Lait 28 octobre 2024

Motivés à faire toutes leurs journées additionnelles

Ça roule à plein régime, cet automne, à la Ferme Roquet, dans Chaudière-Appalaches. C’est qu’en plus du quota émis en septembre, il y a beaucoup de journées additionnelles à produire… et pas question d’en manquer une seule.  

« Des fois, c’est plus dur d’y arriver, mais cette année, ça marche très bien. On va faire toutes nos journées », témoigne Anthony Rodrigue, qui est copropriétaire de la ferme de Saint-Côme–Linière avec ses parents, Sylvio Rodrigue et Barbara Paquet. 

La demande en lait est forte en 2024, si bien que 13 journées additionnelles ont été prévues au calendrier, dont 10 étaient à faire d’août à novembre. À titre comparatif, l’automne précédent avait été beaucoup plus tranquille, alors que trois journées additionnelles avaient été accordées pour la même période. 

Si certains producteurs ne parviennent pas à tout produire, les Rodrigue y arrivent plutôt bien, surtout depuis qu’ils sont passés de la stabulation entravée à la stabulation libre, il y a quatre ans, et qu’ils ont robotisé l’étable. Leur troupeau de 65 vaches en lactation n’a jamais été aussi productif qu’en ce moment. Il est d’ailleurs considéré comme le plus performant au pays parmi les fermes robotisées, selon le plus récent palmarès du contrôleur laitier Lactanet. 

La production par vache est passée de 1,3 kilogramme de matière grasse par jour (kg de MG/jour) à 1,85 kg de MG/jour. Seulement 65 vaches en lactation suffisent donc pour que la ferme fasse son quota de 120 kg de MG/jour, alors que leur étable, qui compte deux robots, pourrait en loger le double. 

« On ne pensait pas avoir une aussi bonne production au robot. On pensait qu’on aurait besoin de beaucoup plus de vaches que ça pour faire notre quota », admet l’agriculteur, qui attribue cette productivité à l’efficacité de la bâtisse, au confort des vaches, notamment avec l’ajout de lits de sable, à une gestion serrée de l’alimentation et à une bonne régie de troupeau.

Seulement 65 vaches en lactation suffisent pour que la ferme fasse son quota de 120 kg de MG/jour, alors que son étable, qui compte deux robots, pourrait en loger le double.

Payant de tout produire

La productivité du troupeau et l’espace dont les agriculteurs disposent pour traire quelques vaches de plus, lorsque la demande en lait est à son sommet, à l’automne, facilitent la capacité des éleveurs à faire leurs journées additionnelles. 

Ils s’appuient sur des données compilées par les robots sur le moment où chaque vache est en chaleur pour bien planifier leurs saillies, de sorte qu’ils ont plus de vêlages en août et en septembre. Ils parviennent ainsi à faire passer leur troupeau de 65 à 70 vaches en lactation à l’automne. Une stratégie qui s’avère payante, selon Anthony, car c’est suffisant pour produire toutes les journées supplémentaires sans devoir acheter des vaches. 

En date du 21 octobre, la ferme de 120 kilos de quota avait déjà fait près de 14 000 $ de revenus de plus, durant l’année, avec les huit journées additionnelles qu’elle avait produites. Cinq autres journées en octobre et en novembre restaient à faire. 

Juste le mois de septembre, avec trois jours à faire, ç’a rapporté 4 450 $ de plus. C’est sûr que ça vaut la peine, mais il faut être capable de le faire. Il faut que les vaches tombent gestantes au bon moment; c’est beaucoup de gestion. Ça prend plus d’espace aussi. Si tu n’as pas de place pour ta vache de plus qui va faire ta journée additionnelle, tu ne la feras pas.

Anthony Rodrigue, copropriétaire de la ferme de Saint-Côme-Linière

Une stabilité d’alimentation qui fait la différence

À Saint-Antoine-sur-Richelieu, en Montérégie, le producteur Daniel Collette n’est pas toujours parvenu, au fil des ans, à faire ses journées additionnelles, et ce, même si son troupeau figure parmi les plus performants au Canada. Or, l’ajout d’un sac d’ensilage à la ferme, à l’automne 2023, qui lui permet d’avoir de l’ensilage de maïs fermenté à l’année à ajouter à la ration des vaches, change la donne, dit-il.

« Le secret, c’est d’avoir une stabilité dans l’alimentation des animaux pour limiter les chutes de production », explique le copropriétaire de la Ferme Collette et Fils, dont le quota s’élève à 130 kg de MG/jour avec 74 vaches en lactation. Cette modification ainsi qu’une gestion serrée des saillies, semblable à celle des Rodrigue, lui facilite la tâche pour faire toutes ses journées additionnelles. 

« Le but, c’était de s’améliorer, parce que ça fait vraiment une différence au niveau du revenu. Avant, on ne faisait pas nécessairement toutes nos journées, mais cette année, on les fait toutes. On ne voulait plus en manquer une », exprime l’agriculteur.


Pas rentable d’acheter plus de vaches

À Acton Vale, les copropriétaires de la Ferme Beljacar, dont le quota s’élève à 163 kg de MG/jour, adoptent une stratégie différente. Dans leur cas, comme il faudrait qu’ils achètent des vaches pour y parvenir, ils préfèrent ne pas faire toutes leurs journées additionnelles. En septembre, à titre d’exemple, ils ont fait 1,5 jour supplémentaire plutôt que trois. « Les vaches sont tellement chères cette année que, pour nous, ça ne vaudrait pas la peine d’en acheter pour les faire au complet. À 5 000 $ la vache, si j’en achète trois, ça me coûte 15 000 $. C’est à peu près l’équivalent de ce que ça me rapporterait pour toutes mes journées d’automne. J’arriverais à zéro à la fin », calcule Dominic Vincent, dont la ferme se classe également parmi les mieux gérées au pays.

Les ventes de produits laitiers les plus élevées en dix ans

En tenant compte de l’inflation, les ventes de produits laitiers au pays seraient en voie d’atteindre leur niveau le plus élevé depuis plus d’une décennie, selon l’économiste principal de Financement agricole Canada, Graeme Crosbie, qui a publié, le 9 octobre, ses perspectives économiques pour 2024. La consommation de tous les principaux types de produits laitiers est en hausse au Canada depuis le début de l’année, surtout le fromage et le beurre. Cette hausse, souligne-t-il, est attribuable en grande partie à la croissance démographique, mais aussi à l’augmentation de la consommation par habitant.