Ce contenu est réservé aux abonné(e)s.
Pour un accès immédiat,
abonnez-vous pour moins de 1 $ par semaine.
S'abonner maintenant
Vous êtes déjà abonné(e) ? Connectez-vous
Avec ses horaires atypiques soumis aux caprices de la météo, le métier de déneigeur est-il compatible avec la vie de famille? La Terre est allée sur le terrain demander l’avis de ceux qui seront au front dans quelques semaines…
« Ça prend une bonne équipe et une femme et une famille compréhensives », répond tout de go Samuel Robitaille, propriétaire de Sam Déneigement, qui assure l’entretien de quelque 8 000 entrées dans les Basses-Laurentides avec un groupe de près de 90 employés et sous-traitants.
« Le plus gros secret, c’est d’avoir une équipe. La personne qui commence avec le début de la tempête, qui la termine et qui doit envoyer les factures et les contrats, elle ne passera pas au travers », estime-t-il. Ce n’est qu’avec un nombre substantiel d’employés qu’il arrive à bâtir des horaires qui ne surchargent pas son équipe.
Coactionnaire du Groupe Jardins Brossard, qui compte plus de 14 000 clients et près de 160 employés sur la Rive-Sud de Montréal, Jean-François Gauthier abonde dans le même sens. « On a commencé petit chez nous, mais j’avoue qu’aujourd’hui, se lancer là-dedans tout seul, ça ne doit pas être facile. C’est un milieu très dur où on vieillit clairement prématurément. Les heures que tu fais la nuit, c’est du temps que tu ne récupéreras jamais. J’ai 45 ans, et je dirais que mon corps en a 50 probablement, mais malheureusement, c’est un métier sous-estimé », reconnaît-il.
Déneigeur à Boucherville avec près de 1 000 clients résidentiels et une vingtaine d’employés, Mathieu Lacombe a conclu une entente tacite avec sa conjointe dont la famille habite à Trois-Rivières.
Certains de ses employés demandent parfois à l’avance une semaine de congé pour aller dans le Sud avec leur copine. Mathieu Lacombe tente de les accommoder autant qu’il le peut. « J’ai deux ou trois gars à la retraite qui font du temps partiel. S’ils sont disponibles aux dates demandées, c’est ok, mais dans le cas contraire, c’est non. »
Faire équipe… en couple
Sur le groupe Facebook Déneigement Québec suivi par des centaines d’entrepreneurs en déneigement, Marie-Eve Bilodeau a écrit : « David Teasdale a embarqué sa blonde sur le pelletage. Comme ça, elle ne peut pu chialer pour les heures qu’il fait. » Le couple de producteurs maraîchers à Saint-Mathieu-de-Beloeil a-t-il trouvé la solution miracle en faisant équipe dans le déneigement des cours résidentielles?
Avec trois enfants à la maison, dont deux adolescents, Marie-Eve Bilodeau avait l’habitude auparavant de se trouver un travail pour quelques mois avant l’arrivée du printemps. Il y a trois ans, elle a démarré sa petite entreprise de pelletage manuel en effectuant le travail de finition dans les entrées déneigées par son conjoint avec son tracteur.
« Ça devenait difficile de trouver un travail à l’extérieur compatible avec la gestion d’horaire de mon chum et les enfants qui s’en allaient à l’école. Maintenant, on part en même temps la nuit pour ouvrir les cours. On revient à 6 h et je m’en viens préparer la plus jeune pour l’école. On s’en va ensuite déjeuner et on repart pour finir la job. »
Pas de rumba…
Avant le début de la saison, les entrepreneurs en déneigement rappellent à leurs troupes quelques règles de base à la veille des tempêtes : apporter des collations, des noix, de l’eau, des boissons énergisantes. « Préparez-vous à faire beaucoup d’heures et souvenez-vous que les dépanneurs sont fermés. Parfois, quand la tempête est finie et qu’on tombe en phase de nettoyage final, les gars ne veulent pas arrêter, mais on leur dit que ça fait 15, 20 heures en ligne [qu’ils travaillent]. Va te dégourdir un peu avant de finir », conseille Jean-François Gauthier.
Même les déneigeurs expérimentés doivent quelquefois se faire rappeler d’être à l’affût. « L’avant-veille d’une tempête, on avertit nos opérateurs. Même les plus anciens ont peut-être manqué une possible précipitation, mais nous, on les avertit. Ce n’est pas le temps de “partir sur une rumba”. Ils seront dans un meilleur état d’esprit pour faire leur déneigement », ajoute Samuel Robitaille.
Le propriétaire de Sam Extérieur compare le travail du déneigeur à celui d’une infirmière qui doit faire deux ou trois quarts de temps supplémentaire obligatoire dans la même semaine. « Le vrai de vrai problème, c’est que nos clients pensent que vu que c’est notre métier, c’est normal de faire ça. Qu’on a des pauses d’une à deux semaines sans tempête. Mais pour nous, c’est impossible de mettre du sommeil en banque comme les autres métiers nécessitant des heures prolongées. Eux, ils peuvent récupérer plus tard, mais pas nous », conclut Samuel Robitaille.