suisse brune, parce que mon père en avait en Suisse, j’ai commencé à en ajouter au troupeau. C’est comme ça que ç’a ­commencé. »

Par leur couleur noire, on remarque tout de suite les quelques vaches croisées Suisse brune et Holstein à la ferme.

Par leur couleur noire, on remarque tout de suite les quelques vaches croisées Suisse brune et Holstein à la ferme.

Des vaches croisées

Parmi toutes les vaches brunes et grisâtres qui sont logées à la Ferme Hans, quelques-unes, de couleur noire, ressortent du lot. « Ce sont des vaches croisées Holstein et Suisse brune », explique Hans Schweizer, qui a eu envie d’essayer les croisements, vers 2012, alors qu’il élevait encore les deux races à sa ferme. Il souhaitait converger vers la Suisse brune, sans devoir se départir de toute la bonne génétique Holstein qu’il avait. « J’avais de super bonnes vaches Holstein que j’ai gardées et que j’ai croisées avec des mâles Suisses brunes. Le résultat a été très bon, ç’a donné beaucoup de vaches productives en lait et avec une belle conformation », assure l’éleveur dont l’étable héberge, encore aujourd’hui, cinq sujets de deuxième génération issus de ces croisements. « Elles sont bonnes; j’en ai une qui produit au-dessus de 11 000 kg de lait par année », indique l’agriculteur.