Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
Bien nettoyer les équipements et accessoires utilisés pour la production de sirop d’érable semble aller de soi. Mais certaines pratiques sont parfois négligées et gagneraient à être plus largement adoptées pour minimiser les risques de produire du sirop dégradé, tel du sirop suri, filant, fermenté ou encore contenant des moisissures.
« Dans les 20 dernières années, l’accent a été mis sur la technologie, estime le conseiller au Club d’encadrement technique acéricole des Appalaches, Joël Boutin. On [le milieu acéricole] est de bons techniciens. On installe les tubes mieux qu’avant et on a de meilleurs rendements. »
« Mais on ne parle pas souvent des micro-organismes, fait valoir celui qui agit comme formateur et possède une érablière à Saint-Gervais. Il faut contrôler la charge microbienne de nos affaires pour ne pas en perdre le contrôle. »
« Quand il y a de la fermentation non désirée dans la sève, ça fait diminuer le pH. Et des acides sont produits par des bactéries, essentiellement des bactéries lactiques, explique la microbiologiste et professeure au Département des sciences des aliments à l’Université Laval, Marie Filteau. Elles prennent la place au profit des bactéries qui sont normalement désirables dans la sève. »
Cette modification de la sève met en quelque sorte la table à la production de sirop suri, reconnaissable à son « goût de jus de cornichon », illustre Mme Filteau, ou encore de sirop filant, visible à sa texture visqueuse. Certains acériculteurs pourraient en outre expérimenter des problèmes de fermentation ou de moisissures, au moment de l’entreposage du sirop. Autant de problèmes de contamination microbiologique qui peuvent entraîner des pertes financières importantes.
Pas définitif
« Tous les producteurs sont à risque de vivre une expérience de sirop dégradé par ces micro-organismes parce qu’ils travaillent avec de l’eau sucrée exposée aux éléments extérieurs », souligne le conseiller acéricole Joël Boutin.
« La bonne nouvelle, c’est que ce n’est jamais définitif, renchérit-il. L’important, c’est de s’informer et de revoir la façon d’assainir notre réseau aérien et souterrain. C’est la beauté avec les micro-organismes : on peut mettre fin aux problèmes qu’ils engendrent en ayant de meilleures pratiques. » M. Boutin plaide ainsi pour une meilleure « discipline » des acériculteurs à l’égard de l’assainissement de l’ensemble de leurs équipements.
Attention à la tubulure
Selon le conseiller du Club acéricole du sud du Québec Philippe Leduc, le nettoyage de la tubulure (maître-ligne, réseau de transport, etc.) à l’alcool isopropylique chaque saison est une des bonnes pratiques à ne pas négliger.
« Tout part de la tubulure en forêt, dit celui qui est également copropriétaire de l’érablière expérimentale ProForêt Acéribois. Si elle est bien assainie, on part la saison avec un réseau qui n’est pratiquement pas contaminé. »
M. Leduc recommande par ailleurs de porter une attention particulière à la tubulure souterraine, qui peut être à l’origine du sirop suri. L’utilisation de façon quasi quotidienne d’éponges pour déloger les levures formées sur les parois des tubes est avisée, selon lui.
« Certains producteurs ont peur que les éponges restent coincées et mettent de l’alcool à la place, relève-t-il. Les vapeurs d’alcool désinfectent, mais il n’y a pas le travail d’abrasion des éponges. Ça ne déloge pas les levures. »
Bon dosage
Entre autres conseils, Philippe Leduc dit également utiliser du filtrat ou de l’eau chaude pour effectuer un entretien régulier, par exemple, des bassins et de la tuyauterie dans la cabane. Cela a l’avantage de réduire les quantités de solutions de lavage utilisées et les risques de contamination.
Il est également recommandé de frotter les pièces d’équipements qui peuvent être démontées avec une brosse non abrasive à poils souples. « Je prêche pour un entretien journalier et le plus fréquent possible », dit M. Leduc. Cela dit, les bactéries et les levures ne sont pas des « ennemis à éliminer nécessairement ». « S’il n’y en avait pas, on produirait du sirop très clair et sans son goût caractéristique d’érable, estime Philippe Leduc. Mais il y a un bon dosage à avoir. » La complexité de certains réseaux de production, de plus en plus imposants, ne facilite toutefois pas les opérations d’assainissement. En ce sens, une plus grande attention devrait être portée à la conception des équipements afin qu’ils puissent être mieux nettoyés, croit le conseiller du Club acéricole du sud du Québec.