Territoire 27 septembre 2024

Des citoyens en croisade pour préserver une ancienne terre agricole

CHÂTEAUGUAY – Un groupe de citoyens tente de sauver une ancienne terre agricole de 25 hectares visée par un vaste projet immobilier de quelque 2 000 logements, à Châteauguay, en Montérégie.

La terre en question, surnommée « la terre Faubert », n’est plus cultivée par la famille qui l’exploitait jadis, et qui l’a vendue à un promoteur immobilier.

La Commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) avait accepté la demande de la Ville de Châteauguay, en 2021, de retirer cette bande de terre de la zone agricole, notamment parce que depuis l’aménagement de l’autoroute 30, en 2012, elle est enclavée entre le tronçon routier et un secteur à forte densité résidentielle, ce qui rend son exploitation plus complexe.

Certains citoyens du secteur et des groupes environnementaux ne sont toutefois pas du même avis : ils estiment le lieu mal choisi pour un projet immobilier de cette envergure et demandent plutôt à la Ville de prévoir le développement ailleurs, en préservant la vocation agricole du site et en le rendant disponible pour l’agriculture urbaine. 

Bien qu’il s’agisse d’une terre privée, Chantal Payant, coordonnatrice du groupe Boisé et écologie – Châteauguay, croit qu’il est encore possible de convaincre le propriétaire de faire don de sa propriété, en obtenant une compensation dans le cadre du Programme de dons écologiques du gouvernement fédéral.

De plus en plus, on voit dans les villes des projets agricoles. L’intérêt, c’est toute la question de l’autonomie alimentaire et la préservation des milieux naturel et nourricier.

Chantal Payant, coordonnatrice du groupe Boisé et écologie – Châteauguay

Ils ont été une cinquantaine à marcher dans les rues, pancartes à la main, jusqu’au site de l’ancienne ferme, le 22 septembre, pour faire valoir leur point de vue, en scandant : « Sauvons la terre Faubert! »

Le maire de Châteauguay, Éric Allard, mentionne que l’option de maintenir la vocation agricole du site a d’abord été envisagée par les élus. « Mais c’est collé sur des habitations. Ce n’est pas comme s’il y avait des grands champs; on s’est rendu compte assez rapidement que ce n’était pas adéquat [pour l’agriculture] », indique-t-il en entrevue avec La Terre. Il ajoute que la Ville comptait aller de l’avant avec ce développement pour remédier au manque de logements dans la région, mais en le bonifiant avec les suggestions des citoyens, par exemple en ajustant la réglementation municipale pour obliger l’aménagement d’espaces verts et autoriser l’agriculture urbaine sur les toits des édifices.

Les bâtiments étaient abandonnés depuis plusieurs années et ils représentaient un risque pour la sécurité publique, selon la Ville de Châteauguay, qui a autorisé leur démolition.

Un intérêt patrimonial perdu

Un autre argument évoqué par les opposants au projet est l’intérêt patrimonial des bâtiments agricoles datant de 1890 qui se trouvaient sur le site.  Ironiquement, le propriétaire du terrain a commencé à les démolir le 23 septembre, soit le lendemain de la manifestation citoyenne.

La Ville de Châteauguay avait autorisé leur démolition après l’obtention, en juillet, d’un avis du ministère de la Culture et des Communications du Québec, qui concluait que l’intérêt patrimonial des bâtiments ne remplissait pas les critères pour un classement provincial.

Chantal Payant, du groupe Boisé et écologie – Châteauguay, mentionne pour sa part que la MRC et la municipalité avaient aussi le pouvoir de préserver les bâtiments pour les éléments d’intérêt patrimonial qui ont été relevés dans l’avis du ministère, comme « la disposition des bâtiments sur le site ou leurs fondations en moellons », insiste-t-elle.

Le maire Éric Allard précise que la Ville n’aurait « jamais pris ce ­chemin-là », puisqu’il y a « d’autres responsabilités avant ». Il mentionne par ailleurs qu’il reste encore des fermes en activité sur le territoire, dans le secteur du chemin de la Haute-Rivière, où l’on retrouve notamment un bâtiment agricole datant de 1710, qui témoigne du passé agricole de la ville.